LES DERNIERES RECOMMANDATIONS sur l'évaluation du risque cardio-vasculaire stipulent qu'elle repose sur « la sommation de l'ensemble des facteurs de risque, chacun étant considéré comme binaire » (1). Les méthodes utilisables dans ce cadre sont le modèle de Framingham ou le modèle européen Score (Systematic Coronary Risk Evaluation). Les méthodes d'imagerie ne font l'objet que d'un petit paragraphe. Les experts y soulignent que, dans le futur, des algorithmes plus sophistiqués intégrant ces méthodes pourraient être inclus. Les marqueurs mentionnés sont l'épaisseur de l'intima-média carotidienne (EIM), l'hypertrophie ventriculaire gauche, la détection par IRM ou par scanner de plaques d'athérome sur les parois artérielles.
Leur intérêt a été prouvé par des études épidémiologiques menées sur de grandes cohortes. Il est moins clair à l'usage individuel. Il existe néanmoins des recommandations européennes et américaines selon lesquelles, dans la recherche d'une atteinte des organes cibles, l'EIM mesurée par échographie constitue un marqueur supplémentaire de risque. Dans les recommandations européennes sur la prise en charge de l'HTA, une épaisseur de la paroi artérielle supérieure à 0,9 mm est un élément qui renforce le degré de risque et les mesures thérapeutiques.
L'étude PARC.
On dispose de preuves indiscutables d'une relation significative entre l'EIM et tous les facteurs de risque cardio-vasculaire classiques. L'étude épidémiologique française PARC (Paroi Artérielle et Risque Cardio-vasculaire), réalisée sur près de 6 500 sujets dont 80,7 % avaient des facteurs de risque cardio-vasculaire (2), met en évidence une différence constante entre les groupes avec et sans facteurs de risque modifiables, et ce quels que soient l'âge et le sexe. Les résultats de ce travail (soumis à publication) montrent, en outre, que l'EIM augmente en fonction du nombre de facteurs de risque.
L'EIM est non seulement un facteur de RCV, mais aussi un marqueur prédictif d'événements cardio-vasculaires. Dans la Cardiovascular Health Study, le risque relatif d'infarctus du myocarde ou d'AVC pour les quintiles les plus élevés est près de cinq fois plus important que pour les quintiles les plus bas (3). Les auteurs de la SMART Study (Second Manifestations of ARTerial disease) ont observé une corrélation entre l'EIM et le risque cardio-vasculaire global calculé par la méthode de Framingham. L'étude PARC retrouve la même corrélation, avec un poids important de l'âge.
La plaque d'athérome.
Par ailleurs, l'étude EVA (European Vascular Aging) a mis en évidence une relation entre l'EIM, d'une part, et l'apparition de plaques d'athérome, d'autre part (4). Le Dr Serge Kownator insiste ici sur la nécessité de bien différencier l'EIM de la plaque, qui confère un risque plus important. La plaque d'athérome répond à une définition précise, à savoir un épaississement de la paroi artérielle qui, soit est de + 0,5 mm par rapport à l'EIM adjacente, soit dépasse de 50 % cette EIM, soit, enfin, est de plus de 1,5 cm en valeur absolue pour l'ensemble de la paroi (5). Devant une plaque carotidienne se pose aussi le problème du risque neurologique. Le degré de sténose (supérieur à 70 %) reste le facteur prédictif essentiel du risque de survenue d'un AVC. L'échostructure de la plaque est également un marqueur de risque.
Un autre paramètre peut être utilisé pour l'évaluation du risque cardio-vasculaire : les calcifications coronaires. Leur recherche s'effectue par scanner ultrarapide et, actuellement, surtout par scanner multibarettes, avec détermination d'un score de calcium en fonction du nombre, de la surface et de la densité sur l'image des plaques calcifiées. Au-delà d'un score de 400, le malade présente un risque important d'événement cardio-vasculaire, en particulier coronarien. Cette technique, dotée de bonnes spécificité et sensibilité, est largement utilisée aux Etats-Unis (compagnies d'assurance) et peu en France. Son coût élevé paraît être un frein pour une utilisation courante. La reproductibilité limitée de la technique rend illusoire une utilisation pour le suivi des lésions.
Enfin, l'index de pression systolique (IPS) est une mesure simple réalisée par Doppler continu et qui permet de détecter l'artériopathie des membres inférieurs, y compris chez des patients asymptomatiques. Un IPS inférieur à 0,90 a la même valeur que la claudication intermittente en termes de diagnostic et, même, d'évaluation du risque. Plus il est bas, plus le risque de survenue d'un événement à cinq ans est important (6, 7).
D'après un entretien avec le Dr Serge Kownator, Thionville.
(1) Méthodes d'évaluation du risque cardio-vasculaire global, Anaes, juin 2004.
(2) Touboul JP et coll. Design, Baseline Characteristics and Carotid Intima-Media Thickness Reproducibility in the PARC study. « Cerebrovasc Dis » 2005 ; 19 (1) : 57-63.
(3) O'Leary DH et coll. Carotid-Artery Intima and Media Thickness as a Risk Factor for Myocardial Infarction and Stroke in Older Adults. Cardiovascular Health Study Collaborative Research Group. « N Engl J Med » 1999 ; 340 : 14-22.
(4) Bonithon-Kopp C et coll. Relation of Intima-Media Thickness to Atherosclerotic Plaques in Carotid Arteries. The Vascular Aging (EVA) Study. « Arterioscler Thromb Vasc Biol » 1996 ; 16 : 310-316.
(5) Touboul PJ et coll. Mannheim Intima-Media Thickness Consensus. « Cerebrovasc Dis » 2004 ; 18 (4) : 346-349.
(6) Criqui MH et coll. Mortality over a Period of 10 years in Patients with Peripheral Arterial Disease. « N Engl J Med » 1992 ; 326 : 381-386.
(7) Leng GC et coll. Use of Ankle Brachial Pressure Index to Predict Cardiovascular Events and Death : a Cohort Study. « BMJ » 1996 ; 313 : 1440-1444.
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