La Banque postale a présenté ce vendredi une étude sur la dette des hôpitaux, pour le compte de la Fédération hospitalière de France (FHF). Cet audit arrive à point nommé pour le président de la FHF, Frédéric Valletoux, qui demande que les conséquences financières de la crise sanitaire, mais aussi « l’impact de l’inflation et de la hausse du point d’indice de 3,5 % » soient pris en compte dans le prochain budget de la Sécurité sociale (2023).
Mais dès cette année, les hôpitaux publics réclament une rallonge budgétaire de deux milliards d'euros pour compenser l'inflation (qui touche l'énergie, l'alimentation, les dispositifs médicaux, mais surtout les travaux) et la hausse du point d'indice des fonctionnaires (depuis le premier juillet).
Hôpitaux biberonnés à l'emprunt
L’étude de la Banque postale dresse un bilan du poids de la dette des hôpitaux à fin 2019. C’est à cette date que le gouvernement avait annoncé la promesse d'un soutien massif (à hauteur de 13 milliards d’euros) pour soulager le fardeau de la dette hospitalière. Si on y ajoute les six milliards du plan France relance, c'est une enveloppe proche de 19 milliards qui doit permettre de retrouver sur dix ans des capacités de manœuvre et d'investissement. Un montant à comparer à l’encours de la dette totale des hôpitaux publics (30 milliards d’euros).
Les plans « Hôpital 2007 » et « Hôpital 2012 » avaient certes permis une relance de l’investissement hospitalier. Mais la majorité des aides de l'époque ont pris la forme d'un soutien à l'exploitation (et non à l'investissement), ce qui a généré « une forte incitation à privilégier l’emprunt comme modalité de financement des investissements », analyse Sébastien Villeret, responsable d'études financières à La Banque postale. Ces deux plans ont donc engendré « une forte croissance de l’encours de dette hospitalier entre 2000 et 2012 ».
L'étude a analysé 837 hôpitaux publics sur une période de référence (2017 à 2019) et se concentre sur trois ratios (indépendance financière, taux d’investissement et délai de désendettement). Au total, un tiers des hôpitaux a eu besoin d’une autorisation de l’ARS pour emprunter sur les trois années, tandis que la moitié ne l’a pas fait. Mais cela s’est souvent opéré « aux dépens des investissements qui ont pris la forme d’une variable d’ajustement permettant à l’hôpital de maîtriser le poids de sa dette ».
Si l’on regarde le ratio « taux d’endettement » (rapport entre l’encours de dette et le total des produits), la médiane de 2019 était de 28 %, soit un niveau proche du seuil réglementaire de 30 %, mais dépassé par 48 % des établissements la même année.
Et pour le ratio « délai de désendettement », la médiane se situait autour 8,5 années en 2019. Le seuil réglementaire (10 ans) était dépassé par 45 % des établissements. Un phénomène qui « légitime une approche pluriannuelle pour le désendettement », plaide la Banque postale.
Pas de plan de soutien massif à l’investissement
Pour Cécile Chevance, à la tête du pôle finances de la FHF, cette étude illustre que les établissements publics, confrontés à leur taux d’endettement croissant, ont été contraints de réduire significativement leurs investissements. Or, selon elle, les milliards d’euros injectés dans la foulée du Ségur sont avant tout un plan de reprise partielle de la dette et non pas encore un plan de « soutien massif à l’investissement », comme l’appelait de ses vœux la FHF. Mais, étant donné la situation des établissements, « on n’avait pas d’autre choix », admet-elle.
La FHF a fait des simulations pour mesurer l’impact du plan de relance des investissements Ségur. Sur les dix prochaines années, l'effort d’investissement (en pourcentage des recettes) serait relancé à hauteur de 5,5 %, contre 4 % en 2021, taux le plus bas depuis quinze ans. Un taux néanmoins « très inférieur » au seuil de 7 % fixé par la fédération. Bref, regrette Cécile Chevance, si le plan d’investissement du gouvernement est « à saluer », « il n’apporte pas encore de solution pérenne ».
[Mise à jour, vendredi 19h45] Vendredi soir, la FHF a salué la décision de la Première ministre de prolonger la garantie de financement des établissements jusqu’à la fin de l’année, y voyant un « signe fort, de nature à rassurer les hôpitaux publics ».
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