LA GRÈVE des urgentistes hospitaliers orchestrée par l'Amuf (Association des médecins urgentistes de France) aura duré dix-sept jours. Elle s'est achevée hier, après que l'Amuf a signé avec Jean Castex, le patron au ministère de la Santé de la Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos), un « relevé de conclusions ».
Le mouvement est « suspendu » et pas définitivement arrêté. Car si les urgentistes ont obtenu gain de cause sur un certain nombre de points, ils ne sortent pas totalement satisfaits de leurs tractations avec le ministère : toutes les « garanties » ne sont pas au rendez-vous qui permettraient d' « améliorer la qualité des soins au niveau de la prise en charge des urgences dans notre pays », indique le syndicat qui regrette en particulier que les pouvoirs publics ne lui aient pas donné d'assurance en matière de « dialogue social » à l'échelon régional. « Il faut une représentativité sociale et syndicale dans les agences régionales de l'hospitalisation (ARH), explique le président de l'Amuf, le Dr Patrick Pelloux ; seuls le dialogue et la concertation sociale seront les garants que ce relevé de conclusions serve à quelque chose. »
En matière de financement, le ministère sort finalement de sa poche 15 millions d'euros supplémentaires, qui s'ajoutent aux 175 millions déjà budgétés pour 2005 dans le cadre du plan Urgences. Pour l'Amuf, cette rallonge - synonyme d' « acquis social important » bien qu'insuffisante - doit impérativement être distribuée « dans les structures d'urgences particulièrement sinistrées ».
Les urgentistes obtiennent par ailleurs d'être associés, via leurs organisations syndicales, à la concertation et aux réflexions engagées sur la question de la prise en charge des personnes âgées à l'hôpital. Sur ce dossier, alors que l'Amuf qui redoute l'été prochain une fermeture massive de lits dans les hôpitaux, a crié haut et fort qu'il était « hors de question que les urgentistes assument toutes les carences du système », la Dhos promet d'être vigilante. Elle demandera en particulier aux ARH de garantir aux personnes âgées pendant l'été des conditions de prise en charge de qualité, en lien avec les établissements médico-sociaux et les professionnels de santé libéraux.
Enfin, « grande victoire » pour l'Amuf, le gouvernement annonce sa volonté de rester ferme, face au projet de directive européenne modifiant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, sur le mode de calcul du temps de travail des urgentistes en particulier et de tous les médecins hospitaliers en général. « La reconnaissance de l'ensemble de notre temps de travail, gardes comprises, repos de sécurité compris... ne sera pas modifiée », se félicite Patrick Pelloux. Les urgentistes qui craignaient que soit introduit dans leur temps de garde un distinguo entre les gardes « actives » (c'est-à-dire les moments où ils voient effectivement des patients) et gardes « passives » (correspondant aux temps de repos) sont rassurés : « L'éventualité d'un assouplissement de la directive sur ce point n'infléchira pas la politique française en la matière », affirme le ministère.
Une nouvelle version des décrets urgence
En sommeil depuis deux ans, les décrets fixant de nouvelles règles techniques de fonctionnement pour les services d'urgences, les Samu et les Smur, sortent des placards du ministère de la Santé. A la faveur de la grève des urgentistes, une nouvelle version de ces textes, qui organisent les urgences hospitalières sur le modèle de ce qui a été fait en 1998 pour la périnatalité, a été remise aux syndicats.
Ces projets de décrets modifient le code de la santé publique. Ils répondent à de multiples questions basiques telles que : qui peut diriger un service d'urgence ? Quelle équipe médicale pour faire tourner un service ? Quelles spécificités pour les services accueillant des urgences pédiatriques ? Quels locaux pour l'urgence ? Quels accès à quels types de soins doit impérativement assurer un service d'urgences... ? L'architecture qu'ils inventent, axée sur des minima comme cela a été fait pour les maternités (et que les syndicats jugent, précisément, trop « minimaliste »), devrait permettre d'harmoniser l'offre de soins urgents qui, pour l'heure, reste très hétéroclite d'un hôpital à un autre, d'une région à une autre.
Au seul chapitre des services d'urgences, il est en effet prévu que l'effectif soit « adapté » au nombre de cas traités ; l'équipe médicale doit, elle, « être suffisante pour qu'au moins un médecin soit effectivement présent en permanence ». Le chef de service doit « justifier d'une expérience professionnelle équivalente à au moins trois ans » en médecine d'urgence et être titulaire du diplôme d'études spécialisées complémentaires en médecine d'urgence ou praticien hospitalier de médecine polyvalente d'urgence. Les locaux et les équipements des services d'urgences, aménagés pour les patients handicapés et pour les personnes détenues et gardées à vue, doivent comporter au moins un espace d'accueil préservant la confidentialité, un espace d'examens et de soins, une salle d'accueil des urgences vitales, une unité d'hospitalisation de courte durée d'au moins deux lits.
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