L’association entre la « fatigue » et le risque d’accident de la route est un phénomène connu depuis longtemps, sans que la distinction ait été faite entre la fatigue liée essentiellement au temps prolongé de conduite et le manque de sommeil. Les nombreux travaux réalisés depuis une vingtaine d’années ont toutefois permis de démontrer la relation très nette existant entre les accidents de la route et les troubles du sommeil ; il est ainsi clairement établi aujourd’hui que les sujets souffrant d’apnées obstructives du sommeil ont un risque accru d’accident de la circulation. Mais ce risque est également augmenté en dehors de tout contexte pathologique par le seul manque de sommeil. Une dette de sommeil est plus fréquemment trouvée dans certaines circonstances, notamment chez les sujets jeunes, en cas de conduite sur une longue distance ou lorsque le trajet en voiture est débuté en période nocturne. La pratique d’un électroencéphalogramme chez ces conducteurs à risque a confirmé l’altération très nette du niveau de vigilance comparativement à un groupe témoin. «Ces troubles de la vigilance au volant sont à l’origine d’une part importante des accidents de la route survenant la nuit, en particulier chez les jeunes conducteurs; il s’agit d’un problème auquel nous devons répondre par différentes mesures», insiste le Pr Philip. Deux approches simples, la prise de café et la sieste, ont été testées sur 12 jeunes volontaires, âgés en moyenne de 21,3 ans (1). Plusieurs paramètres ont été mesurés : degré de fatigue ressentie et sensation de sommeil rapportée par les sujets, nombre de franchissements inappropriés de la ligne blanche (enregistrements vidéo) et qualité du sommeil par un enregistrement polysomnographique.
Les volontaires ont conduit sur 200 km entre 18 heures et 19 h 30 (conduite de référence) et entre 2 heures et 3 h 30, après avoir consommé du café (200 mg d’équivalent caféine), du café décaféiné (15 mg d’équivalent caféine, groupe placebo) ou après avoir fait une sieste de 30 minutes.
Les jeunes hommes sont ensuite retournés au laboratoire du sommeil pour un enregistrement polysomnographique. La qualité de la conduite de nuit était similaire à celle de la conduite de jour chez 75 % des sujets ayant pris du café, chez 66 % de ceux ayant fait une sieste, contre seulement 13 % de ceux sous placebo.
Deux contre-mesures simples et efficaces.
La latence d’endormissement et la qualité du sommeil ultérieur ont été équivalentes dans les trois groupes.
«La consommation de café et la sieste sont donc deux contre-mesures simples et efficaces à la somnolence au volant, avec toutefois une grande variabilité interindividuelle dans la réponse à ces mesures: certains sujets répondent bien à la sieste, d’autres à la prise de café. En pratique, il faut donc se tester pour adopter la meilleure stratégie», explique le Dr Philip.
D’après un entretien avec le Pr Pierre Philip, clinique du sommeil, hôpital Pellegrin, Bordeaux.
(1) Philip P. et al., The effects of coffee and napping on nighttime highway driving : a randomized trial. « Ann. Intern. Med. » 2006, jun 6 ;144 (11) : 785-91.
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