La mobilisation du collectif « Médecins pour demain » et des syndicats de praticiens libéraux donne des idées à des confrères soucieux d'exprimer leurs ras-le-bol. C'est le cas du Dr Abdellah Ramdane, généraliste de 36 ans installé dans la petite commune de Caudry (59), qui a décidé de lancer une pétition pour peser, à son échelle, sur les négociations conventionnelles en cours avec la Cnam.
Intitulé « Amélioration ou expatriation. À vous de choisir M. le Ministre », ce court texte brandit la menace d'un départ des médecins de l'Hexagone pour un pays plus attractif, à défaut d’amélioration des conditions de travail et de rémunération des médecins libéraux.
Signée par une bonne centaine de médecins, la pétition réclame principalement une réduction de la charge administrative et une revalorisation du G « à la moyenne européenne » (hors forfaits). Les signataires contestent également les délégations de tâches aux professionnels non médecins qui participent au « démantèlement » de leur savoir-faire. Enfin, ils sont opposés à l'ajout d'une 4e année à l'internat de médecine générale, militant plutôt pour une baisse du temps hospitalier des internes.
La tentation du Canada ?
Sans avancées concrètes, la liste des signataires de la pétition sera transmise au « référent recrutement santé » au Canada, menace son auteur. Contacté par « Le Quotidien », le Dr Ramdane explique avoir commencé à réfléchir à la question de l'expatriation en échangeant avec des amis médecins partis exercer au Canada. Ceux-ci ont « une meilleure rémunération et une charge de travail inférieure » à leurs homologues français, croit-il savoir. C’est pourquoi il a souhaité savoir « si d’autres médecins étaient intéressés par un départ pour l’étranger ».
Le but de sa démarche n’est pas de pousser les médecins à quitter la France, assure-t-il, mais « d’améliorer nos conditions de travail et d’être rémunérés à notre juste valeur ». Et de souligner à nouveau la (sur)charge administrative « colossale » qui représente pour lui « deux heures de travail non rémunérées par jour ». Il milite pour un G à 45 euros « au minimum » pour dépasser la « moyenne européenne ».
Des médecins « très chauds pour partir »
Comme pour nombre de libéraux, l'augmentation des forfaits (Rosp, patientèle, structure) – environ 17 % de la rémunération globale des généralistes – est source de mécontentement. Le Dr Ramdane considère ainsi que « les critères de validation de ces forfaits sont de plus en plus tirés par les cheveux ». Selon lui, « les indicateurs de santé sont de moins en moins pris en compte, aux dépens de critères administratifs ou de réduction des dépenses ».
Le médecin assure que plusieurs confrères seraient déjà « très chauds pour partir ». « Si on n'obtient que des mesurettes, une dizaine de médecins installés dans des déserts médicaux pourraient quitter le territoire », met en garde le généraliste. Lui-même se pose la question du départ. « J’aime mon job, je suis patriote et je suis attaché à notre système de santé. Mais l’idée germe dans mon esprit. »
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