Afin de permettre un rétablissement rapide, le but premier des thérapies n’est pas la perte de poids, ni l’arrêt des crises d’hyperphagie, mais vise trois objectifs : traiter les complications somatiques (risque accru de surmortalité dû aux troubles métaboliques induits), restaurer un comportement alimentaire adapté et traiter les troubles psychiques associés (risque important de suicide, dépression, troubles de la personnalité, troubles anxieux ou addictifs). La prise en charge doit être d’emblée pluriprofessionnelle et coordonnée : somatique, psychiatrique, nutritionnelle, sociale et familiale. Après avoir détaillé les signes permettant de repérer ces troubles souvent silencieux et à fortes répercussions somatiques et psychologiques (Le Généraliste, FMC, n° 2881), nous présentons les principes de prise en charge recommandés par la HAS.
La prise en charge ambulatoire est préconisée en première intention, sauf en cas de risque vital de nature somatique (hypokaliémie majeure, etc.) ou psychiatrique (état de mal boulimique, risque suicidaire, etc.) où une hospitalisation est indiquée.
APPROCHE PSYCHOTHÉRAPEUTIQUE
→ Les outils d’autosupport (self-help) peuvent être proposés avant l’initiation d’une prise en charge ou au début. L’auto-support guidé par un professionnel de santé est plus efficace que la version non accompagnée (grade B). Ce type d’approche peut être cependant proposé en cas d’impossibilité de psychothérapie structurée (distance, manque de thérapeutes, refus du patient, etc.), mais avec une efficacité moindre.
→ La thérapie comportementale et cognitive (TCC) individuelle adaptée aux troubles des conduites alimentaires est recommandée en première intention dans le traitement de la boulimie nerveuse et de l’hyperphagie boulimique (grade A). La TCC de groupe est envisageable mais pourrait être moins efficace que la TCC individuelle.
→ La thérapie comportementale dialectique est recommandée chez les patients souffrant de boulimie ou d’hyperphagie boulimique présentant un trouble de la personnalité borderline comorbide.
→ La thérapie interpersonnelle est une option thérapeutique dans la prise en charge de la boulimie et de l’hyperphagie boulimique (grade B).
→ Les thérapies psychanalytiques peuvent être proposées dans la boulimie, mais après apaisement des symptômes boulimiques, notamment après une prise en charge cognitivo-comportementale, avec des thérapeutes sensibilisés aux troubles des conduites alimentaires. Leur bénéfice n’est pas clairement établi dans l’hyperphagie boulimique.
→ Les thérapies familiales peuvent être utiles pour les adolescents et les jeunes adultes souffrant de boulimie.
TRAITEMENTS PSYCHOTROPES
Il est important d’expliquer au patient que cette prescription s’intègre dans une prise en charge plus globale et qu’elle ne constitue pas à elle seule le traitement de ses troubles.
Tant dans la boulimie que l’hyperphagie boulimique, les ISRS (inhibiteurs sélectifs de la sérotonine) peuvent être proposés en deuxième ligne chez les adultes. Notamment en cas d’impossibilité d’accéder à une psychothérapie structurée, en l’absence de contre-indication et toujours en association avec une prise en charge psychologique et multidisciplinaire.
En cas de prescription d’ISRS, un traitement de plusieurs mois est nécessaire. Le topiramate, compte tenu de la balance bénéfice/risque et du risque de détournement, ne devrait être prescrit qu’après avis d’un centre spécialisé dans la prise en charge des troubles du comportement alimentaire.
DURÉE DE LA PRISE EN CHARGE
En raison de leur chronicité fréquente, la prise en charge de de la boulimie et de l’hyperphagie boulimique s’étend souvent sur plusieurs années. Elle doit se poursuivre au moins un an après une amélioration clinique significative.Les professionnels doivent informer les patients sur les possibilités de guérison et leur conseiller de voir un spécialiste régulièrement, quel que soit le nombre d'années écoulées et les échecs thérapeutiques précédents. Un trouble de la personnalité borderline peut augmenter le risque d’abandon prématuré du suivi.
TRAITER LES COMPLICATIONS SOMATIQUES
→ En cas de vomissements fréquents, la kaliémie doit être surveillée. En cas d’hypokaliémie, sa correction est suivie d’une complémentation orale en potassium à adapter à la fréquence des vomissements. Sans hypokaliémie, une supplémentation potassique à prendre en période d’acutisation des vomissements est possible. Les patients qui vomissent doivent bénéficier d’évaluations dentaires régulières par un chirurgien-dentiste. Il faut informer le patient de la nécessité de prendre tout médicament per os à distance des vomissements (contraception, potassium, psychotrope, antibiotiques, etc.). En cas de reflux gastro-œsophagien et/ou vomissements fréquents, il est recommandé de prescrire des inhibiteurs de la pompe à proton (IPP).
→ Mésusage de laxatifs et recours aux lavements. Une prise de laxatifs doit être recherchée, notamment en cas de troubles hydro-électrolytiques inexpliqués (hypokaliémie).
→ La prise de diurétiques doit être recherchée en cas de troubles hydro-électrolytiques (hyponatrémie, hypo ou hyperkaliémie, déshydratation).
→ Les complications osseuses. Une ostéodensitométrie est conseillée chez les patientes souffrant de boulimie ou d’hyperphagie boulimique en aménorrhée depuis au moins 6 mois, en dehors d’une grossesse ; les patients souffrant de boulimie ou d’hyperphagie boulimique avec antécédent d’anorexie mentale ; les patients présentant un autre facteur de risque d’ostéoporose. Les carences en vitamine D doivent être corrigées.
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