INTELLECTUEL engagé, philosophe, romancier, dramaturge, militant : la personnalité de Jean-Paul Sartre, qui se confond avec la seconde moitié du XXe siècle, s'exprima tout à la fois dans les domaines de la pensée, de la création et du combat politique. C'est ce qui fait son originalité. Sartre fut davantage qu'un « spectateur engagé », il fut un acteur de l'Histoire. L'exposition de la BNF obéit à un souci d'exhaustivité pour restituer la richesse de cette œuvre et de cette vie.
Quatre cents pièces sont réunies ici, qui proviennent pour la plupart des collections de la BNF : des manuscrits, des correspondances inédites, des éditions originales, des journaux, des lettres, des carnets, des affiches. Elles tissent le fil des différentes étapes de la vie de Sartre, depuis l'enfance solitaire jusqu'à la publication de la monumentale biographie de Flaubert, « l'Idiot de la famille », en passant par les années Saint-Germain-des-Prés, l'engagement contre le colonialisme pendant la guerre d'Algérie, la rencontre avec Mao, mai 68, etc.
Le roman d'une vie.
L'exposition, déclinée en quatre parties, illustre tout naturellement les épisodes essentiels de la vie de l'écrivain. Elle s'appuie largement, pour ce qui est de la formation de sa personnalité, sur « les Mots », ce « roman d'une âme », à la fois autobiographique et légendaire. Elle raconte les « quatre années heureuses » de Sartre à l'Ecole normale supérieure, aux côtés de Paul Nizan et de Raymond Aron. Elle évoque évidemment la rencontre avec Simone de Beauvoir, la publication de « la Nausée » (1938), œuvre fondatrice de l'écrivain avec « l'Etre et le Néant ». Elle traverse la Seconde Guerre mondiale, la brève captivité en Allemagne et les débuts théâtraux sous l'Occupation.
La période 1945-1951, où les zazous et l'existentialisme triomphent à Saint-Germain, marque l'engagement de Sartre dans la politique. L'écrivain se fait journaliste (« Combat », « le Figaro »...). Il développe dans sa revue « les Temps modernes » sa conception de l'homme responsable. Avec le RDR (Rassemblement démocratique révolutionnaire), il s'aventure dans une « troisième voie » socialiste. C'est l'époque des voyages : Etats-Unis, Cuba, où il rencontre Fidel Castro, Egypte et Israël, où il se fait ambassadeur de la paix (en 1967)...
Les documents exposés évoquent les points forts de ce parcours politique et d'un engagement qui se montrera de plus en plus radical au fil des années : ambivalences et revirements face au Parti communiste, jusqu'à la rupture de 1956, engagement pour les mouvements anticolonialistes, refus du prix Nobel en 1964, engouement pour la révolution culturelle chinoise, surenchères post-soixante-huitardes, etc.
On regardera avec intérêt les séquences audiovisuelles consacrées à Sartre. On s'arrêtera également devant les kiosques exposant ses créations théâtrales, devant les œuvres des peintres qu'il a côtoyés (Giacometti, Wols), qui l'ont inspiré (Tintoret), et devant les images des photographes qu'il a connus (Brassaï, Cartier-Bresson).
Une exposition éclectique et abondante, plus riche d'enseignements sur la vie de Sartre que sur sa pensée.
« Sartre ». Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand, quai François-Mauriac, Paris 13e. Tlj sauf lundi de 10 h à 19 h (dimanche de 12 h à 19 h). Entrée 5 euros (TR : 4 euros). Tél.01.53.79.59.59. Jusqu'au 21 août.
Catalogue : collection BNF/Gallimard, 272 pages, 48 euros.
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