L'Assemblée nationale a approuvé mardi la suppression, pour la rentrée 2020, du numerus clausus qui limitait depuis 1972 le nombre d'étudiants admis en deuxième année de médecine.
La mesure a été votée en première lecture par 74 parlementaires, recueillant 4 voix contre et 11 abstentions. Cette disposition emblématique du projet de loi Santé doit permettre d'« augmenter de 20 % à peu près le nombre de médecins formés » tout en diversifiant leurs profils, a affirmé la ministre de la Santé Agnès Buzyn. Les nouveaux critères de sélection et passerelles entre cursus doivent être précisés par décret.
Les effectifs d'étudiants en deuxième ou troisième années de médecine, mais aussi en dentaire, pharmacie et maïeutique (sage-femme), seront déterminés à l'avenir par les universités, en lien avec les agences régionales de santé, selon les capacités et les besoins du territoire.
Si la fin du numerus clausus a globalement fait consensus dans l'hémicycle, les oppositions ont souligné le caractère « flou » de sa mise en œuvre, à l'instar de Jean-Pierre Door (LR) et Caroline Fiat (LFI) qui se sont aussi interrogés sur la manière dont s'effectuerait la sélection des étudiants. Les débats sur ce sujet ont une nouvelle fois dérivé sur le thème de la démographie médicale, certains parlementaires, à l'instar de Thierry Benoit (UDI-Agir), demandant que la suppression du numerus clausus s'accompagne de la fin de la liberté d'installation des médecins.
Pas d'obligation de stage
L'Assemblée nationale a par ailleurs rétropédalé mardi à propos de l'idée d'un stage obligatoire en zone sous-dotée pour les étudiants en médecine, avant l'internat, qui avait été prévue en commission pour lutter contre les déserts médicaux.
Les députés ont adopté par 84 voix contre 39 un amendement du rapporteur Thomas Mesnier (LREM) supprimant cette disposition du projet de loi santé, alors que les mesures de coercition sont mal perçues dans la profession.
Elle prévoyait, pour accéder au troisième cycle des études de médecine, que les étudiants aient validé « un stage situé dans une zone caractérisée par une offre de soins insuffisante ou des difficultés dans l’accès aux soins ».
Thomas Mesnier a fait valoir dans l'hémicycle que l'objectif de la disposition paraissait « louable », mais a expliqué que ce serait « une difficulté majeure pour les étudiants » dans certaines zones peu dotées en maîtres de stage. La ministre de la Santé Agnès Buzyn a par ailleurs fait valoir que pour des étudiants de deuxième cycle qui « ont des heures de cours tous les après-midi, ça n'est pas possible techniquement ».
Audrey Dufeu-Schubert (LREM), qui avait porté l'idée en commission, a jugé « regrettable » cette suppression, plaidant qu'il fallait permettre aux étudiants de découvrir la médecine dans ces territoires, l'idée étant de les inciter à s'y installer.
La certification étendue à de nombreuses professions de santé
Dans la nuit de mardi à mercredi, l'Assemblée nationale a par ailleurs donné son feu vert au gouvernement pour prévoir par ordonnance une procédure de certification régulière des compétences et connaissances des médecins, infirmiers et encore pharmaciens.
Le texte ne prévoyait initialement que la certification des médecins, mais un amendement gouvernemental l'a étendue aux chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes et pédicures-podologues, des professions ayant « envie de s'engager » dans le processus selon la ministre.
La mesure est inspirée du rapport remis en novembre dernier par le professeur Serge Uzan, en réponse à une demande formulée en 2016 par l'Ordre des médecins.
« Nous proposons que pour les médecins déjà installés, la re-certification soit sur la base du volontariat », tandis qu'elle s'appliquera d'office aux futurs diplômés dans quelques années, a rappelé Mme Buzyn.
Ch.G. avec AFP
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