LE SYNDROME d'avance de phase du sommeil est une maladie familiale rare (en anglais : Fasps pour « Familial Advanced Sleep Phase Syndrome »), se traduisant, sur le plan phénotypique, par un raccourcissement de la périodicité circadienne, avec des troubles du sommeil, caractérisés par un sommeil décalé par rapport à la nuit : l'endormissement est précoce et le réveil a lieu tôt le matin. C'est la première variation du rythme circadien à transmission mendélienne a avoir été caractérisée génétiquement. On a montré que ce syndrome résulte d'une mutation sur un gène codant pour le PER2 à l'intérieur d'un domaine caséine kinase et qui a pour résultat une réduction de la phosphorylation.
« Pour mieux comprendre les mécanismes de la régulation circadienne humaine, nous avons recherché des mutations conduisant à des Fasps », expliquent Ying Xu et coll., de San Francisco.
Ils rapportent l'identification d'une mutation du gène CKlð qui est la cause d'un Fasps. In vitro, cette mutation produit une réduction de l'activité kinase.
A la base de la nouvelle étude, l'identification d'un sujet présentant un Fasps (dit sujet proposant ; indicateur génétique). Dans sa famille, quinze membres de plusieurs générations ont été interrogés. L'anomalie a été identifiée chez cinq d'entre eux (âgés de 20 à 65 ans). L'évaluation de cette famille a révélé une transmission autosomale dominante du phénotype. En l'absence d'une nécessité psychosociale, l'heure d'endormissement se situe aux alentours de 18 heures et le réveil vers 4 heures du matin (contre respectivement environ 23 heures et 8 heures pour le reste de la famille).
Les individus ont rapporté avoir éprouvé le début de leurs troubles entre la petite enfance et l'adolescence.
Une dépression caractérisée.
A côté de cela, trois de ces personnes ont présenté une dépression caractérisée (cotation à l'échelle Beck Depression Inventory). Toutefois, on observe que le réveil précoce, qui fait partie du trouble dépressif, se manifeste différemment de celui appartenant au Fasps. Dans la dépression classique, le réveil précoce se produit à un âge plus tardif que dans le Fasps. En outre, les individus affectés par le Fasps n'ont pas de difficultés d'endormissement ou de maintien du sommeil, contrairement aux dépressifs.
La phosphorylation joue un rôle central dans la régulation des horloges circadiennes. Des protéines circadiennes sont en jeu. De nombreux points de régulation ont été proposés (importation et exportation de protéines circadiennes dans le noyau cellulaire et/ou inactivation de ces protéines) ; et l'on sait que la phosphorylation affecte la stabilité et la translocation nucléaire de ces protéines.
Des drosophiles et des souris ont été transfectées par le gène muté CKlð. Le phénotype s'exprime de manière inverse dans les deux cas : la drosophile transgénique a un allongement de la période circadienne, tandis que la souris manifeste les mêmes caractéristiques que les humains, à savoir un raccourcissement.
Un élément central de l'horloge circadienne des mammifères.
« Ces résultats montrent que CKlð est un élément central de l'horloge circadienne des mammifères. Ils suggèrent que les horloges des insectes et des mammifères doivent avoir des mécanismes régulateurs différents, malgré la nature hautement conservée des composants individuels. » Le gène CKlð est, en effet, conservé des mammifères jusqu'aux drosophiles. La même mutation peut toutefois produire des cascades d'effets en aval différents selon les espèces.
Ces deux modèles sont considérés par les auteurs comme « une opportunité unique de disséquer plus avant le mécanisme moléculaire des horloges circadiennes et de réaliser une caractérisation extensive de gènes gérant les fonctions d'horloge ». Avec l'idée que mieux les connaître pourrait permettre de trouver des traitements aux troubles du sommeil.
« Nature », vol. 434, 31 mars 2005, pp. 640-644.
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