« UN PREMIER accès isolé de fibrillation auriculaire (FA) paroxystique ne justifie pas la prescription de première intention d'un traitement antiarythmique, et ce quel que soit le profil du patient », indique le Dr Jean-François Leclercq. De même, face à un premier accès de FA paroxystique, a fortiori si le rythme est sinusal lors de la consultation, les spécialistes estiment qu'il n'est pas nécessaire de prescrire un traitement anticoagulant. En revanche, ce dernier s'impose en cas de premier accès de FA persistant au-delà de 24 heures. « La situation est un peu différente quand on ne sait pas s'il s'agit véritablement d'un premier accès », poursuit le Dr Leclercq. Dans ces circonstances, la sécurité impose la mise sous traitement anticoagulant.
Les facteurs de risque thromboembolique sont bien identifiés. Ce risque s'élève de façon linéaire avec l'âge, sans que l'on puisse donner un âge limite. Une cardiopathie sous-jacente, même chez les patients sans hypertension artérielle, est un deuxième facteur important, notamment d'accident vasculaire cérébral, hémorragique ou ischémique. Des antécédents thromboemboliques personnels, ainsi que le diabète, augmentent également le risque thrombotique. Si l'on considère le risque en fonction du type de FA, tout le monde s'accorde pour ne pas faire de distinction. Comme l'explique le Dr Leclerq, « aucune étude ni aucun registre ne permet de dire que la FA permanente est plus emboligène que la FA paroxystique ».
Les antivitamine K.
A ce jour, les antivitamine K (AVK) sont les seules molécules pour lesquelles on dispose de preuves indiscutables quant à leur efficacité. L'aspirine à la dose quotidienne de 250 à 300 mg a aussi montré un intérêt dans cette indication. Cependant, si la diminution du risque est significative, « une métaanalyse des études contrôlées montre qu'elle est deux fois moins importante que celle obtenue avec les AVK ». Sa place reste donc à définir. L'aspirine ne serait utile que chez les patients jeunes sans cardiopathie sous-jacente et non hypertendus, autrement dit à faible risque thromboembolique. Quant aux héparines de bas poids moléculaire (Hbpm), une étude récente a montré que leur efficacité est « non inférieure » à celle des AVK (1). Leur prescription peut donc être justifiée, mais l'absence d'AMM pour la prévention des complications thromboemboliques de la FA soulève un problème médicolégal.
Dans la prévention des récidives de FA paroxystique ou persistante, « les antiarythmiques ont une efficacité modérée, mais certaine », souligne le Dr Leclercq. Les médicaments à utiliser sont l'amiodarone ou l'une des trois molécules appartenant à la catégorie des antiarythmiques de classe Ic (acétate de flécaïnide, propafénone, cibenzoline). Les experts s'accordent pour dire que, même si lors du premier accès il y a eu une FA persistante ayant nécessité une cardioversion électrique, le patient doit être laissé sous antiarythmiques ; le point qui reste à définir dans ce domaine est la durée du traitement. Il n'y a pas non plus de recommandation consensuelle sur la durée d'administration des antiarythmiques en cas d'absence de récidive pendant cinq à six ans. Les variations interindividuelles sont telles qu'il est difficile de déterminer une conduite à tenir. Cela nécessiterait des registres avec des données sur une dizaine d'années. Or la durée des études actuellement disponibles est de un an. Au-delà, les facteurs de risque de rechute identifiés sont l'âge, la cardiopathie et la taille de l'oreillette gauche à l'échographie.
Enfin, les patients ayant un flutter auriculaire doivent bénéficier, en première intention, d'une ablation de l'isthme tricuspide. « Ce geste, extrêmement simple et ayant une morbidité très basse, est efficace quelles que soient les circonstances », explique le Dr Leclercq. « En revanche, les techniques instrumentales d'ablation de la FA dans l'oreillette gauche ne peuvent pas s'appliquer à tous les malades », les meilleurs candidats sont les sujets les plus jeunes (60-65 ans), qui présentent une FA focale. Le cathétérisme transeptal par voie auriculaire droite est une technique en développement. Bien que n'atteignant pas 100 %, « ses résultats sont très encourageants ».
D'après un entretien avec le Dr Jean-François Leclercq, clinique du Val-d'Or, Saint-Cloud.
(1) Stellbrink C et coll. Safety and Efficacy of Enoxaparin Compared With Unfractionated Heparin and Oral Anticoagulants for Prevention of Thromboembolic Complications in Cardioversion of Nonvalvular Atrial Fibrillation : the Anticoagulation in Cardioversion Using Enoxaparin (ACE) Trial. « Circulation » 2004 ; 109 (8) : 997-1003.
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