L’éjaculation prématurée est l'un des troubles sexuels les plus fréquents : dans une vaste étude menée dans 29 pays, 12 à 30 % des hommes interrogés ont mentionné ce problème (1). Mais très peu (~ 9 %) osent en parler (2). Et contrairement à une idée reçue, l'éjaculation prématurée concerne toutes les tranches d'âges (3). « L'amélioration de l'éjaculation prématurée avec l'âge est loin d'être une évidence, souligne le Pr Droupy. Mais certains hommes gardent une érection même après avoir éjaculé, ce qui leur permet de poursuivre le rapport sexuel, et ils ne se plaignent de leur trouble éjaculatoire que lorsque la qualité de l'érection diminue avec l'avancée en âge. »
La Société internationale de médecine sexuelle définit l’éjaculation prématurée selon trois critères qui doivent tous être présents : délai pour éjaculer ≤ à une minute toujours ou presque toujours ; incapacité à retarder l’éjaculation lors de toutes ou presque toutes les pénétrations vaginales ; expression d’une souffrance ou d’une gêne en rapport avec ce symptôme.
PAS DE BILAN SYSTÉMATIQUE
› L'interrogatoire et l'examen clinique permettent de préciser le caractère primaire ou secondaire du trouble éjaculatoire et sa réalité ; la présence éventuelle d'un autre trouble sexuel, dysfonction érectile principalement ; l'association avec d'autres signes cliniques ; le changement de partenaire; le fonctionnement du couple et le retentissement du trouble sur la relation.
› Certaines causes organiques d'éjaculation prématurée secondaire doivent être éliminées. Dans ce cas, le trouble est rarement isolé et s'associe à d'autres symptômes. On recherche notamment, outre l'existence d'un autre trouble sexuel, la présence de symptômes du bas appareil urinaire liés à une prostatite chronique ou plus généralement à un syndrome douloureux pelvien chronique. L'hyperthyroïdie est aussi une cause d'éjaculation prématurée, de même que l'anxiété et la dépression.
› C'est seulement en cas de signes cliniques d'orientation qu'il est justifié de recourir à un bilan complémentaire : TSH, ECBU... Mais le plus souvent, aucun examen n'est nécessaire. Aucun bilan systématique n'est donc recommandé en cas d'éjaculation prématurée isolée, et en particulier, aucun dosage hormonal.
DEUX TYPES D'APPROCHES
› Si une cause secondaire est identifiée, il convient de la traiter, mais le plus souvent, il s'agit d'une éjaculation prématurée isolée. La conduite à tenir est différente selon qu'il s'agit d'un homme qui consulte seul ou d'un couple.
› En présence d'un couple motivé, on peut proposer une prise en charge psycho-sexologique, de type thérapie comportementale, basée pour l'homme sur la réalisation d'exercices. Le but est d'éliminer le stress lié à l'éjaculation prématurée et la peur de la répétition de l'échec. « Le principe pour le patient est d'apprendre à se familiariser avec son propre fonctionnement et notamment à reconnaître le point de non-retour, moment où l'éjaculation va se produire. Puis à essayer de bloquer, au moyen de différentes techniques ( voir encadré 1), la stimulation sexuelle et le réflexe d'éjaculation avant que ce seuil soit atteint. Les exercices sont d'abord réalisés par l'homme seul, au cours de séances de masturbation, puis avec sa partenaire. Durant les trois premiers mois, il est demandé au couple d'avoir des rapports sexuels sans pénétration, avant de reprendre une activité sexuelle avec des rapports complets. Il s'agit donc véritablement pour l'homme de "désapprendre" un comportement sexuel et de s'en approprier un autre plus adapté. »
Une prise en charge purement psychologique peut être envisagée si nécessaire.
› Le traitement pharmacologique de l'éjaculation prématurée repose dans notre pays sur l'utilisation d'un inhibiteur de la recapture de la sérotonine (IRS), la dapoxétine. C'est ce que recommande d'ailleurs la Société internationale de médecine sexuelle (2). En effet, la sérotonine retarde la réponse sexuelle, et l'on sait également que la prise au long cours d'antidépresseurs de type IRS a un rôle retardateur sur l'éjaculation (4).
« Par rapport aux techniques psycho-sexologiques, dont les patients se lassent parfois, la dapoxétine a l'avantage d'être rapidement efficace. Malgré les précautions d'emploi , essentiellement liées au risque de syncopes et d'hypotension orthostatique, elle peut être utilisée en première intention, en particulier en cas d'éjaculation prématurée primaire et/ou sévère, ou bien chez les hommes jeunes ayant des rapports sexuels occasionnels, peu enclins à suivre un programme d'exercices sexologiques. Elle multiplie par 3 le délai de l'éjaculation. Cependant, la prise en charge ne doit pas se limiter au seul traitement pharmacologique, et l'association avec une thérapie comportementale augmente sans doute la probabilité d'amélioration à long terme. »
La dapoxétine s'utilise à la demande, 1 à 3 heures avant l'activité sexuelle. Ses indications se limitent aux seuls cas d'éjaculation prématurée authentifiée par la présence de tous les critères, après vérification de l'absence d'hypotension orthostatique.
› Les anesthésiques topiques et les antidépresseurs sérotoninergiques en utilisation quotidienne n'ont pas l'AMM en France dans cette indication.
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