De notre correspondante
à New York
« SI ces résultats sont confirmés dans les futurs essais contrôlés, ce traitement serait bien plus efficace que les traitements actuels pour la maladie d'Alzheimer », souligne le Pr Mark Tuszynski, professeur de neurosciences et neurologue à l'université de San Diego, en Californie, qui a dirigé l'essai. « Ce serait aussi le premier traitement pour une maladie neurologique humaine qui agirait en prévenant la mort cellulaire. »
Dans la maladie d'Alzheimer, la perte inexorable des synapses et des neurones, notamment de type cholinergique, provoque un déclin cognitif.
Une approche potentiellement bénéfique pourrait reposer sur le facteur de croissance nerveux (NGF). Il stimule la fonction cholinergique, améliore la mémoire et prévient la dégénérescence cholinergique dans des modèles animaux.
Sa délivrance dans le cerveau est cependant problématique. Il ne traverse pas la barrière hémato-encéphalique et son injection dans le système ventriculaire cérébral cause des effets secondaires intolérables en raison de sa trop large distribution.
Une solution peut être offerte par la thérapie génique, soit ex vivo (modification des cellules in vitro) soit in vivo (modification des cellules cérébrales), qui permet de délivrer directement dans la région ciblée le facteur de croissance (qui diffuse jusqu'à 2 à 5 mm alentour).
Des études précliniques chez les primates ont montré la sécurité de la thérapie génique ex vivo par le NGF, ainsi que son efficacité pour prévenir la mort neuronale cholinergique et stimuler la fonction cellulaire.
Evaluer la sécurité et la toxicité.
Sur la base de ces résultats, Tuszynski et coll. ont réalisé un essai de phase 1 chez huit patients souffrant d'une maladie d'Alzheimer débutante. Les résultats prometteurs de cet essai, visant à évaluer la sécurité et la toxicité de cette approche, sont publiés dans la revue « Nature Medicine ».
Dans un premier temps, des fibroblastes des patients, obtenus par biopsie cutanée, ont été génétiquement modifiés en culture avec un vecteur rétroviral, de sorte qu'ils produisent et sécrètent le NGF.
Les patients ont ensuite subi une intervention chirurgicale au cours de laquelle leurs propres fibroblastes modifiés ont été injectés dans le noyau basal de Meynert (dans chaque hémisphère), localisé par IRM stéréotaxique.
L'intervention chez les deux premiers patients était pratiquée sous simple sédation, et un mouvement brusque des patients pendant l'injection a provoqué une hémorragie sous-corticale. Un de ces patients est décédé cinq semaines plus tard.
Par conséquent, toutes les interventions ultérieures (n = 6) ont été pratiquées sous anesthésie générale, sans complication.
Après un suivi moyen de près de deux ans chez ces six patients, aucun effet secondaire néfaste n'a été observé.
Déclin cognitif réduit de 50 %.
L'évaluation cognitive, par mini mental test et le sous-composant de l'échelle cognitive de la maladie d'Alzheimer, suggère que le taux annuel moyen de déclin cognitif, après la thérapie génique, est réduit de 50 % par rapport au taux de déclin antérieur.
Les tomographies par émission de positons, effectuées chez quatre patients, montrent après traitement une augmentation significative de l'absorption corticale du glucose (18-fluorodesoxyglucose), signe d'une activité métabolique accrue du cortex.
« Le NGF a été délivré dans notre étude dans le noyau basal cholinergique, une région sous-corticale de taille modeste, mais avec des projections étendues à travers le cortex, expliquent les chercheurs. Cette large projection cholinergique facilite la plasticité corticale et maintient l'activation neuronale. »
Si ce ralentissement du déclin cognitif observé dans l'étude est confirmé dans les futures études contrôlées, ce traitement représenterait une « importante avancée par rapport aux traitements actuels de la maladie d'Alzheimer, estiment les chercheurs. En outre, le NGF pourrait agir en synergie avec les approches anti-amyloïdogéniques ».
Ces résultats reflètent les récents résultats obtenus après l'administration d'un facteur de croissance dopaminergique (Gdnf) dans la maladie de Parkinson.
Sur la base des résultats positifs de cet essai de phase 1, un essai de phase 1 et 2 de thérapie génique in vivo par le NGF a été entrepris a l'université médicale Rush de Chicago. Il est dirigé par les Drs David Bennett et Zoe Arvanitakis.
« Nature Medicine », 24 avril 2005.
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