JOSÉ PLIYA est un auteur de qualité, l’une des belles voix de la littérature dramatique de langue française. Né au Bénin, il est actuellement directeur de la scène nationale de Guadeloupe. C’est en s’inspirant des tragiques événements du Rwanda, du génocide, qu’il a composé « Une famille ordinaire », pièce pour cinq personnages sur trois générations.
L’action se situe à Hambourg en 1939. Il ne s’agit pas d’une pièce « de » guerre, mais d’une plongée dans une famille. C’est en envisageant de l’intérieur de cette cellule le monde extérieur, que José Pliya nous parle. Une comédienne, qui n’appartient pas à la distribution aujourd’hui, Lara Suyeux, s’est battue pour que cette production existe. Le spectacle est mis en scène par un artiste allemand d’une soixantaine d’années, Hans Peter Cloos. Il s’interroge lui-même, évidemment. On devine tout cela au fil d’une représentation, bien menée.
Dans un décor simple de Marion Thelma, des postes de radio des années 1930-1940. Une vidéo de Camille Pawlotsky anime les scènes (parfois un peu lourdement, inutilement). La jeune Bérangère Allaux est Véra, la plus jeune et celle qui lance le récit. On voit ses parents. Son père, Julius, qui part pour la guerre en 1939, joué par Matthias Bensa, très juste. Julius est le fils du couple qui domine le plateau : Oskar Abraham (Roland Bertin) et Elga, son épouse obsédée par la nourriture, jalouse de ses prérogatives de femme tenant sa maison. Christiane Cohendy lui donne sa profondeur, son intelligence des autres. Il y a aussi Dörra, jeune femme lucide, courageuse, que joue, très finement, Laura Wolf. Quelques scènes sont difficiles, ne le cachons pas, à cause des différences d’âge des interprètes. La scène entre Oskar et sa belle-fille, par exemple. Mais autrement, on suit le récit avec intérêt, même si le texte aurait pu être légèrement densifié.
L’émotion, ici, naît du jeu, conduit avec finesse. Les jeunes sont bien, mais ce sont Christiane Cohendy, on l’a dit, et Roland Bertin, magnifique d’humanité complexe, qui dominent. Cet acteur lumineux a eu 80 ans, hier, mardi 16 novembre. On l’a souvent admiré dans les films ou les spectacles de Patrice Chéreau ou encore à la Comédie-Française. Ici, il cristallise toutes les questions de la pièce. Dans ses relations avec les autres, son fils, sa femme, sa belle-fille. Mais c’est en lui-même, de sa voix si tendre, un peu douloureuse, de la sincérité de son engagement, de sa présence magnifique, que naît la plus grande émotion.
Théâtre de l’Est Parisien (tél. 01.43.64.80.80), à 20 h 30, 19 h 30, 15 heures selon les jours. Durée : 1 h 40. Jusqu’au 27 novembre. Puis le 1er décembre à l’Avant-scène de Colombes, les 7 et 8 janvier au Théâtre Tours ky de Marseille, du 18 au 21 janvier à la Comédie de Saint-Étienne. Les textes de José Pliya sont publiés dans la collection « les Quatre Vents » des éditions de L’Avant-scène.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature