« Heli », d’Amat Escalante

Vivre avec la peur

Publié le 10/04/2014
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Cinéma

Un homme pendu au-dessus d’un pont. C’est la première séquence du film et une image « très commune au Mexique », selon Amat Escalante. « Derrière chaque image comme celle-ci, ajoute-t-il, il y a du drame humain, des innocents victimes d’une violence aveugle. Une histoire qu’il faut raconter, sinon les gens se rassureront toujours en pensant que l’homme pendu au-dessus de ce pont le méritait. »

Dans une ville à quelques heures de Mexico, une famille pauvre, entassée dans l’une de ces habitations plus que modestes bâties à la hâte pour abriter les ouvriers embauchés dans la nouvelle usine automobile de General Motors. Il y a le père, le frère aîné (c’est lui qui s’appelle Heli), marié avec un bébé, et Estela, la cadette. Elle n’a que 12 ans mais tombe amoureuse d’un garçon de 17 ans, un policier qui, pour arrondir les fins de mois, participe à un détournement de drogue. Les trafiquants veulent récupérer le produit, la violence se déchaîne. Et quelle violence ! Il y a en particulier une terrifiante scène de torture, à laquelle assistent - et même participent pour certains - des enfants.

Le réalisateur-scénariste veut montrer que, dans son pays, « la violence est une réalité de chaque instant », même si on n’est pas directement concerné, et que tout le monde vit dans un climat de peur permanente. Il y réussit très bien, car comment ne pas frémir pour cette petite fille que l’amour entraîne côté adulte mais qui ne comprend pas trop ce qui se passe. La violence est au cœur du film, certes, mais ce dernier est centré autant sur le vécu des personnages, leur psychologie, que sur l’action. Et la réussite d’Amat Escalante tient aussi, par voie de conséquence, au choix des interprètes, tous nouveaux venus au cinéma, à l’exception du père.

Renée Carton
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Source : Le Quotidien du Médecin: 9317