Je ne résiste pas au besoin de relater ici quelques phrases prononcées dans l’Hémicycle le 24 novembre 2022, jour considéré par certains comme historique. Les députés en effet, devaient décider sur l’interdiction de la corrida et dans la même journée – ce n’est pas une fake news — sur la constitutionnalisation de l’avortement. Aucun lien en apparence.
Cependant, à entendre les discours des députés, on est frappé par l’emploi de certains mots, notamment chez M. Aymeric Caron qui, avec un talent indéniable et un aplomb impressionnant fait référence à la conscience et au respect du vivant : « Chers collègues, La question que j’ai l’honneur de vous soumettre interroge le plus profond de nos consciences. Les sévices contre les xxxxxxx sont inacceptables nulle part dans notre République, une et indivisible. Ils ne sont acceptables, nulle part dans un pays qui se veut phare en matière de droits humains et de respect du vivant. Certains prétendent que le xxxxxx ne souffre pas. Pendant les vingt minutes que dure son calvaire, le xxxxx subit des coups de pique… Cette pique blesse. »
On l’a compris, les xxxxxx font référence aux animaux, aux taureaux et non pas aux fœtus comme on aurait pu le penser. Dominique Faure, secrétaire d’État chargée de la ruralité, quant à elle, en rajoute, nous apprenant qu’en matière de protection animale, le gouvernement a beaucoup fait : « Par un décret du 6 février 2022, le gouvernement s’est engagé à mettre un terme au broyage des poussins mâles dans la filière des poules pondeuses. » Ouf ! Nous sommes rassurés. Nos dirigeants ont conscience que le vivant doit être respecté.
Mais, fait paradoxal, ce même 24 novembre 2022 nos représentants votent pour adopter la proposition de constitutionnaliser le droit à l’avortement en première lecture par 337 voix pour, 32 contre et 18 absentions. Les fœtus humains de 14 semaines n’auront donc pas la même chance que les poussins d’un jour.
Eh oui ! Le 24 novembre 2022 est donc un grand jour pour les féministes et les progressistes. Demain l’avortement deviendra un droit inaliénable. Nous pourrons, nous médecins, aspirer, tordre, broyer, sectionner et tuer des fœtus humains jusqu’à 14 semaines. Ce sera constitutionnel. Cependant, comme disait Monsieur Aymeric Caron à propos de la corrida : « la question que j’ai l’honneur de vous soumettre interroge le plus profond de nos consciences. »
Qui peut nier en effet que l’avortement est un acte douloureux pour la femme, le fœtus (être sensible), le médecin et la société tout entière ? Personne ne souhaite un avortement pour sa sœur, sa femme ou sa fille. En toutes circonstances, l’avortement est un échec, une souffrance, une mort infligée à un fœtus humain. En faire un droit constitutionnel équivaut à élever l’échec et la souffrance comme un droit inaliénable. C’est non seulement maladroit mais c’est intellectuellement dévoyé.
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