À chaque âge sa fragilité. Si la femme connaît au cours de sa vie des périodes biologiques et hormonales bien distinctes qui impactent sa santé, le constat est moins marqué pour l’homme. Pour autant, la santé masculine n’échappe pas à la logique de l’âge. Avec, pour chaque pathologie, des périodes à risque et des moments clés pour la prévention, le dépistage et le traitement. Et, dans certains cas, des points de bascule à ne pas manquer.
En matière de santé masculine, la cinquantaine est souvent considérée comme la période charnière. Mais la prévention commence bien en amont et se poursuit bien au-delà. Chez le tout jeune homme, la protection à l’égard des IST et le repérage d’éventuelle conduite addictive sont des enjeux majeurs. Plus tard, la prévention cardio-vasculaire et le spectre du cancer prennent le pas.
→ Dès 15 ans : la question des addictions Selon la Société française d’alcoologie (SFA), ados, jeunes adultes et fumeurs sont « à haut risque de boire en excès » et le mésusage doit être repéré à chaque contact avec un professionnel de santé. 12 % des cancers de l’homme sont liés à l’alcool (2e cause après le tabac). À partir des données des ventes de 2012, l’INCa calculait que les hommes de plus de 15 ans buvaient en moyenne 4 unités d’alcool par jour ! Plus généralement,
« l’adolescence constitue une période de forte vulnérabilité à l’expérimentation et à la poursuite de la consommation de tabac, cannabis voire d’autres substances psycoactives », souligne la SFA.
→ 17 ans : entrée dans la sexualité et émergence des IST En 2010, l’âge médian du premier rapport sexuel des garçons était de 17,1 ans. Le préservatif a été utilisé dans 90 % des « premières fois ». La problématique des IST émerge donc. La sérologie VIH doit être réalisée à chaque changement de partenaire ; la sérologie VHB (si non vacciné) et VHC au moins une fois dans la vie.
→ 18 ans : majeur et éduqué ! Dès cet âge, l’accent doit être mis sur l’éducation à la santé en insistant notamment sur l’importance de l’activité physique. L’OMS recommande au moins, au cours de la semaine, 150 mn d’activité d’endurance d’intensité modérée ou 75 mn d’endurance d’intensité soutenue ou une combinaison équivalente des deux.
→ 25 ans : 1er rendez-vous vaccinal systématique de l’adulte Depuis 2013, le calendrier vaccinal propose des rendez-vous vaccinaux à âge fixe pour l’adulte (lire p. 17). À 25 ans, un vaccin dTcaP est préconisé. .
→ 34 ans : sevrage tabagique toute L’arrêt du tabagisme avant 34 ans permet de retrouver l’espérance de vie d’un non-fumeur. Un fumeur qui arrête son tabagisme entre 35 et 44 ans récupère 9 années d’espérance de vie (puis 6 ans en cas d’arrêt entre 45 et 54 ans et 4 ans en cas d’arrêt entre 55 et 64 ans). Le tabac, première cause de mortalité prématurée en Europe, tue 50 % de ceux qui en consomment, dont la moitié avant 65 ans.
→ 40 ans : 1re évaluation systématique du risque CV Il est recommandé d’évaluer le risque CV en prévention primaire à l’aide de l’outil SCORE. Celui-ci évalue le risque de mortalité CV à 10 ans, en fonction du sexe, de l’âge (entre 40 et 65 ans), du tabagisme, de la pression artérielle systolique et des concentrations de cholestérol total. Si l’exploration lipidique initiale est normale, la HAS propose de la refaire tous les 5 ans.
→ La dysfonction érectile, symptôme sentinelle À partir de cet âge, jusqu’à un homme sur trois est concerné par la dysfonction érectile (DE). Cette dernière peut être le symptôme sentinelle d’une coronaropathie qui deviendra symptomatique 3-4 ans plus tard en moyenne. La DE doit aussi faire rechercher un diabète et des symptômes anxio-dépressifs. La DE est aussi utile à dépister car elle est un facteur d’inobservance thérapeutique (antihypertenseurs, psychotropes, hypolipémiants, antidiabétiques).
