27-29 juin 2006 - Paris
LA PEUR que suscite l’annonce du diagnostic, l’anxiété quant à l’évolution de la maladie sont à eux seuls suffisants pour altérer le désir sexuel et il paraît normal que la personne concernée se désintéresse de tout ce qui n’est pas la lutte contre la maladie.
Par ailleurs, les symptômes liés à la progression de la tumeur et les conséquences des différents traitements ont un impact significatif sur la sexualité.
Les traitements chirurgicaux sont pourvoyeurs de dysfonctionnements sexuels et/ou de modification de l’image corporelle : mastectomie, chirurgie pelvienne, gynécologique ou urologique. La fréquence de la disfonction érectile après prostatectomie (de 40 à 75 %) varie selon l’âge, la capacité érectile préalable et la préservation des bandelettes nerveuses (1).
La chimiothérapie et l’hormonothérapie ont des effets secondaires : les nausées et les vomissements, l’alopécie, l’asthénie et l’amaigrissement liés à la chimiothérapie entraînent une modification physique et diminuent le désir sexuel. Certaines chimiothérapies entraînent mucite, vaginite et sécheresse vaginale.
Par leur toxicité neurologique, les sels de platine et la vincristine peuvent altérer les circuits neurologiques impliqués dans la sexualité. Les alkylants sont, quant à eux, responsables de lésions gonadiques irréversibles allant jusqu’à la stérilité.
Les études menées chez des femmes jeunes ayant eu un cancer du sein mettent en évidence une augmentation significative des troubles sexuels, liés en grande partie à la sécheresse vaginale. Elles montrent également que la fertilité et le risque de ménopause précoce sont des sujets d’inquiétude majeurs (2).
Un travail portant sur 183 femmes traitées pour cancer du sein montre que, chez une femme de 40 ans, la chirurgie n’entraîne qu’un faible risque de ménopause. En revanche, certaines chimiothérapies peuvent réduire le fonctionnement des ovaires de façon transitoire ou définitive, l’âge au moment du diagnostic étant le principal facteur prédictif.
La bithérapie par agoniste de la GnRH et tamoxifène entraîne des bouffées de chaleur, une prise de poids, une sécheresse vaginale et une baisse du désir sexuel (3), en revanche, le tamoxifène seul n’a pas de répercussion négative sur la sexualité.
De même, chez les hommes atteints d’un cancer de la prostate, les agonistes de la GnRH provoquent une déprivation androgénique associée à un déclin significatif de la libido, indépendant des autres causes de dysfonction sexuelle (prostatectomie ou radiothérapie).
Les études menées chez l’homme après un cancer du testicule (4) confirment que le risque d’infertilité est la préoccupation majeure des patients et retentit sur le choix et l’acceptation des traitements.
Une étude rétrospective, menée de 1998 à 2001 chez 1 814 patients traités pour cancer du testicule, montre que chez les patients traités par orchidectomie seule, le taux de paternité était de 92 %, dans le groupe de patients traités par cisplatine à haute dose il était de 48 %, la moitié des patients ont pu avoir un enfant sans avoir à recourir à une procréation médicalement assistée.
Sous le coup du diagnostic, le retentissement du cancer et de ses traitement sur la vie sexuelle est un sujet difficile à aborder. Conscients de la peur que suscite l’annonce d’un cancer, les praticiens concentrent leur message sur le traitement. Cependant, les patients ont besoin d’informations, d’autant que l’approche thérapeutique des troubles de la sexualité, souvent d’origine iatrogène, est multiple.
Les traitements pharmacologiques peuvent être utilisés précocement du fait d’une organicité probable. Chez l’homme, après prise en compte de l’âge, des pathologies associées (diabète, hypertension artérielle, dyslipidémie…), les traitement proposés sont les inhibiteurs de phosphodiestérase et les injections intracaverneuses de prostaglandine qui, dans ce cas, ont une efficacité moindre que dans la population générale.
Chez la femme, la sécheresse vaginale, cause fréquente de dyspareunie, est un problème à prendre en charge rapidement. Une crème à base d’estrogène et/ou un lubrifiant facilitent les rapports sexuels. Les traitements mécaniques, tels les dilatateurs vaginaux après radiothérapie pelvienne, font l’objet d’indications précises.
Maintenir un vie sexuelle épanouie est de toute manière difficile, lorsque le corps est atteint, l’estime de soi ébranlée. Le recours aux sexologues et/ou aux psychologues est une possibilité.
Session « Les jeunes oncologues à Eurocancer » avec le concours de l’Aerio (Association d’enseignement et de recherche des internes en oncologie) et présidée par le Pr Jean-Philippe Spano (groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris).
(1) Matthew G et al. Sexual Dysfunction after Radical Prostatectomy : Prevalence, Treatment, Restricted Use of Treatments and Distress. « J Urol », 2005 ; 174 : 2105-21010.
(2) Duffy CM et al. Discussion Regarding Reproductive Health for Young Women with Breast Cancer Undergoing Chimiotherapy. « J Clin Onco », l 2005 ; 23 : 766-773.
(3) Berglund G, Nystedt M et al. Effect of Endocrine Treatment on Sexuality in Breast Cancer Patient : a Prospective Randomised study ; « J Clin Oncol », 200 ; 174 : 258-262.
(4) Huddart RA et al. Fertility, Gonadal and Sexual Fonction in Survivors of Testicular Cancer. « Br J Cancer », 2005 ; 93 : 200-207.
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