EN 1913, LE SCULPTEUR Anton Aicher monte à la foire de Graz « Bastien et Bastienne », une pastorale composée par Mozart à 11 ans. Son fils, Hermann crée le théâtre de marionnettes, lui donne un répertoire et sa fille Gretl, l’actuelle directrice, sa dimension planétaire. Elle règne avec Barbara Heuberger, qui lui succède à la direction artistique, sur une troupe de 12 marionnettistes. Lesquels tirent les ficelles le soir et dans la journée participent à la fabrication et à l’entretien des marionnettes. Grâce à Gretl, les Marionnettes de Salzbourg ont parcouru le monde entier, dont Paris, où elles se sont produites plusieurs fois. Rencontre à Salzbourg avec Barbara Heuberger et le directeur de scène Pierre Droin.
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN - En 1987 vous présentiez pour la première fois à Paris « les Contes d’Hoffmann » d’Offenbach avec des innovations technologiques, des rayons laser, et vous faisiez appel à Wolf Dieter Ludwig et Günther Schneider-Siemssen, deux collaborateurs de Karajan, pour réaliser mise en scène et décors. Que nous préparez-vous cette fois avec « la Mélodie du bonheur » ?
BARBARA HEUBERGER - Pour ce spectacle qui comporte plus de 50 marionnettes et multiplie les costumes (5 pour Maria, 3 pour les enfants), la difficulté majeure a été la chorégraphie. Nous avons fait appel au chorégraphe américain Richard Hamburger, qui ne parlait pas forcément le langage des marionnettes, ni même de tous les marionnettistes ! La chorégraphie impose un problème technique spécifique : les marionnettes doivent passer de main en main et pas seulement par celles du marionnettiste attitré du personnage. Moyennant quoi, Hamburger a découvert des choses que seules les marionnettes, qui se moquent de la gravité, sont capables de faire. Les décors figurent la vraie maison Trapp, ce qui n’est pas le cas du film, qui utilise deux châteaux pour donner l’illusion d’un seul lieu. Pour la technologie, rien de très particulier sinon une ou petites innovations dont vous aurez la surprise.
En 1989 à Paris, Gretl Aicher nous disait se réjouir de l’arrivée de Gérard Mortier à la direction du festival de Salzbourg et que c’est lui qui lui avait conseillé de travailler avec de jeunes régisseurs.
B. H. - Apparemment, elle a suivi ce conseil. Pour notre première pièce de théâtre, « le Songe d’une nuit d’été », de Shakespeare, nous avons fait appel à Franz-Josef Grümmer et, comme vous avez pu le voir à Paris, il y a deux ans, le résultat était surprenant.
Quels autres problèmes spécifiques l’adaptation d’un musical a-t-elle posé par rapport à l’opéra ?
PIERRE DROIN - Comme vous le savez, Mozart et Rossini sont morts depuis bien longtemps. Dans le cas de Richard Rodgers et Oscar Hammerstein II, comme pour beaucoup de compositeurs et chorégraphes américains, il existe des fondations qui sont là pour « protéger » les supposées volontés des créateurs. Dans ce cas précis il a fallu rendre des comptes très précis à la fondation Hammerstein (en fait les représentants de cinq familles), notamment pour les coupures, car nos spectacles ne peuvent guère dépasser deux heures. En fait, les trois-quarts de la musique subsistent et le texte, comme vous l’entendrez à Paris en français, suffit à la compréhension de l’histoire. Pour la tournée américaine, on nous avait fait savoir que l’on ne nous dirait qu’après la première new-yorkaise si le spectacle avait leur approbation !
Malgré cela, le spectacle a eu un succès énorme à New York, comme partout en Amérique du Nord. Est-ce que cela a été le cas chez vous ?
P. D. - Non ! Le succès a été plus international que local. Les Salzbourgeois n’apprécient pas cette histoire qui, malgré son kitsch, fait résonner des souvenirs d’une époque noire de leur histoire. Par ses relations au passé, « The Sound of Music » est devenu une musique politique. De plus, ici nous savons bien quelle est la part de romancé, car en fait la famille Trapp a quitté l’Autriche pour l’Amérique de façon plus simple. Leur banque a fait faillite et ils sont partis par la mer et non en une course-poursuite dans les montagnes.
B. H. - Nous nous préparons à monter « le Petit Prince » d’Antoine de Saint-Exupéry. Là aussi, nous nous préparons à des problèmes d’adaptation, car tous les produits dérivés du livre sont contrôlés par les descendants.
Théâtre Déjazet, du 3 décembre au 2 janvier. Réservations : 0988.77.72.73. Places de 19 à 49 euros. Informations : Salzburger Marionetten Theater, www.marionetten.at.
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