→ 45 ans : vaccins et glycémie à jeun En cas de facteur de risque de diabète (IMC ≥ 28, sédentarité, antécédent familial, traitement altérant la glycorégulation), HTA, dyslipidémie, précarité : c’est le moment de prescrire une glycémie à jeun. Si elle est < 1,10 g/l, il faudra la surveiller tous les 1 à 3 ans. Si ≥ 1,10 : à refaire 1 an plus tard.
Un vaccin dTP est recommandé chez tous les adultes de 45 ans (ou dTcaP, en stratégie du « cocooning », pour les personnes susceptibles d’être en contact étroit avec un nourrisson au cours de ses six premiers mois).
→ 50 ans : l'heure du dépistage La cinquantaine marque le début du dépistage organisé du cancer colorectal avec recherche de sang dans les selles par tests immunologiques tous les 2 ans jusqu’à 74 ans. Ce cancer touche 4 hommes sur 100 (2e cause de décès par cancer en France) et 95 % des cas sont diagnostiqués après 50 ans.
Informer aussi sur le dépistage individuel éventuel du cancer prostatique par PSA et toucher rectal. Les 2/3 surviennent après 65 ans. C’est le cancer le plus fréquent de l’homme mais il ne représente « que » 10 % des décès par cancer.
→ Plus de la moitié des cinquantenaires sont hypertendus. 20 % des hypertendus connus ne sont pas traités et 50 % des hypertendus traités ne sont pas contrôlés.
→ 60 ans : focus sur la fonction rénale Évaluer le débit de filtration glomérulaire tous les ans à partir de 60 ans (ou avant en cas de risque de néphropathie : diabète, HTA, obésité, athérome, maladie auto-immune, néphrotoxiques, antécédents familiaux…). Pour cela, prescrire impérativement créatininémie + albuminurie/créatininurie (sur échantillon, à tout moment de la journée). Le dosage de l’urée n’est pas nécessaire. Après 40 ans, le déclin annuel « physiologique » du DFG est < 2 ml/min/1,73 m²/an.
→ 61 ans : attention aux coronaires ! 61 ans est l’âge médian des syndromes coronariens aigus ST+ chez l’homme. Pour les AVC, l’âge moyen est de 70 ans.
→ 62,6 ans : c’est « l’espérance de vie en bonne santé » des hommes
→ 65 ans : coup d’accélérateur sur la vaccination L’âge de 65 ans correspond au troisième rendez vous vaccinal systématique de l’adulte (vaccin dTPolio ou dTcaPolio dans la stratégie du cocooning). Ultérieurement, ce vaccin devra être répété tous les 10 ans au lieu de 20 ans. Également, début de la vaccination antigrippale annuelle, et de la vaccination anti-zona (une injection unique recommandée entre 65 et 74 ans).
→ Sur le plan cardio-vasculaire, dépistage ciblé opportuniste unique (= une seule fois) de l’anévrysme de l’aorte abdominale par écho-Doppler chez les fumeurs (à partir d’une cigarette par jour) ou fumeurs sevrés depuis moins de 20 ans.
Les apports recommandés en calcium augmentent de 900 à 1 200 mg/j.
→ 68 ans, le spectre des cancers Chez l’homme, l’âge médian au diagnostic de cancers est de 68 ans (66 pour les cancers bronchopulmonaires ; 63 pour les voies aérodigestives. 71 pour le cancer colorectal et 70 pour la prostate). L’âge médian de décès par cancer est de 73 ans.
→ 79,4 ans : c’est l’espérance de vie des hommes
→ 80 ans : entre nécessité et iatrogénie Plus de 70 % des hommes sont hypertendus. Le traitement médicamenteux reste bénéfique mais l’objectif thérapeutique change : pression artérielle systolique< 150 mmHg, sans hypotension orthostatique et sans dépasser plus de trois anti-hypertenseurs.
Les patients entre 80 et 90 ans reçoivent en moyenne 9,6 médicaments/jour. Au-delà de 4 médicaments/jour, le risque de chute est doublé et le risque d’effet indésirable est triplé voire quadruplé. 20 % des hospitalisations des plus de 80 ans sont liées à un médicament.