« Saint Laurent », « Leviathan »…

Le lyrisme de la destruction

Publié le 25/09/2014
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Crédit photo : DR

Cinéma

Contrairement au « Yves Saint Laurent » de Jalil Lespert avec Pierre Niney, sorti au début de l’année, le film de Bertrand Bonello n’a pas eu l’aval de Pierre Bergé, ce qui a posé des problèmes pratiques (les robes, les décors, notamment), mais donné au réalisateur de « l’Apollonide » toute la liberté dont il n’aurait pas entendu se passer.

Bonello, qui voit le couturier comme « un personnage romanesque assez dingue », a choisi d’évoquer la décennie 1967-1976, celle des grandes créations et de la conquête de la marque YSL, celle des folles nuits et des addictions. Pendant deux heures et demi, il mêle avec audace, dans un mouvement quasi incessant, les ombres de la vie privée, dépression, drogues, excès en tout genre, et la lumière des succès professionnels, ces modèles éblouissants d’élégance noir et blanc ou de couleurs.

Pour autant, ce portrait n’est pas aussi sulfureux qu’on aurait pu l’espérer – ou le redouter –. C’est le rythme du film qui convainc, l’union des images et des musiques, la passion du cinéaste pour la flamboyance de son sujet. Une flamboyance que rend bien Gaspard Ulliel. Il incarne sans faillir, avec séduction et intériorité, un homme dont deux biographies filmées n’épuisent pas la complexité.

« Leviathan », du Russe Andreï Zviaguintsev, récompensé à Cannes par le prix du scénario, a des références haut placées, rien moins que « le Livre de Job » et le « Leviathan » de Thomas Hobbes ! En images, cela donne, dans les beautés rudes des bords de la mer de Barents, la tragédie d’un homme qui sera détruit par un système corrompu. La fin de ce portrait effrayant du pays de Poutine s’étire inutilement mais le récit est prenant, la mise en scène ample et les acteurs jouent avec autant d’ardeur que leurs personnages boivent. La métaphore est parlante et comment résister à ce lyrisme russe ?

Les autres films de la semaine

Dans « Elle l’adore », première réalisation de Jeanne Herry (fille de Miou-Miou et de Julien Clerc), Sandrine Kiberlain est une esthéticienne mythomane qui croise le chemin de son idole, un chanteur (Laurent Lafitte) ; il y a aussi un cadavre mais c’est une comédie. Pour rire, aussi, dans un tout autre genre, les « Brèves de comptoir » de Jean-Marie Gourio, portées à l’écran, après les planches, par Jean-Michel Ribes, avec 75 comédiens, parmi lesquels François Morel, Yolande Moreau, André Dussollier.

Nicole Kidman est mariée avec Colin Firth et amnésique dans « Avant d’aller dormir », de Rowan Joffe, d’après le thriller best-seller de S. J. Watson. Chadwick Boseman joue et chante pour incarner James Brown, le « parrain de la soul », dans « Get on Up », de Tate Taylor (« la Couleur des sentiments »). Daniel Radcliffe, ex-Harry Potter, se réveille avec des cornes sur la tête dans « Horns », d’Alexandre Aja. Stellan Skarsgard et Bruno Ganz sont gelés dans « Refroidis », polar norvégien semé de cadavres.

Les amoureux des animaux de tous âges (à partir de 8 ans) retrouveront dans un deuxième opus Winter le dauphin et ceux qui l’ont sauvé et doté d’une queue artificielle. « L’Incroyable Histoire de Winter le dauphin 2 » s’inspire également de faits réels, avec l’arrivée d’un jeune dauphin que l’on nommera Hope. Tout n’est pas rose dans ce récit puisqu’il est aussi question de mort et de handicap, mais c’est bien sûr la vie qui triomphe. Si les personnages humains, aussi attachants soient-ils, apparaissent convenus, les animaux sont très convaincants, les dauphins comme le pélican ou la tortue marine.

Signalons enfin « Flore », un documentaire qui se veut un « témoignage gai et optimiste » sur la maladie d’Alzheimer, selon son réalisateur, Jean-Albert Lièvre : il a sorti sa mère malade de l’établissement spécialisé où elle déclinait pour l’amener en Corse, dans la maison familiale réaménagée, où, avec le concours d’une équipe d’aidants, elle a retrouvé un certain goût de vivre.

Renée Carton

Source : Le Quotidien du Médecin: 9351