Le virage de la prévention peine à se concrétiser, notamment dans les établissements de santé. De fait, la France y consacre moins de 0,5 % de ses dépenses hospitalières, selon le dernier rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur le financement de la prévention primaire dans les établissements de santé. D’où la nécessité de changer de braquet à la faveur d’un dispositif beaucoup plus incitatif.
Concrètement, l’Igas propose de miser sur le nouveau « compartiment de dotations relatives aux objectifs de santé publique », qui figurait dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024, afin de dégager des crédits ciblés sur des actions de prévention primaire. « Il est établi que la prévention a un impact majeur sur la réduction de la mortalité et de la morbidité évitables, compte tenu de l’incidence des facteurs liés au comportement sur la santé et que les établissements de santé constituent un maillon essentiel », peut-on lire.
Des actions de santé publique ciblées peuvent aussi avoir un impact direct sur les dépenses en ALD, sachant que quatre pathologies représentent plus des trois quarts des 13,4 millions de personnes exonérées à ce titre : maladies cardio-neurovasculaires, diabète, tumeurs malignes et affections psychiatriques de longue durée. « La prévention primaire qui s’attache à modifier ces comportements peut contribuer à la diminution du nombre d’ALD », pointe le rapport.
Chaque contact compte
Compte tenu du caractère probant de la démarche, le rapport propose le financement d’actions inspirées de celles déployées en Grande-Bretagne en les centrant sur le tabac, l’alcool, l’alimentation et l’activité physique.
Le modèle choisi par la mission Igas est la démarche Making every contact count (MECC) pratiquée en routine depuis une dizaine d’années au Royaume-Uni, et qui a montré son efficience. Cette méthode consiste à tirer profit de toutes les occasions de contact entre le soignant et le patient pour aborder des thématiques liées au mode de vie lié et à la santé afin que ce dernier puisse changer ses pratiques. « L’information, le dialogue et l’échange entre le professionnel de santé et le patient permettent à ce dernier, à l’occasion de ces interventions brèves, de s’interroger sur ses habitudes et ses comportements liés à la santé en vue d’opérer des changements de mode de vie favorable », plaide pour l’Igas. Comme au Royaume-Uni, la mission propose de prioriser ces actions dans l’Hexagone sur quatre déterminants : le tabac, l’alcool, l’alimentation et l’activité physique.
100 établissements pilotes
Pour l’Igas, l’objectif est donc de construire un « maillage territorial » de la prévention en établissement, à la faveur d’un déploiement « progressif mais irréversible de ce financement ». Dès 2025, un appel à candidature par les agences régionales de santé (ARS) pourrait sélectionner les 100 établissements volontaires pour mener des actions pilotes, avant une montée en charge en 2026 et une généralisation en 2027.
Une dotation de 12 millions d’euros pourrait être consacrée dès l’an prochain à ces actions de prévention primaire (mesures nouvelles) avec une cible de 163 millions d’euros en 2027. Des ressources permettant en particulier la diffusion d’outils de formation et d’information et la mobilisation des blouses blanches dans l’animation de cette démarche vers les populations les plus fragiles.
Une fois cette période test évaluée, une montée en charge pourrait permettre d’atteindre la majorité des 2 273 établissements concernés (court séjour et HAD) en 2027. La mission insiste sur l’obligation de mettre en place des indicateurs de santé publique et un suivi de cette démarche.
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