?On aimerait que ce soit un poisson d’avril de mauvais goût... Selon l’Ordre, 2010 s’est soldée par un record des agressions de médecins. Insultes, vols, incivilités, coups, parfois attaques à main armée... Au total, 920 déclarations d’incidents, ont été recensées l’an passé. 80 % de plus qu’en 2009 ! Plus que n’importe quel discours, ces statistiques illustrent le quotidien de plus en plus difficile des blouses blanches dans ce qu’il est convenu d’appeler « les quartiers ». Plus possible de fermer les yeux : les tristes « faits divers » dont certains confrères ont été ces derniers mois les héros bien involontaires ne sont pas des affaires isolées, mais un reflet de la violence ordinaire qui pourrit la vie de certains soignants.
Deux constats interpellent en marge de cette enquête 2010. D’abord que les agresseurs n’hésitent plus à s’attaquer au soignant lui-même. 7 incidents sur 10 portent en effet atteinte à la personne physique du médecin. Et, une fois sur deux, l’agresseur est un patient. À l’évidence, les médecins ne sont donc plus préservés par leur fonction. Ce rapport 2011 est un signe, s’il en était besoin, de la désacralisation de cette profession. En même temps, du côté des médecins, on sent une réticence à saisir la justice comme le ferait n’importe qui. L’Ordre a beau être de plus en plus alerté par les praticiens, seule une minorité d’entre eux se résout ensuite à porter plainte.
Attitude pudique des médecins qui explique la difficulté à assurer leur sécurité. Bien sûr, pour les protéger on doit penser verrous, barreaux, caméras et ligne directe avec le commissariat. Dans ce numéro, nous donnons la parole à quelques confrères qui se sont résolus à en passer par là. Et en recevant vos syndicats, lundi, Xavier Bertrand devrait abonder dans cette direction. Cela suffira-t-il à résoudre le problème ? Pas entièrement. «?Police partout, justice nulle part », disait Victor Hugo dans une expression qui ensuite fit florès.?Sans reprendre ce refrain libertaire, on conviendra juste que trop de sécurité tuerait le colloque singulier. C’est donc avant tout par une action sur les conditions d’exercice que l’on attaquera le mal à la racine. Pour les pouvoirs publics, l’enjeu en vaut la chandelle. Car la sécurité des médecins est un problème de société, mais aussi de santé publique. Un défi qui touche de très près à l’autre visage de la désertification médicale.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature