IL N'EXISTE PAS, à l'heure actuelle, de traitement curatif des maladies inflammatoires chroniques intestinales (Mici). Pour améliorer la prise en charge, on travaille sur de nombreuses hypothèses. Pour le Dr Pierre Desreumaux (Inserm, Lille), « la piste privilégiée passe par une meilleure connaissance des interactions entre le système immunitaire intestinal et la flore intestinale ». Certaines recherches montrent que la flore joue un rôle déterminant dans l'entretien et très probablement aussi dans l'induction des lésions de la paroi digestive.
Le rôle de PPARgamma.
L'équipe du chercheur avait montré en 2001 qu'une bactérie induit une inflammation muqueuse intestinale via la régulation d'un récepteur exprimé au niveau des cellules épithéliales, PPARgamma, que les chercheurs ont isolé (en collaboration avec une équipe américaine et la compagnie italienne Giuliani).
Les chercheurs ont ensuite cherché à savoir si PPARgamma était inclus dans la mode d'action des 5-aminosalicylés (5-ASA), les anti-inflammatoires spécifiques prescrits chez plus de 85 % des patients atteints de Mici. La suite des travaux a montré que oui. Après administration orale, le 5-ASA se lie au PPARgamma dans le cytoplasme de la cellule épithéliale, le tout migrant ensuite dans le noyau, où des coactivateurs nécessaires à l'activité du médicament font induire par l'ADN l'expression de gènes anti-inflammatoires.
Etudes in vitro et in vivo.
L'identification de ce mécanisme d'action a permis de développer une dizaine de dérivés des 5-ASA ayant une affinité renforcée pour le récepteur PPARgamma (salicylés de deuxième génération). Leurs fonctions anti-inflammatoires seront testées in vitro sur des cellules épithéliales intestinales humaines et in vivo sur des modèles murins de Mici. « Une dizaine de nouvelles molécules seront disponibles d'ici à la fin de 2005 pour des essais cliniques », annonce Pierre Desreumaux. Etant donné qu'elles sont issues de traitements déjà existants, on peut espérer un délai de mise sur le marché d'environ cinq ans. D'autre part, le dosage de PPARgamma dans le côlon des malades atteints de Mici pourrait être utilisé comme un marqueur pour sélectionner les répondeurs au traitement, postule le chercheur.
La maladie de Crohn (MC) et la rectocolite hémorragique (RCH) sont deux Mici partageant de nombreux traits épidémiologiques, physiopathologiques, cliniques et thérapeutiques, explique P. Desruemaux. Elles débutent en règle générale vers l'âge de vingt ans, évoluent par poussées entrecoupées de rémissions plus ou moins complètes et prolongées. Elles se caractérisent pas des douleurs abdominales, de la diarrhée et une altération de l'état général, avec fatigue intense et perte de poids. Le diagnostic repose sur la clinique, l'imagerie et la biopsie du tube digestif, après élimination des diagnostics différentiels étant donné la présentation peu spécifique.
Pays industrialisés.
La principale différence se situe au niveau de la localisation des lésions : la RCH est limitée au côlon, tandis que la MC peut atteindre l'ensemble du tube digestif. Trente-cinq pour cent des malades présentent une forme grave, avec des poussées régulières très invalidantes.
La cartographie mondiale de la prévalence des Mici montre qu'elles touchent les pays industrialisés. La progression s'est stabilisée en Europe et est en augmentation en Asie, au Japon et en Afrique du Sud. On compte en France environ 120 000 cas de MC et 80 000 de RCH, avec une prévalence particulière dans la région Nord - Pas-de-Calais.
On a recherché plusieurs facteurs environnementaux - pollution, alimentation, stress... - sans parvenir à en déterminer aucun. Sauf le tabac, qui favorise la MC et protège contre la RCH. Un gène de susceptibilité a été identifié en 2001, le CARD15/NOD2, et une trentaine de mutations décelées (50 % des malades présentent une ou deux mutations). Le dépistage génétique ne permet toutefois pas d'améliorer la prise en charge (pas de possibilité de prévention).
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