THEATRE - « L’Opéra de Quat’sous », de Bertolt Brecht

Une fête grinçante et réjouissante

Publié le 13/04/2011
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Crédit photo : B. ENGUÉRAND

L’OPÉRA de Quat’sous entre au répertoire de la Comédie-Française et l’on prend la mesure du talent éblouissant des comédiens. Lorsqu’en 1928, Bertolt Brecht et Kurt Weill s’enfermèrent au… Lavandou pour écrire cette transposition de « l’Opéra des Gueux » de John Gay (1728), sous le titre « Racaille », ils avaient en tête des comédiens qui savaient chanter et non des acteurs.

Laurent Pelly, pour sa première mise en scène au Français, a rassemblé un bouquet chatoyant de talents remarquables. Il y a ceux ou celles qui ont des voix de chanteurs professionnels, comme Véronique Vella (Madame Peachum), Sylvia Bergé (Jenny) ou Serge Bagdassarian (le Pasteur). On peut classer ici, elle est éblouissante, Léonie Simaga (Polly). Il y a ceux qui ont travaillé, savent très bien chanter et donner à la difficile musique de Weill ses justes couleurs : Thierry Hancisse (Mackie), Bruno Rafafelli (Peachum), Laurent Natrella (Tiger Brown), Marie-Sophie Ferdane, la Polly d’une autre production, qui joue ici, avec brio et malice, sa rivale Lucy.

Il faudrait citer chacun. Il y a dans ce spectacle la joie du partage, du travail. Le propos de Laurent Pelly ne va pas à la joliesse. Il préfère nous montrer la noirceur, l’acidité de l’ouvrage qui nous parle immédiatement, aujourd’hui. La grande cage de scène est à nu, les changements se font devant nos yeux en un ballet étourdissant. On n’oublie jamais le cruel théâtre du monde politico-financier, dans un Londres qui ressemble à Chicago. Et tout se passe aujourd’hui.

On écoute avec attention le texte, dans la traduction de Jean-Claude Hémery revue en partie par Michel Bataillon. Tout est donné en français, chansons comprises.

Dans la fosse, 13 musiciens sous la baguette de Bruno Fontaine rendent encore plus éclatante la magnifique composition d e Kurt Weill. Un grand spectacle, à voir absolument !

Comédie-Française, salle Richelieu (tél. 0825.10.16.80), en alternance jusqu’au 19 juillet. Durée : 3 h 10, entracte compris. Texte de la traduction publié à L’Arche, 10 euros.

ARMELLE HÉLIOT

Source : Le Quotidien du Médecin: 8943