LE QUOTIDIEN DES LECTEURS

Indignée par le numerus clausus

Publié le 23/05/2013
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La Varenne-St-Hilaire (94)

Dr Danièle Hoff

Cher « Quotidien »,

J’ai été irritée par votre article du 2 mai sur « le coup de main des Roumains ».

Ce qui me bouleverse, c’est le fait que l’on fasse appel à de la main d’œuvre étrangère, dont on ne connait pas le niveau de formation, pour occuper des postes que nos enfants rêvaient d’occuper et qui en ont été empêchés par le fameux « numerus clausus ».

Dermatologue, m’occupant de nombreux ados à l’âge de l’acné, j’ai connu de nombreux jeunes qui ont beaucoup travaillé et ont été éliminés après deux ans d’efforts et bien qu’étant d’un très bon niveau. Mais quand on en récuse 9 sur 10...

J’en ai vu pleurer en me montrant un papier stipulant « interdiction de se représenter sur tout le territoire » presque infamant comme sur un casier judiciaire... Beaucoup avaient des qualités morales qui en auraient fait de bons médecins. Certains sont devenus experts-comptables, hommes d’affaires mais regretteront toujours leur vocation contrariée.

Je peux dire mon idignation d’autant plus facilement que ma fille a franchi le barrage du premier coup avec un an d’avance et que mon petit-fils vient de réussir le même exploit.

Que l’on fasse appel à des étrangers pour faire des tâches que ne veulent pas assumer nos ressortissants (alors qu’il y a tant de chômeurs...), c’est déjà discutable. Mais barrer ses propres enfants pour importer des médecins qui parfois ne parlent pas bien notre langue... c’est navrant.

Signé : une retraitée qui vient de cesser son activité... à 77 ans.

Merci mon assureur

Grenoble (38)

Dr Philippe Dupraz

En octobre dernier, des vandales se sont introduits en pleine nuit dans notre cabinet médical situé en bordure de la Villeneuve de Grenoble. Il y ont mis le feu (!!!), dévastant en quelques dizaines de minutes la moitié du cabinet.

Notre assureur, La Médicale, a dépêché très rapidement sur place un expert agréable et compétent, nous a versé une provision conséquente pour entamer les travaux de nettoiement puis de rénovation, et nous a indemnisés, là aussi très honnêtement, des dégâts matériels ainsi que de la perte d’exploitation (garantie souscrite) pendant le temps de fermeture du cabinet.

Les assureurs sont souvent critiqués, il m’a semblé qu’il fallait leur rendre justice quand ils sont si présents au moment où l’on a besoin d’eux.

Grossesse et grippe : mise au point

Dr André Coret

« Le Quotidien » [article en ligne le 15 mai] annonce et reprend à son compte le fait suivant : une grippe pendant la grossesse augmente le risque de trouble bipolaire chez l’enfant et l’adulte qu’il devient. Et pas qu’un peu puisqu’il est annoncé un « risque » quatre fois plus élevé.

Cette « nouvelle » valait donc d’être vérifiée d’autant plus que je n’avais pas compris clairement l’argumentation de l’article du « Quotidien » menant à cette conclusion.

Nous trouvons donc dans le « Medical News Today » un résumé des travaux qui ont été réalisés sur la question et qui est très récent (9 mai 2013). Son titre est péremptoire et a donc été très bien traduit par « le Quotidien » : « Flu in Pregnancy Increases Child’s Risk Of Bipolar Disorders ».

Selon cette source, une cohorte de 214 femmes enceintes atteintes de grippe pendant leur grossesse a été constituée entre 1959 et 1966. Parmi celles-ci, 92 ont eu un enfant classé après enquête de l’équipe de recherche comme bipolaire, soit une proportion aisément calculable de 43 % ! C’est la même équipe qui n’a trouvé dans un ensemble de 722 personnes qu’elle a elle-même choisi un taux de bipolaire quatre fois moindre soit environ 10 %.

