C'est la génération qui monte : selon le dernier atlas du conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom), les médecins de moins de 40 ans représentent désormais près de 30 % de la profession, soit le double qu'en 2010.
Réuni pour leurs Rencontres annuelles, la semaine dernière à Colmar, le syndicat Reagjir – qui représentent les remplaçants en médecine générale et les installés depuis moins de cinq ans – a montré que la jeune garde déjoue les clichés qui lui sont accolés. Son nouveau président, le Dr Raphaël Dachicourt (lire page 8), 29 ans, s'est lui-même installé au printemps… moins d'un an après la fin de ses études sous le statut de collaborateur libéral. « La grande majorité des diplômés s'installent dans les cinq ans suivant la fin de leurs études », insiste la présidente précédente du syndicat, la Dr Élise Fraih, 34 ans, installée depuis cinq ans dans un village du Bas-Rhin, qui entend battre en brèche le mythe de l'éternel remplaçant. Selon l'enquête Remplact 4, menée par Reagjir et dévoilée pour le congrès, 58,5 % des remplaçants ont un souhait d'installation dont les deux tiers dans les deux ans à venir. Et avec une nette préférence pour le territoire où ils exercent déjà, pour près de 70 % d'entre eux.
Mêmes droits que leurs aînés
Il n'en demeure pas moins que le syndicat continue de militer pour que les remplaçants puissent être conventionnés avec l'Assurance-maladie, comme leurs aînés, afin de bénéficier des mêmes droits à la formation continue ou en cas de maternité/paternité. « Les remplaçants ne sont pas les profiteurs désinvoltes et individualistes décrits par certains politiques mais des professionnels de santé à part entière », argumente Élise Fraih. Une revendication à laquelle le directeur de l'Assurance-maladie a opposé une nouvelle fin de non-recevoir, lors du congrès. « Vu l’effet de ciseau entre le nombre de patients qui augmente et celui de médecins qui diminue, nous avons besoin de jeunes qui s'installent », a plaidé Thomas Fatôme.
Pour autant, le DG de la Cnam s'est trouvé quelques points de convergence avec Reagjir. Le syndicat de jeunes généralistes a été reconnu représentatif en novembre dernier et a été autorisé à ce titre à participer comme observateur aux négociations conventionnelles. Il le sera à nouveau lorsque les discussions redémarreront à la rentrée. Il défendra dans ce cadre une simplification des critères de la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) et une revalorisation de la consultation de base – au moins au niveau de l'inflation – assortie de plusieurs niveaux tarifaires supérieurs. Comme ses aînés, Reagjir s'est fortement opposé au contrat d'engagement territorial que la Cnam avait mis sur la table en contrepartie de l'accès à des tarifs supérieurs.
Ancien modèle sacrificiel
Interpellé par des remplaçants lors du congrès, le DG de la Cnam a admis la nécessité de pouvoir disposer d'une meilleure visibilité sur leur activité. Interrogé aussi par des jeunes installés dans des structures de groupe qui peinent à se voir désignés comme médecin traitant malgré une file active importante – et par conséquent ne peuvent pas percevoir les rémunérations associées leur permettant d'investir dans le cabinet –, Thomas Fatôme a botté en touche, en leur conseillant d'en parler avec leurs associés. « Je ne ferme pas la porte à ce qu’on trouve des façons d’appréhender la montée en charge des jeunes qui s’installent », a-t-il concédé. Il s'est en revanche déclaré en accord avec Reagjir qui réclame que les assistants médicaux puissent être salariés directement par une MSP et pas uniquement par un praticien de la structure.
L'étude Remplact 4 révèle aussi que les remplaçants sont très majoritairement des femmes (71,5 %), de 33 ans en moyenne, signe que la féminisation de la médecine générale va encore s'amplifier dans les prochaines années. « L'ancien modèle sacrificiel de la médecine générale a été transformé par la féminisation », a observé au passage le Dr Serge Covaci, auteur d'une thèse sur la féminisation du corps médical. Une évolution qui a profité à l'ensemble de la nouvelle génération médicale.
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