Maryse, 71 ans, a été traitée il y a 6 ans d’un carcinome du pharynx par radiothérapie. Hypertendue, elle reçoit des bronchodilatateurs pour une BPCO. Depuis près d'un mois, elle tousse, et compte tenu de ses antécédents, une radiographie pulmonaire a été effectuée, montrant une opacité au niveau du lobe moyen droit. La TDM thoracique révèle la présence d’un foyer condensant, une image évocatrice d’une surinfection pulmonaire (cf. cliché, flèche jaune). La fibroscopie objective du pus au niveau de la zone suspecte. Un traitement de 10 jours par amoxicilline est alors prescrit. Trois semaines plus tard, les symptômes persistent et les images radiographiques sont superposables aux premières. L’examen bactériologique du pus prélevé à la fibroscopie est négatif. Une nouvelle antibiothérapie par amoxicilline et acide clavulanique (3 g/j) est instaurée pour 10 jours. Un bilan biologique est effectué faute d’amélioration clinique en fin de traitement (NFS, CRP, sérologies des éleveurs d’oiseaux, mycoplasme et légionellose). Il se révèle normal, excepté pour la sérologie des mycoplasmes avec une positivité en IgG à 398 (N inf. à 320 UA/ml), et surtout IgM à 1952 (N inf. à 950 UA/ml).
LA CLINIQUE
► La contamination est interhumaine (50 % des pneumonies au sein des collectivités d’adultes jeunes, et 20 % des pneumopathies hospitalières).
Après un délai d’incubation qui varie de 1 à 3 semaines, le patient présente une altération de l’état général avec céphalées, hyperthermie, myalgies et arthralgies.
► Un des signes cardinaux est la toux – sèche au départ –, présente dans près de 93 % des cas. Une rhinite et une dermatose (éruption maculo-papuleuse, voire ectodermose érosive pluri-orificielle) sont parfois associées.
► Si des complications neurologiques (méningo-encéphalite, ataxie cérébelleuse, syndrome de Guillain-Barré) et rhumatologiques (épanchements articulaires) peuvent se rencontrer, elles restent rares.
► Il est en revanche fréquent de rencontrer des tableaux peu évocateurs, avec une rhinite isolée ou une toux persistance. C’est pour cette raison que les pneumologues américains surnomment cette affection walking pneumonia. En effet, il est souvent possible au sujet de déambuler : la pathologie étant bénigne et ne nécessite pas d’hospitalisation.
LES EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
► La biologie objective une hyperleucocytose (plus de 15 000 globules blancs/mm3) de manière inconstante.
Une anémie hémolytique est parfois décelée. La recherche d’agglutines froides se révèle positive chez près de 50 % des patients.
À côté de ces examens, le sérodiagnostic (technique ELISA) reste la méthode la plus pratiquée.
Les IgM sont positifs dès le 7e jour de l’infection.
La recherche du mycoplasme dans les prélèvements (expectorations, aspiration bronchique, liquide pleural...) est difficile car l’examen direct est souvent négatif (les bactéries étant trop petites).
Cela permet d’expliquer la négativité de l’examen bactériologique réalisé sur aspiration bronchique chez Maryse.
La culture doit être effectuée par des laboratoires spécialisés (culture sur milieu acellulaire, peu sensible et longue).
Le diagnostic moléculaire (PCR) est également possible dès lors que les autres techniques se révèlent inefficaces, et que le diagnostic est probable.
► La radiographie pulmonaire objective le plus souvent des opacités hétérogènes non systématisées de type interstitielles ou hilo-basales. Ces images peuvent être unies ou bilatérales, parfois même diffuses.
LE TRAITEMENT
Il repose sur les tétracyclines, les macrolides ou les fluoroquinolones. Les β-lactamines ne sont pas efficaces du fait de l’absence de paroi des mycoplasmes.
Dans notre situation, l’inefficacité de l’amoxicilline peut tout à fait s’expliquer par les caractéristiques de cette bactérie atypique.En conséquence, nous avons décidé de prescrire chez notre patiente un macrolide (roxithromycine 150 mg matin et soir) sur une durée de 15 jours.
Epidémiologie
Les pneumonies à mycoplasma pneumoniae sont des pneumopathies atypiques interstitielles, alvéolaires ou alvéolo-interstitielles. Le mycoplasme est un micro-organisme à la structure proche de celle des procaryotes. Du fait de l’absence de paroi rigide, ils peuvent prendre des formes différentes. C’est probablement le germe le plus fréquemment en cause dans les pneumopathies de l’enfant entre 5 et 9 ans. Leur incidence est estimée entre 7,4 et 23 % de l’ensemble des pneumopathies selon les études.
Bibliographie
1- Pilly E. Maladies infectieuses et tropicales. Ed. Vivactis plus 2014.
2- Carrière C, Marchandin H. Infections respiratoires dues à Mycoplasma pneumoniae. La lettre du Pneumologue 2000 ; 3 (2) : 65-68.
3- Bébear CM. Physiopathologie et diagnostic des infections à Mycoplasma pneumoniae. Revue française d’allergologie et d’immunologie clinique 2007 ; 47 : 438–441.
4- Gendrel D. Mycoplasma pneumoniae et infections respiratoires aiguës. Revue française d’allergologie et d’Immunologie clinique 2007 ; 47 : 442-445.
5- Dumoulin A. Mycoplasma pneumoniae : connaissances actuelles et nouveau défis ; Revue Médicale Suisse 2016 ; 12 : 1694-1697.
Mise au point
Troubles psychiatriques : quand évoquer une maladie neurodégénérative ?
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
Recommandations
Antibiothérapies dans les infections pédiatriques courantes (2/2)