« Pas son genre », de Lucas Belvaux

Un couple épatant

Publié le 02/05/2014
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Crédit photo : D. KOSKAS/AGAT FILMS

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Crédit photo : D. KOSKAS/AGATE FILMS

Cinéma

« Dire que j’ai gâché des années de ma vie, que j’ai voulu mourir, que j’ai eu mon plus grand amour, pour une femme qui ne me plaisait pas, qui n’était pas mon genre ! » Difficile d’oublier Marcel Proust et son « Amour de Swann » avec le titre du 9e film de Lucas Belvaux. D’ailleurs, Proust est l’un des auteurs cités par son héros, un intellectuel très parisien, professeur de philosophie et théoricien de l’amour, désespéré lorsqu’il est muté pour un an à Arras. Il y rencontrera une jeune femme qui n’est pas du tout son genre, coiffeuse de son état et contente de l’être.

Lucas Belvaux a adapté le roman publié en 2011 par Philippe Vilain. Mais alors que le livre est un récit à la première personne, il choisit de mettre à égalité les deux protagonistes, car, dit-il, « malgré leurs différences, je suis aussi proche d’elle que de lui ». Ainsi n’a-t-on pas envie de prendre partie et peut-on rêver par moments que le couple a un avenir, voire que l’on frôle la comédie romantique.

Car l’aptitude au bonheur de l’énergique Jennifer est attendrissante et communicative tandis que Clément semble baisser les barrières, culturelles et intimes, qui l’empêchent de s’engager. Mais, heureusement pour l’intérêt cinéphilique, ce n’est pas aussi simple et le réalisateur sait manier la psychologie de ses personnages pour les emmener là où le spectateur ne les attend pas.

Malgré quelques clichés, ici sur les milieux branchés parisiens, là sur les manières provinciales (celles du Nord plus particulièrement), Lucas Belvaux évite la caricature qui aurait pu faire pencher son film du côté des comédies franchouillardes. Et ses dialogues parviennent à évoquer Kant, Dostoïevski ou Balzac sans perdre leur naturel.

C’est aussi que le cinéaste a bien choisi ses interprètes. Loïc Corbery, de la Comédie-Française, séduisant et à l’aise. Et surtout Émilie Dequenne, rayonnante, énergique, déchaînée quand il le faut, mais aussi profonde et émouvante. Comme le film.

Et aussi cette semaine

Dans « 24 Jours », Alexandre Arcady fait revivre l’affaire Ilan Halimi en s’inspirant du livre de la mère de ce dernier, incarnée par Zbou Breitman ; un « thriller » vu du côté des victimes. Dans « les Femmes de Visegrad », docu-fiction de Jasmila Zbanic, une touriste australienne (Kym Vercoe, qui revit sa propre histoire) découvre le drame des femmes musulmanes violées pendant le conflit en Bosnie-Herzégovine.

Et encore « le Dernier Diamant », film de braquage d’Éric Barbier avec Bérénice Bejo et Yvan Attal ; « Joe », de David Gordon Green, avec Nicolas Cage en ex-taulard qui tente d’aider un adolescent maltraité ; et « Last Days of Summer », de Jason Reitman, avec Kate Winslet et Josh Brolin (une femme seule avec son fils, un condamné pour meurtre évadé).

Renée Carton

Source : Le Quotidien du Médecin: 9323