L’exercice regroupé gagne du terrain chez les médecins généralistes en France. En effet, d’après les données du quatrième Panel d’observation des pratiques et des conditions d’exercice en médecine générale*, publiée par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), en 2019 61 % des généralistes libéraux en France déclarent exercer en groupe. 32 % se trouvent dans des groupes monodisciplinaires et 29 % dans des pluriprofessionnels. Parmi les médecins exerçant en groupe pluriprofessionnel, la part de ceux exerçant en maisons de santé pluriprofessionnels (MSP) ayant signé l’ACI (accord conventionnel interprofessionnel) s’élève à 20 %, soit 6 % de l’ensemble des médecins généralistes libéraux.
Et l’exercice en groupe est amené à se poursuivre puisqu’il est largement plébiscité par les jeunes généralistes. D’après l’étude, les médecins qui exercent seuls ont en moyenne 58 ans et comptent 29 % de femmes, ceux en groupe pluriprofessionnel affichent une moyenne d’âge de 49 ans et sont à 43 % des femmes.
Un temps de travail pas forcément lié au modèle d'exercice
Les résultats du panel d’observation renseignent également sur les différences de rythme de travail entre généralistes. Les médecins qui exercent seuls déclarent en moyenne travailler deux heures de plus que ceux qui sont en groupe pluriprofessionnel (55,4 heures, contre 53,1 heures par semaine), et près de 5 heures de plus que les médecins en groupe monodisciplinaire (50,7 heures par semaine).
Quel que soit le type de territoire, les médecins en groupe monodisciplinaire ont presque toujours un volume horaire inférieur à la moyenne. En revanche, les médecins en groupe pluriprofessionnel dans les marges rurales et espaces urbains défavorisés consacrent deux à trois heures de plus à leur exercice que la moyenne nationale. Ce sont aussi les territoires où ce type d’exercice est le plus représenté.
Le type de territoire d’exercice a un impact important sur le temps de travail hebdomadaire. « Dans les territoires défavorisés en termes de ressources économiques et/ou médicales, le temps de travail hebdomadaire déclaré par les médecins généralistes est plus élevé par rapport à celui des médecins exerçant dans des villes-centres », souligne l’étude. Un impact qui se voit aussi sur le temps de consultation moyen, inférieur de deux minutes dans les espaces urbains défavorisés par rapport aux villes-centres.
D’après la Drees, « ces différences observées entre exercice seul et exercice en groupe pluriprofessionnel semblent davantage associées aux profils spécifiques des médecins qu’aux effets propres des modèles d’exercice ».
En effet, en tenant compte des caractéristiques individuelles et du lieu d’exercice la différence de temps de travail hebdomadaire est non significative entre ces deux groupes. « En revanche, travailler en groupe monodisciplinaire est associé à une réduction significative du volume horaire hebdomadaire de plus de 6 % (soit 3,2 heures par semaine) », ajoute les auteurs.
Quel que soit le modèle d’exercice, l’effet du sexe du médecin sur le temps de travail reste le plus important. Les femmes médecins généralistes déclarent travailler en moyenne plus de 5 heures de moins par semaine que leurs confrères, du fait d’un temps dédié aux activités libérales beaucoup plus faible (-4,5 heures).
Plus de congés et d'exercice mixte
Au-delà du temps de travail hebdomadaire, l’exercice en groupe permet aux médecins de prendre plus de congés que leurs confrères qui travaillent seuls. En moyenne, c’est une semaine supplémentaire pour les médecins en groupe monodisciplinaire et près de 0,7 semaine de plus pour ceux en pluriprofessionnel. « Ces écarts peuvent être liés au fait que l’exercice collectif facilite la gestion des absences ponctuelles et des congés annuels, grâce à la prise en charge des patients par des confrères ou des consœurs de la structure pendant les absences et/ou par mutualisation du recours aux remplaçants », note la Drees.
Mais davantage que sur le temps de travail, c’est sur la répartition entre activités libérales et activités secondaires que l’exercice pluriprofessionnel a un effet. Dans la population générale, 22 % des médecins ont une activité secondaire et y consacrent 8,9 heures en moyenne par semaine. Mais l’exercice mixte grimpe à 28 % chez les médecins en groupe pluriprofessionnel et 36 % chez ceux exerçant en MSP ACI, contre 21 % des médecins en groupe monodisciplinaire et 20 % des médecins exerçant seuls.
Ceux exerçant en groupe pluriprofessionnel déclarent consacrer près de 2,8 heures de moins par semaine pour leurs activités libérales et 1,4 heure de plus pour leurs activités secondaires comparativement aux médecins exerçant seuls. « Que ces médecins aient choisi un exercice regroupé pour mieux concilier leurs activités libérales et secondaires ou que leur choix d’une activité mixte soit la conséquence de celui-ci, la plus grande flexibilité liée à ce modèle d’exercice semble être associée au fait de s’investir davantage dans des activités secondaires », souligne les auteurs.
Enfin les médecins en groupe pluriprofessionnel sont à 27 % impliqués dans des projets territoriaux, comme des CPTS ou des ESP. C’est seulement le cas de 10 % de leurs confrères. Cette proportion grimpe à 67 % pour les médecins en MSP ACI. Un engagement qui a un impact sur le temps de travail hebdomadaire avec deux heures supplémentaires en moyenne.
*Réponses de 3 031 généralistes libéraux installés, ayant été déclarés comme médecin traitant par au moins 200 patients et sans modèle d’exercice particulier exclusif. Interrogés par téléphone entre octobre 2018 et février 2019.
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