Idées
On doit au penseur Norbert Elias l’idée d’un « procès de la civilisation », hérité des manières de la Cour. De manière générale, le terme de civilisation désigne la douce amélioration due au progrès des arts et des sciences, des mœurs et des coutumes.
La période moderne voit ceci voler en éclats. D’abord il n’est pas sûr que les pratiques de la Cour se soient étendues à la Révolution française. Les classes dirigeantes ne sont pas nécessairement policées et raffinées (on pense à « Ridicule », le film de Patrice Leconte). Par ailleurs, les horreurs des totalitarismes du XXe siècle ont fait justice d’une civilisation dans laquelle Sigmund Freud avait très tôt discerné un malaise. Peu à peu s’est imposé le doux mot de civilité, qui désigne le souci de l’Autre en général et connaît un paradoxal regain de faveur par son contraire. Notre époque voit se multiplier les « incivilités ». Le mot politesse, enfin, désigne au XVIIIe siècle un comportement aristocratique qui suppose de maîtriser déjà la civilité. Très vite, La Bruyère y voit hypocrisie et simagrées.
Mais la grande rupture épistémologique vient, comme souvent, de Jean-Jacques Rousseau. Dans « le Discours sur les sciences et les arts », il nie l’idée de progrès du genre humain et, comme le résume Philippe Raynaud, « là où la majorité des philosophes voient dans la conversation des salons et des cafés le terreau naturel du progrès (...) Rousseau dénonce la corruption de la philosophie par une virtuosité purement sociale dans laquelle le brillant de l’esprit masque l’indifférence à la vérité ».
Car là est bien le cœur du sujet. Peut-on réduire civilité et politesse à l’hypocrisie ou à la domination sociale ? Ne contient-elle pas une vérité ? Celle qui permet de prendre, comme les porcs-épics de Schopenhauer, la bonne distance avec autrui.
« La Politesse des Lumières - Les lois, les mœurs, les manières », L’Esprit de la cité/Gallimard, 294 p., 23 euros.
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