Des facteurs propices côté mère et embryon

Quand la PMA fait aussi bien que Dame Nature

Publié le 28/06/2012
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L’ÂGE FAIT DÉCIDÉMENT beaucoup… mais ne fait pas tout. C’est vrai même en terme de procréation médicalement assistée (PMA) où l’avancée en âge est pourtant bien connue pour grever les chances d’obtenir une grossesse. Une étude américaine sur près de 246 740 femmes ayant eu recours à une PMA l’illustre de nouveau avec l’échantillon le plus important jamais utilisé à cet effet. Ainsi, à partir du 3e cycle de PMA, les chances d’avoir un bébé viable se hissent entre 63,3 et 74,6 % (selon que l’estimation soit basse ou haute) pour les femmes âgées de moins de 31 ans, pour chuter ensuite à 18,6-27,8 % entre 41 et 42 ans et n’être plus que de 11,3 % au-delà de 43 ans. Mais, précision de taille, ces chiffres ne valent que pour le transfert d’embryons autologues. En cas de don d’ovocytes, les taux de naissances viables oscillent entre 60 et 80 %, et, ce, quel que soit l’âge maternel. L’embryon a donc aussi son mot à dire, et le transfert est plus efficace au stade de blastocyste qu’à celui des premières mitoses.

L’équipe de chercheurs a utilisé un registre américain concentrant les données provenant de plus de 90 % des centres spécialisés de PMA aux États-Unis. Ce registre (Clinic Outcome Reporting System, CORS) a été mis en place sous le contrôle de la Society for Assisted Reproductive Technology (SART). Tout le travail des chercheurs a été d’estimer les taux de succès de naissance viable en reliant les cycles de PMA à chaque femme individuellement. Une naissance viable était définie par un âge gestationnel d’au moins 22 semaines d’aménorrhée et un poids de naissance d’au moins 300 g.

Réserve ovarienne

Sur la période 2004 à 2009, ont été disséquées les données de 246 740 femmes ayant entrepris 471 208 cycles de PMA au total, qui ont donné lieu à 140 859 naissances viables. Les chercheurs ont choisi de faire deux types d’estimations, l’une dite « conservatrice » considérant qu’une femme n’entreprenant pas le cycle suivant n’obtiendra pas de grossesse, l’autre dite « optimale » considérant que les chances de procréer sont similaires à celles poursuivant la prise en charge.

Près de la moitié (47 %) des participantes étaient âgées de moins de 35 ans et 15 % de plus de 40 ans. En cas d’ovocytes autologues, une réserve ovarienne diminuée et une infertilité de cause utérine étaient associées à de moindres chances de grossesse viable. Ces deux facteurs étaient significativement associés à un âge plus avancé que les autres diagnostics. Les femmes à faible réserve ovarienne étaient plus susceptibles d’être traitées par don d’ovocytes et pour celles âgées de ‹ 40 ans, leurs chances de bébé étaient 50 % plus faibles que pour les autres diagnostics (infertilité masculine, endométriose, dysovulation dont le syndrome des ovaires polykystiques, origine tubaire, autres).

Stade de blastocyste

Du côté de l’embryon, les chercheurs ont étudié les taux de succès en fonction de la source autologue versus donneuse et de l’état frais ou cryopréservé. La meilleure combinaison s’est révélée être celle de l’embryon frais de donneuse. Pour les embryons autologues, les résultats étaient comparables quel que soit le statut frais ou décongelé. Le taux de succès était presque doublé en cas de transfert de deux embryons. Un transfert précoce lors des premières mitoses, à J2 ou J3, entraîne un succès de 42,7 à 65,3 % selon que l’estimation était conservatrice ou optimale ; un transfert au stade de blastocyste, à J5 ou 6, était suivi de la même manière de 52,4 et 80,7 %.

Pour les auteurs, leurs résultats pourraient décider de la poursuite d’un traitement en PMA. Dans les cas d’embryons autologues, les chances de succès continuent à augmenter après 2 ou 3 premiers essais infructueux, ce qui peut justifier de poursuivre le traitement au-delà. Ce d’autant que s’il faut passer par la suite au don d’ovocytes, le vieillissement maternel et le nombre de cycles déjà réalisés n’entachent pas les chances de succès. De plus, le recours à cette méthode pourrait être envisagé plus tôt si les chances prévisibles sont faibles pour le transfert autologue. Il reste que la promotion des ovocytes de donneuses est un peu illusoire en France, où le délai moyen sur listes d’attente est déjà d’au moins 2 à 3 ans.

N Engl J Med 2012; 366:2483-91.

 Dr IRÈNE DROGOU

Source : Le Quotidien du Médecin: 9150