60 euros pour un « avis rapide » entre spécialistes : Avenir Spé revient à la charge, MG France n’apprécie pas

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Publié le 07/10/2024

Dans son « Manifeste pour un meilleur accès aux soins » présenté samedi à Lille, le principal syndicat de spécialistes libéraux, Avenir Spé, a fait valoir l’intérêt d’une nouvelle cotation à 60 euros entre spécialistes (voire à la demande d’un soignant paramédical) pour réduire les délais d’attente. Une « manœuvre » que MG France ne goûte guère…

Crédit photo : GARO/PHANIE

Le Dr Patrick Gasser, patron d’Avenir Spé, a de la suite dans les idées. Dans son manifeste pour un meilleur accès aux soins présenté samedi 5 octobre, à Lille, à l’occasion des Rencontres de la médecine spécialisée, et dont Le Quotidien a dévoilé les grandes lignes, le premier syndicat de spécialistes libéraux a proposé la création d’une « consultation de type nouveau », facturée au tarif APC (avis ponctuel de consultant au tarif de 60 euros dès décembre), qui permettrait aux spécialistes de s’adresser des patients entre eux (pour un avis rapide) ou en cas de soins non programmés.

Avenir Spé, qui se défend de vouloir remettre en cause le médecin traitant et le parcours de soins, cite plusieurs cas de figure où pourrait s’appliquer cette consultation à 60 euros.

D’abord dans le cas d’un « adressage » par un confrère spécialiste : par exemple si un pneumologue suspectant un problème cardiaque face à un fort essoufflement souhaite demander un avis express du cardiologue, détaille le syndicat. Cette nouvelle consultation, au fort goût d’avis ponctuel de consultant (APC) remodelé, ne serait utilisable que dans le cadre d’une « demande d’avis rapide » ou de « soins non programmés », précise le gastro-entérologue nantais.

Mais Avenir Spé pousse plus loin le bouchon puisque, dans son schéma de consultation spécialisée à 60 euros, le patient pourrait aussi être adressé par un professionnel de santé… non-médecin. Une infirmière, un kiné – qui sollicite le chirurgien orthopédiste pour des entorses graves récidivantes – ou une sage-femme — qui demande l’avis d’un gynécologue –, voire par un aidant familial référent qui s’inquiète pour les patients vulnérables ou dépendants (auprès d’un gériatre ou d’un ORL).

En contrepartie, le spécialiste consulté s’engagerait à donner un rendez-vous dans un délai réduit, « quatre jours pour un soin non programmé », « trois à quatre semaines pour un avis spécialisé non urgent ». Dans tous les cas, un compte rendu au médecin traitant serait réalisé. Le développement des équipes de soins spécialisés pourrait doper cette démarche, imagine Avenir Spé.

Ils veulent supprimer le passage par le médecin traitant, ce qui est bien loin de l’accès aux soins…

Dr Agnès Giannotti, présidente de MG France

Chiffon rouge

« L’objectif de cette séquence, c’est bien de généraliser l’APC et que la consultation de base des spécialistes d’organe passe à 60 euros ! Ce qu’ils veulent supprimer, c’est le passage par le médecin traitant, ce qui est bien loin de l’accès aux soins », s’agace la Dr Agnès Giannotti, présidente de MG France, irritée par la manœuvre.

Pour mémoire, les modalités de cotation de l’APC entre spécialistes avaient constitué un énorme chiffon rouge pour MG France, lors des dernières négociations conventionnelles, ce qui avait failli faire capoter les négociations… jusqu’à ce que le DG de la Cnam parvienne à déminer le terrain. Il avait proposé la création d’un groupe de travail autour de l’utilisation de l’APC « qui pourra proposer des évolutions à horizon mi-2025 ». Mais en attendant, la cotation de cet avis d’expertise devait rester très encadrée.

À l’époque, dans les colonnes du Quotidien, le Dr Gasser avait estimé avoir « perdu l’arbitrage sur l’APC ». Mais son congrès lui aura permis de remettre une pièce dans la machine et de proposer ces nouvelles dérogations au médecin traitant. Les retrouvailles entre les deux présidents de syndicat monocatégoriel, lors de la prochaine commission paritaire nationale de décembre, devaient être plutôt fraîches.


Source : lequotidiendumedecin.fr