Le Sénat, fidèle à la « taxe lapins » depuis plusieurs années (sans jamais la voir aboutir), n'a pas changé ses habitudes durant l'examen du projet de budget de la Sécu (PLFSS 2025). À 214 voix contre 127, la chambre haute s'est positionnée pour mettre à la charge de l'assuré « une somme forfaitaire définie par décret » lorsqu'il n'honore pas son rendez-vous chez le médecin. « Je pense que le temps médical est un temps précieux. Il faut continuer à faire de la pédagogie », a souligné la sénatrice LR Corinne Imbert, qui portait la mesure.
La gauche et le gouvernement s'y sont opposés, soulevant des difficultés de mise en œuvre. En effet, elle fait peser sur l'Assurance-maladie le fait de détecter ces abus ; or ses agents « ne sont pas dans les cabinets médicaux », a alerté la ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq, craignant « un risque que les patients soient arbitrairement pénalisés ».
« Entêtement »
Le sénateur socialiste Bernard Jomier, également médecin généraliste, a dénoncé « l'entêtement » de l'alliance droite-centristes, majoritaire au Sénat, sur cette mesure qui va « rater complètement ses objectifs en pesant sur les assurés sociaux ». Le vote du dispositif, qui pourrait être supprimé par la suite lors d'une commission mixte paritaire entre députés et sénateurs sur le budget de la Sécu, relance néanmoins le débat sur la responsabilisation des patients.
C’est l'ancien Premier ministre Gabriel Attal qui avait en effet (re)lancé ce chantier, en annonçant la création dès 2025 d'une telle taxe, pouvant revenir aux médecins. Mais le dossier a été suspendu par la dissolution survenue au printemps.
Dans le cadre du budget de la Sécu, les sénateurs ont également voulu renforcer la protection de la carte Vitale, dont le caractère « sécurisé » serait désormais inscrit dans la loi, sur fond de dématérialisation croissante. Ils ont aussi décidé d'accélérer la généralisation de l'application mobile carte Vitale, en l'avançant de la fin d'année 2025 au 1er juillet prochain. Un dispositif d'incitation financière pour les professionnels à « mettre à jour » leur logiciel pour dématérialiser cet usage a été ajouté.
Biologistes, radiologues et ambulanciers « insultés »
Dans un autre registre, l'article 15 du PLFSS a donné lieu à un tir de barrage préventif de trois secteurs dans le viseur du gouvernement (biologistes, radiologues, transports) exposés à des économies brutales sous forme de possibles baisses tarifaires (à défaut d’accord de maîtrise). Avant même l’examen du texte, plusieurs de leurs représentants se sont dits « insultés » par les projets de l’exécutif, dénonçant une atteinte grave au dialogue conventionnel.
Via un amendement gouvernemental, adopté ce vendredi, l'exécutif a en effet ajouté le champ des transports de patients en ambulance privée ou en taxi aux secteurs de la biologie médicale et de la radiologie pour lesquels le gouvernement exige des économies rapides. Dans ces secteurs dynamiques de plus en plus coûteux pour la Sécu, le gouvernement veut inciter, voire forcer, les représentants des professionnels à conclure rapidement un « accord de maîtrise des dépenses » pluriannuel avec l'Assurance maladie. Selon la version adoptée par le Sénat, en l'absence d'accord d'ici le 30 juin 2025 permettant d'économiser 300 millions d'euros dans le secteur de l'imagerie (sur les années 2025 à 2027) et 300 millions dans celui des transports sanitaires (pour la même période), le directeur de la Cnam pourra procéder unilatéralement à des baisses de tarifs. Il aura jusqu'au 31 juillet pour y procéder. La biologie n’est pas mentionnée.
Les trois professions souscrivent à la nécessité de maîtriser l’évolution des dépenses de santé. Mais, plaident-ils, cette régulation ne peut se faire qu’« au travers de l’amélioration de la pertinence » des prescriptions de transports, d'imagerie et d'analyses médicales.
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