Tournan en brie (77)
Dr Pierre Bélieres
Comme chaque année au moment des fêtes de fin d’année, tous les gynécologues obstétriciens vont recevoir leur cadeau de Noël : je veux parler de leur prime d’assurance professionnelle.
En effet, nos chers assureurs déterminent le tarif des primes en fin d’année, vers le 25 décembre, à payer pour le début de l’année suivante (soit 6 jours plus tard).
Le montant moyen d’une prime d’assurance avoisine 25 000 euros par an environ ! Et va encore augmenter du fait de nouvelles clauses assurentielles…
Certes la nouvelle loi votée (le PFLSS 2012) a permis de boucler le problème des « trous de garantie », en particulier en augmentant les plafonds assurentiels pour les sinistres les plus élevés (de 3 millions à 8 millions d’euros) avec substitution d’un organisme d’État (l’ONIAM) au-delà, sans recours direct contre le praticien.
Mais cela aura inévitablement une répercussion sur la prime d’assurance au-delà des 10 % d’augmentation annuelle admis par les assureurs.
Bien sûr, les gynécologues vont répercuter l’augmentation de cette prime sur leurs patients, enfin je veux parler de ceux qui le peuvent (les médecins en secteur II)… Les praticiens en secteur I ne pourront pas effectuer ce prélèvement sur leur patientèle et devront se « serrer la ceinture ».
Je travaille actuellement au sein d’une structure où les praticiens qui exercent sont dans les différents secteurs d’activités(I ou II).
Comment se fait-t-il que les différents partenaires syndicaux, les mutuelles, la CNAM n’aient pas pu trouver un consensus acceptable pour le nouveau « secteur optionnel » ? Comment est-t-il possible que ce secteur ne soit ouvert qu’aux seuls médecins exerçant actuellement en secteur II et non aux médecins exerçant en secteur I, alors que ce secteur leur permettrait de travailler plus sereinement.
Pourra-t-on un jour expliquer aux patients que les dépassements d’honoraires pratiqués avec « tact et mesure » ne servent pas uniquement qu’à « engraisser » leurs médecins ?
« Le monde est les temps changent »
Saint-Léger du Bourg-Denis (76)
Dr Michel Lenois
À la fin de la consultation, quand vient le moment de payer, nous entendons : « C’est combien ? » Quelques patients lancent : « Je vous dois ? », ou bien encore, se croyant dans une épicerie : « Ça nous fera ? » Passons sur : « Ma maman (ou mon papa) passera payer… »
Combien de fois ai-je rêvé que j’étais salarié, que je n’avais plus besoin de garder la monnaie dans un tiroir. Rêvé que je ne faisais plus des comptes et de la gestion mais de la médecine, et uniquement de la médecine. Combien de fois j’ai espéré ne travailler que 35 heures par semaine comme tout le monde, avec le droit de m’arrêter quelques jours quand je suis malade ou à bout, comme tout le monde. Bref, vivre normalement…
Les dinosaures accrochés à la course aux actes et à leur chiffre d’affaires n’aimeront pas ce courrier. Ils devraient se poser une question : pourquoi les médecins nouvellement formés ne sont-ils que 7 % à vouloir s’installer en libéral ? Comme le dit une chanson : « Le monde et les temps changent »…
Un Kebab dans mon cabinet
Bordeaux (33)
Dr Marc Gutierrez
À la veille de prendre ma retraite, je me pose la question existentielle, comme beaucoup de mes confrères médecins : que vais-je faire de mon cabinet ?
Vus les revenus confortables qu’il me procure et le prix que je suis susceptible d’en demander, je comprends que beaucoup de jeunes confrères hésitent, car comme on dit dans le milieu de l’automobile : vu le prix si bas, il doit y avoir un vice caché !
De plus, notre activité devient de moins en moins motivante. Une garde de secteur annuelle, pas de visites de nuit, assurées par SOS Médecins, et, comble de malchance, un cabinet situé à un jet de seringue du CHU de Bordeaux. Décemment, je ne peux demander de délocaliser l’hôpital dans une zone insalubre, en périphérie, comme on va le faire bientôt pour notre stade Chaban-Delmas.
Et pourtant, nos syndicalistes font tout pour nous aider. Une CARMF sauvée grâce à une augmentation prohibitive des cotisations avec une baisse des retraites à venir, faisant de nous un exemple de solidarité nationale voire mondiale. Je ne parle pas des 90 jours de carence en cas de maladie ou d’accident, ni des avantages sociaux en cas de grossesse pour nos consœurs. À cœur vaillant, rien d’impossible !
