La douleur chronique, qu'elle soit d'origine neuropathique, inflammatoire ou dysfonctionnelle est fréquente : sa prévalence est estimée entre 15 et 30 % dans la population générale. Et, chez les patients qui en souffrent, anxiété, dépression ou troubles du sommeil sont deux fois plus fréquents que chez les sujets indemnes. « Le douloureux chronique est un patient particulier, rappelle la Pr Valéria Martinez (hôpital Raymond Poincaré, Garches). La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle et dans le cadre de la chronicité elle n'est plus un signe d'alerte mais une maladie en elle-même ».
La douleur chronique doit être dépistée de façon systématique lors de la consultation d'anesthésie, au même titre que l'insuffisance cardiaque ou rénale, car elle modifie la physiopathologie du système nerveux et entraîne une augmentation de la sensibilité à la douleur. « Le risque est double, celui d'une douleur accrue à la phase aiguë mais aussi, à plus long terme, celui d'une chronicisation qu'il faut anticiper », rapporte la Pr Martinez. L'interrogatoire doit donc rechercher la présence d'une douleur chronique, l'utilisation d'opioïdes, qui concerne de plus en plus de patients, et des critères de vulnérabilité psychologique (anxiété, dépression, catastrophisme, arrêt de travail prolongé…).
Certains paramètres permettent de prédire le risque de douleur chronique postopératoire : la présence, avant l'intervention, d'une douleur sur le site de la chirurgie ou sur un autre site, les comorbidités, la douleur aiguë postopératoire et le surmenage. Pour ces patients, un suivi ciblé s'impose : poursuite et adaptation des traitements en cours, traitement plus prolongé ou plus agressif en postopératoire et organisation d'un suivi postopératoire.
Analgésie locorégionale
La gestion des opioïdes est essentielle et il est recommandé chez les patients en recevant habituellement, d'administrer en pré-opératoire la dose usuelle de morphinique ou la dose équi-analgésique d'un autre opioïde. « Il faut favoriser au maximum l'analgésie locorégionale, qui permet une épargne morphinique, qui accélère la mobilisation et qui prévient l'hyperalgésie induite par les opioïdes », souligne la Pr Martinez. Chez ces patients vulnérables, il ne faut pas hésiter à utiliser largement la kétamine à faible dose pour son effet anti-hyperalgésique.
« La prise en charge de ces patients ouvre le pan de la médecine transitionnelle, qui assure le suivi tout au long du parcours de soins, du pré-opératoire au postopératoire », ajoute la Pr Martinez.
D'après un entretien avec la Pr Valéria Martinez, hôpital Raymond Poincaré (Garches)
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