Les internes et jeunes médecins s’étaient élevés contre un dispositif « transpartisan » adopté au Sénat qui proposait que la dernière année d’études en 3e cycle de médecine générale (et certaines spécialités déficitaires comme l'ophtalmologie) soit une année de pratique « en autonomie » dans les déserts. Ils avaient dénoncé cette mesure en lançant notamment la campagne #PasencadréPasformé.
Hier une commission mixte paritaire (7 députés, 7 sénateurs) s’est finalement mise d’accord sur une version remaniée de l’amendement. Les parlementaires ont voté pour un stage de six mois en dernière année d'internat en autonomie supervisée par un médecin et « en priorité » dans les zones sous-denses. La nouvelle disposition impose donc que le Saspas, qui existait déjà et est devenu obligatoire avec la réforme du troisième cycle, soit préférablement réalisé dans les territoires en difficulté.
En fait, le saspas en dernière année, c'est déjà dans la maquette et vu l'état de la démographie, quasi tous les terrains de stage sont en zone fragile. Le texte dit "prioritairement", donc en pratique c'est un statu quo. Tant mieux, c'était une idée dangereuse et inutile !
— Stéphane Bouxom (@sbouxom) 21 juin 2019
Le Saspas devient une obligation légale
Par rapport au texte initial, la mesure adoptée est donc « un moindre mal », estime le Dr Laure Dominjon, nouvelle présidente de ReAGJIR. Le syndicat des internes de médecine générale, l’Isnar-IMG, est lui aussi rassuré, même s’il restera très vigilant sur plusieurs points. « Ce texte fait du Saspas une obligation légale, or dans quelques subdivisions il est encore difficile pour tous les internes de pouvoir le réaliser, il ne faudrait donc pas que cela bloque certains étudiants dans leur cursus », souligne Lucie Garcin, présidente de l’Isnar-IMG. Le fait que le texte précise que ces stages devront être réalisés « en priorité », et non pas obligatoirement, dans les déserts est également de nature à rassurer les internes. « Nous espérons que cela signifie que si dans ces zones il n’y a pas les capacités de formation, les étudiants n’y seront pas envoyés », explique Lucie Garcin.
Une priorité, l'intérêt pédagogique
Tous veilleront également à ce que l’intérêt des stages ne soit pas sacrifié dans l’optique d’aller repeupler les déserts. « L’exigence pédagogique doit rester le critère premier », estime Lucie Garcin. Un avis partagé par le Dr Dominjon, « nous serons attentifs à ce que les maîtres de stage répondent bien aux critères indispensables. Qu’ils aient le temps de former, d’encadrer correctement les internes », note-t-elle.
L’objectif est d’éviter que ces stages se transforment en remplacement déguisé. Ce qui serait particulièrement contre-productif par rapport à l’effet recherché selon la généraliste francilienne : « Si les internes ne sont envoyés que dans des zones où il n’y a pas de maillage de soins, pas d’encadrement, cela risque de créer un effet délétère. C’est le meilleur moyen de faire peur aux internes et de les dégoûter d'aller exercer dans ces zones. » Sur ce point, le texte précise bien que les terrains de stage devront impérativement être agréés, mais Lucie Garcin estime malgré tout qu'accompagner cette mesure implique impérativement de « donner de vrais moyens » pour augmenter le nombre de terrains et de maîtres de stages.
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