Comme elle l’a confirmé lors d’une conférence de presse ce jeudi 2 février, l’Union française pour une médecine libre (UFML-S) a moyennement apprécié la tribune du directeur de l’Assurance maladie dans Le Figaro.
Le syndicat a peu goûté de voir qualifiées d’ « indécentes » ou « extravagantes » les propositions tarifaires de certains. Alors que pour le président de l’UFML-S, le Dr Jérôme Marty, il n’y a rien d’indécent à ce « qu’une profession demande que ses représentants soient valorisés à hauteur de la moyenne européenne », qui plus est quand elle est, selon lui, « la seule à même de mailler le territoire, d’amener le soin au patient et de sauver l’hôpital public ».
Un C à 50 euros d'ici 5 ans
Le syndicat constate une paupérisation de la médecine libérale, amenée notamment par les deux dernières conventions et « une évolution des modes de paiement qui tend à déconnecter la valeur de notre activité principale avec la réalité économique et professionnelle ».
« Ainsi, la dépense en médecine générale a augmenté 2,5 moins vite par an (1,1 % vs 2,8 %) que le reste des soins et nos honoraires ont même baissé de 6 % depuis 2010 (à euros constants, ndlr) », calcule le Dr Marty.
Pour lui une revalorisation à 30 euros en 2023 ne changerait rien car avec l’inflation, en 2028, cela équivaudrait à 25 euros comme aujourd’hui.
La proposition du syndicat est donc celle d’un C à 50 euros avec une montée en charge progressive sur les cinq ans de la convention et une indexation sur l’inflation.
Le syndicat a calculé que cette proposition, pour la médecine générale, correspond à un budget de 1,2 milliard, si à côté l’Assurance maladie décide de faire le ménage dans les forfaits notamment.
Non aux différents niveaux de consultation
L’UFML-S appuie notamment pour une simplification de la nomenclature et la suppression de la valorisation spécifique des consultations complexes.
Le syndicat n’est en effet pas favorable aux propositions de quatre niveaux de consultation et au distinguo entre consultation de base et consultations complexes.
« La distinction entre consultation simple et complexe ne correspond pas à la réalité médicale du terrain. En 25 ans de pratique, je ne sais toujours pas ce qu’est un acte simple », estime le généraliste.
Le syndicat ne dit pas non à toutes formes de forfaits mais ils doivent être « un financement d’une prestation clairement identifiée, dont les critères d’affectations sont objectifs, pourvoyeurs de qualité et simples en termes de gestion ».
Ce qui est loin d’être le cas avec ceux actuels, estime-t-il. Le Dr Marty cite notamment la Rosp véritable « usine à gaz » et considère que l’argent de celle-ci serait mieux utilisé dans la revalorisation de la consultation.
En effet, dans un C à 50 euros, le syndicat prévoit que cela comprend le soin mais aussi la prévention et le renseignement numérique.
« On abandonne le principe de hausse de la file active, en contrepartie d’un engagement d’amélioration de la qualité selon des critères qui sont à définir : temps de consultation allongé, protocole de prévention, usage des outils numériques… ».
Revalorisation de 50 % des actes en zones sous-denses
Côté forfait, l’UFML-S sauve malgré du tout le forfait patientèle médecin traitant (FPMT), « le seul vraiment concret avec une vraie retombée médicale ». Revalorisé, ce forfait peut être selon le Dr Marty un « vrai levier pour encourager les médecins à élargir leur patientèle ».
Pour réduire les inégalités territoriales, le syndicat suggère aussi une hausse des actes de 50 % pour les médecins qui s’engagent à exercer un temps limité dans des zones sous-dotées. « Cette hausse de la valeur des actes remplacerait le maquis d’aides financières existantes, ce qui pourrait se faire à enveloppe constante ».
La dernière convention ?
Malgré ce programme conventionnel, l’UFML-S considère que les négociations actuelles sont « un voyage en absurdie ». « Nous n’avons pas les documents, les chiffres, ni même les thématiques avant d’arriver », explique le Dr Marty.
Pour lui, afin de rétablir un véritable paritarisme il faudrait notamment décider du périmètre conventionnel avec les syndicats, que le financement de ces derniers ne soit pas lié à signature ou encore une contractualisation sur la livraison des documents et data.
Mais au-delà de ça, le président du syndicat est dubitatif sur l’avenir conventionnel, surtout quand il observe ce qu’il s’est passé avec la proposition de loi Rist.
« Mettre un pan conventionnel dans une loi pendant les négociations, c’est un premier signal. C’est une première étape vers l’ubérisation, il faut y être extrêmement attentif. Un collègue d’un autre syndicat disait que si nous allions vers un règlement arbitral il est possible que cette convention soit la dernière. Je pense que le gouvernement voit ses négociations conventionnelles comme un anachronisme. Et il pourrait très bien décider d'en supprimer l’existence », estime-t-il.
Au-delà du dialogue, c’est aussi la confiance des médecins dans le système conventionnel qui est remis en cause selon le syndicat. À l’image de ce qu’il observe autour des Assises du déconventionnement que le syndicat organise début mars.
Le Dr Marty explique que les inscriptions se sont remplies en deux fois 24 heures « comme pour un concert de rock de dimension internationale ». Et, selon lui, avec l’ajout de ceux qui seront à distance en webinaire, près de 8 000 médecins pourraient être présents, « ce qui en fera la manifestation de l’année avec le plus de médecins ».
« Plutôt que de se montrer agressif, l’Assurance maladie devrait en tenir compte car cela traduit un profond malaise. Nous n’avons pas envie de sortir du système solidaire, mais que faites-vous pour faire rester ces médecins », interroge le président de l’UFML-S.
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