Une lueur d’espoir cependant. Vu l’emplacement exceptionnel de mes locaux, dans un quartier convivial, bien desservi par des crèches, des écoles et des commerces de proximité, avec un pouvoir d’achat conservé, comme me dit ma voisine futée et avisée : « Pourquoi, Docteur, ne pas en faire un "Kebab" ? »
Comment attirer les jeunes en milieu rural ?
Banyuls-sur-Mer (66)
Dr Pierre Frances
La désaffection des jeunes pour le milieu rural est une réalité que nos politiciens ont bien du mal à comprendre.
Cependant, ce choix des jeunes se comprend :
- Du fait des tracasseries administratives auxquelles nous sommes journellement exposés : les dossiers COTOREP ou APA qui pour 50 % sont tout à fait inutiles, mais que nous remplissons du fait de demandes expresses d’assistantes sociales ou de voisins bien intentionnés, les protocoles d’exonération qu’il faut refaire lorsque le patient change de caisse…
- Du fait de l’incertitude quant à la pérennité de notre système de retraite, et des relances intempestives des caisses pour les prescriptions d’arrêts de travail, d’antibiotiques…
- Du fait de l’isolement total au niveau des formations, et de la communication avec d’autres jeunes. À ce titre, je suis maître de stage depuis cinq ans, et même en proposant de loger gratuitement un stagiaire, je reste seul. Cette situation, les futurs généralistes ne veulent pas la vivre, raison de ce choix délibéré.
Aussi, avant d’augmenter le numerus clausus, nous devons rendre la médecine libérale attractive, et limiter les paperasses, éviter les brimades des caisses, et favoriser le dialogue avec les jeunes générations qui ne connaissent pas le milieu rural en y donnant une priorité aux stages.
En continuant de résonner comme des technocrates, nous devrons faire face à une situation ingérable dans les campagnes ; mais il est peut-être déjà trop tard.
Un médecin, peu importe sa nationalité, est un bien précieux
Saint-Mesmin (85)
Dr Georgeta Virtopeanu
Voici ma réponse à la lettre du Dr Christian Bizot, parue dans « le Quotidien du Médecin » du 23 novembre 2011 :
Je suis médecin roumain femme et je travaille en France depuis mars 2008, en tant que généraliste en libéral. Depuis novembre 2008 j’exerce mon activité à Saint-Mesmin en Vendée (à 15 kilomètres du cabinet du Dr Bizot). Je suis la première arrivée dans le canton de Pouzauges (peut-être même en Vendée) et j’ai bénéficié d’un très bon accueil de la part de mes confrères. J’ai intégré le groupe de pairs existant et avec deux autres collègues français, nous avons un projet d’installation en cabinet de groupe pour mieux répondre à la permanence des soins et pour pouvoir accueillir des jeunes médecins dans les conditions qu’ils cherchent (cabinet de groupe informatisé avec partage des dossiers).
C’est vrai que depuis 2008, le nombre des médecins roumains en Vendée a augmenté considérablement : nous sommes 3 seulement dans le canton de Pouzauges. Mais d’ici à « envahir » ( « se répandre en grand nombre de manière excessive ou gênante », selon Le Robert ), il y a de la marge…
Comment peut-on gêner quand on assure nos consultations et que l’on participe aussi à la permanence des soins ? Surtout qu’on ne prend pas la place de quelqu’un : il y a un réelle manque des médecins en médecine rurale en Vendée.
Quant au niveau de compétence que Dr Bizot met en doute, moi, je tiens à ce que le mien soit respecté comme je respecte aussi le travail de tous mes collègues. Surtout qu’il n’y a pas des différences au moins dans la durée des études (mon parcours : admission à la Faculté de Médecine de Bucarest après un concours très difficile – 1 candidat admis sur 10 ; 6 ans de faculté ; 3 ans de spécialité en médecine générale).
Je ne comprends non plus les propos par rapport à la maîtrise de la langue française, quand nous passons tous par l’interview au conseil de l’Ordre avant de recevoir l’inscription. Si on doute de tout, si on ne voit que les défauts des autres, c’est sûr qu’on ne va pas aller loin.
Pourquoi personne ne parle des qualités des médecins roumains (je suis sûre qu’il y en a).
En tout cas, pour moi, un médecin est un bien précieux (peut importe sa nationalité), vu le manque de praticiens enregistré partout à travers le monde. Comment peut-on surmonter les années d’étude, les examens difficiles, les responsabilités des tous les jours sans avoir une réelle vocation ? La vocation est l’emblème de ce métier est cela doit rester comme ça. Quoi qu’il en soit, tout médecin est perfectible.
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