S’agit-il d’une fausse bonne idée ? Dans un contexte où la mortalité infantile suit une trajectoire préoccupante en France – 4,1 décès avant un an pour 1 000 naissances vivantes en 2024 contre 3,5 en 2020, selon l’Insee – le député Liot de Corse du Sud, Paul-André Colombani, porte une proposition de loi visant à lutter contre cette situation sanitaire, l’une des plus dégradées d’Europe.
Le parlementaire défend notamment un moratoire sur les fermetures de maternités, estimant que l’éloignement géographique croissant des structures de soins et la fermeture des trois quarts des maternités en 50 ans ont « boulevers[é] en profondeur le maillage territorial », mettant à mal à l’accès aux soins obstétriques.
Mettre en place un moratoire de ce type sur une période de trois ans est selon lui une manière de protéger les petites maternités dont l’activité tourne autour de 300 accouchements par an, « seuil souvent utilisé comme critère implicite de fermeture, sans prise en compte des réalités locales », soulève l’élu corse, par ailleurs médecin généraliste.
Mais si Paul-André Colombani cherche à « éviter la disparition irréversible de structures de proximité, parfois uniques dans leur zone géographique », la méthode est loin d’être partagée par le syndicat des gynécologues obstétriciens de France (Syngof). « Instaurer un moratoire de trois ans reviendrait à maintenir ouverts des établissements dangereux, alerte son président, le Dr Bertrand de Rochambeau. Les morts maternelles continueront d’augmenter et les résultats périnataux poursuivront leur dégradation. »
Dans le détail, le Syngof partage plutôt l’analyse de la Société française de médecine périnatale (SFMP), « qui pointe la responsabilité des pouvoirs publics dans le manque de planification et d’anticipation des fermetures de maternités ». Ces fermetures auraient, selon la SFMP, « dû être réalisées dans le cadre d’une réorganisation globale de l’offre de soins avec à la clef, les investissements nécessaires à l’amélioration concomitante de l’accompagnement et de la prise en charge des femmes et des nouveau-nés, mais aussi à l’amélioration des conditions de travail des personnels de santé ».
L’inquiétude liée aux accouchements à domicile
Le Dr de Rochambeau préconise de « préserver les petites maternités en les transformant en centres de consultation et de suivi », afin de maintenir l’offre de soins de proximité pour les femmes enceintes. Les accouchements seraient ainsi à la charge des plus gros établissements, jugés plus robustes en matière de ressources humaines pour assurer la sécurité des patients. Un positionnement cohérent avec l’avis de l’Académie nationale de médecine publié en 2023 : « Seules de grandes structures seront à même de proposer une offre et une qualité de soins exigées par les usagers comme par les professionnels ; elles éviteront ainsi d’être caricaturées comme “des usines à bébés” qui résulte aujourd’hui d’une criante insuffisance de moyens humains et de contraintes architecturales inadaptées », peut-on lire dans son rapport.
Si le moratoire sur les fermetures des maternités venait à être adopté, le président du Syngof s’inquiète du développement du recours aux accouchements à domicile pratiqués par les sages-femmes. « La demande vient probablement des patientes qui ne veulent pas aller dans les hôpitaux dans les conditions actuelles », suppose le Dr de Rochambeau. Car maintenir ouverts ces établissements fragiles aurait un effet repoussoir sur les professionnels médicaux. « Personne n’a envie de travailler dans un endroit dangereux. C’est d’autant plus vrai quand vous exercez en libéral car c’est votre responsabilité personnelle qui est en jeu », insiste-t-il.
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