Maisons de santé pluriprofessionnelles

Quelle place pour les pneumologues ?

Publié le 31/03/2014
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Crédit photo : PHANIE

Les médecins spécialistes pourraient-ils utilement trouver leur place dans des maisons de santé pluridisciplinaires ? Les pneumologues, par exemple, auraient-ils leur place au sein de ces structures actuellement en plein développement sur le territoire ? « Cette question de la place du deuxième recours au sein des maisons de santé fait aujourd’hui l’objet d’un débat qui n’est pas tranché. Certains estiment que cette évolution pourrait être intéressante. D’autres, dont je fais partie, se montrent plus réservés, en considérant que cela risquerait de modifier le rôle de ces structures et les missions du premier recours maintenant bien définie dans la loi HPST », explique le Pr Claude Attali, responsable du département de médecine générale de la faculté de médecine de Créteil.

Ce professeur de médecine générale travaille aujourd’hui à temps partiel dans une maison de santé à Coulommiers. Il a fait partie des pionniers en France qui, très tôt, ont défendu l’intérêt de ces structures regroupant des soignants de premier recours : généralistes, infirmiers, sages-femmes, diététiciens, dentistes… « Il y a 20 ans, on nous disait que cela était complètement utopiste. Aujourd’hui, tout le monde, ministre en tête, ne jure que plus que par ces maisons de santé, qui seraient devenues la panacée sans toujours trop savoir ce qui s’y passe exactement », constate le Dr Attali.

Pour ce généraliste, l’arrivée de spécialistes au sein des maisons de santé présente un risque : celui de voir les soignants du premier recours ne pas assumer pleinement les missions que la société attend d’eux et orienter de manière un peu trop systématique leurs patients vers le deuxième recours, à la manière dont fonctionnent certains centres de santé qui proposent une offre très large avec de très nombreux spécialistes en leur sein entraînant un parcours de soins aberrant, le patient étant adressé de spécialistes à d’autres spécialistes le plus souvent d’organe, sans aucune vision globale du patient et sans coordination des soins. « Aujourd’hui, les soignants de premier recours ont la capacité et la compétence pour assurer la très grande majorité des besoins des patients qui se présentent en consultation, et la coordination des différents intervenants si besoin, ajoute-t-il. Il est bien évidemment fondamental de prévoir et d’organiser la seconde ligne. À Coulommiers, pour des raisons de démographie médicale mais aussi historiques, liées à des relations privilégiées avec l’hôpital, le deuxième recours est principalement hospitalier, sans toutefois exclure les spécialistes ambulatoires présents dans le bassin de vie », indique le Dr Attali, en ajoutant que l’absence de « spécialistes d’organe à l’intérieur de la maison permet un choix plus libre du parcours proposé, tant pour le médecin que pour le patient ».

Le Pr Attali ne ferme toutefois pas complètement la porte à une collaboration avec des spécialistes dans ces maisons de santé. « S’il ne semble pas souhaitable qu’ils viennent exercer de manière permanente dans ces structures pour les raisons évoquées plus haut, il pourrait être intéressant de faire des expérimentations sur la présence, à temps partiel, d’un praticien de deuxième recours, pour des problèmes spécifiques et pour des disciplines souvent questionnées. Une fois par semaine, un pneumologue pourrait par exemple assurer des consultations pour des patients sélectionnés », indique le Pr Attali. Une autre voie serait d’élaborer, avec les spécialistes qui le souhaitent et à partir d’objectifs de santé, la participation à des actions coordonnées de soins ou de prévention dans le cadre de pôle de santé (maison de santé hors des murs). « Il faudrait alors qu’ils acceptent de modifier les modes de fonctionnements actuels pour réfléchir ensemble sur de nouvelles pratiques », précise le Dr Attali.

C’est ainsi que, selon lui, le développement des nouveaux modes de rémunérations, dégagés du paiement à l’acte, peut ouvrir des perspectives intéressantes tant au plan de la santé individuelle que communautaire. « On pourrait réfléchir ensemble par exemple à mettre en place dans ces maisons de santé un dépistage de la BPCO en faisant souffler tous les fumeurs ou de l’éducation thérapeutique pour les patients atteints de maladies respiratoires chroniques etc. Mais, là encore, ces missions devraient être assurées en priorité par des soignants de première ligne, pas obligatoirement d’ailleurs par des médecins, ce qui n’empêche nullement une collaboration avec les spécialistes qui le souhaitent », souligne le Pr Attali.

D’après un entretien avec le Pr Claude Attali, responsable du département de médecine générale de la faculté de médecine de Créteil.

Antoine Dalat

Source : Bilan spécialistes