Ce résultat spectaculaire est en fait largement biaisé ne serait-ce que parce que l’équipe de recherche avait explicitement, pour hypothèse de départ, la responsabilité de la mère dans de nombreux cas de troubles bipolaires. Comment pouvait-elle dans ces conditions poser « scientifiquement » le diagnostic de bipolarité ou de non bipolarité ?

Réponse au Dr Cacault

Paris (75)

Dr Gilles Seban

Avec le respect que je dois à mon confrère le Dr Jean-Alain Cacault, je me permets de répondre à sa lettre parue dans « le Quotidien des lecteurs » du 13 mai.

Tout d’abord, il n’y a nullement lieu de réviser l’histoire. En l’occurrence, n’en déplaise au Dr Cacault, je maintiens, preuve à l’appui : l’Ordre des Médecins a bel et bien été fondé sous le régime de Vichy. Et, de fait, cette institution demeure pour l’essentiel un bureau d’enregistrement et une instance disciplinaire.

Pour le reste, l’Ordre des Médecins suit les consignes gouvernmentales, seules légitimes à définir les orientations en matière de politique de santé.

Certes, le Dr Cacault a raison d’insister sur l’importance des règles qui régissent la pratique de la médecine. En revanche, il semble confondre l’éthique et la déontologie qui relèvent de la responsabilité du professionnel de santé ; et la morale qui est du devoir de tous.

De surcroît, le Dr Cacault feint d’oublier nos longues années de formation à la faculté ainsi que le serment que nous avons tous prêté pour un exercice médical responsable, digne et en conscience.

Alors que le Dr Cacault continue à prélever ses cotisations. Qu’il demeure convenu et professoral s’il le souhaite. Mais, de grâce, qu’il cesse de faire semblant d’être utile !

L’Ordre n’a rien à nous enseigner que l’on ne sait déjà quant à l’éthique, la déontologie ainsi que concernant les bonnes pratiques de la médecine.

Si j’aurais su, j’aurais pas venu

Barentin (76)

Dr Stéphane Pertuet

Mon interne… – oui, je dis mon interne comme si elle m’appartenait, alors que pas du tout ; c’est juste pour habiter ma nouvelle fonction et que pour vous compreniez bien à qui vous avez à faire : un Maître de stage enseignant des Universités, auréolé d’une gloire toute neuve et nimbé de sa toute puissance pédagogique. Rien de moins.

Il fut une époque cependant moins glorieuse où, étudiant en médecine, l’on pouvait ronronner tranquillement jusqu’en avril. Puis, aux premiers rayons printaniers, mettre les bouchées doubles jusqu’en juin, afin de pouvoir se la couler douce jusqu’à Noël.

Ces jours heureux que les moins de trente ans ne peuvent pas connaître semblent révolus. Après le concours de la première année – feu PCEM1, à présent PACES –, vient la deuxième année.

Évidemment me direz-vous.

Et à partir de la deuxième année, ce sont des examens qu’il faut préparer et passer toutes les cinq semaines jusqu’à la fin de la sixième…

Puis le CSCT.

Puis l’internat.

Puis les trois années qui suivent à l’hôpital et en cabinet de médecine de ville, avec en cours de route un article scientifique publiable en attendant de s’atteler à la rédaction d’une thèse.

En huitième ou neuvième année, le TCS – un examen écrit – et les ECOS – une sorte d’examen oral.

Après ce véritable parcours du combattant, on pourrait se dire que le jeune médecin généraliste aura une carrière digne de celle d’un notaire ou d’un sous-préfet. Que nenni  : il aura le choix entre un poste salarié payé au lance-pierres et le libéral à enchaîner des consultations à 23 euros.

Sans la protection sociale digne de ce nom, avec les horaires que l’on sait, sans la garantie de toujours gagner correctement sa vie, et avec toutes les tracasseries connues de tous que je ne rappellerai pas ici.

Ainsi, comme me dit mon interne  : « Ce serait à refaire, je ne le referais pas. »

Et moi qui viens de revoir la guerre des boutons, j’ai entendu ceci  : « Si j’aurais su, j’aurais pas venu. »


Source : Le Quotidien du Médecin: 9244