Le Dr Fabien Bonnefoy qui a exercé en Ile-de-France durant presque vingt années, est parti travailler au Canada il y a cinq ans. Pour y parvenir, les démarches ont été longues et compliquées. Mais une fois les barrières administratives franchies, ce médecin généraliste de 48 ans a été particulièrement bien accueilli par ses « cousins » et confrères québécois. Il s’est installé avec sa femme et ses deux enfants à Sorel-Tracy, ville de 35 000 habitants, située à une grosse heure de Montréal. Toute la famille s’est vite intégrée, à tel point que sa fille a adopté l’accent de là-bas !
Pourquoi avoir quitté la France il y a cinq ans ?
Dr Fabien Bonnefoy : Ma femme et moi avions envie d’autre chose. Après être allés plusieurs fois en vacances sur le continent nord-américain, nous avons été conquis par la façon de vivre au Québec. Un autre facteur déterminant était lié à mon activité professionnelle parisienne très prenante. Je rentrais souvent tard chez moi, entre 10 et 11 heures du soir. Et un lundi matin, une sorte d’électrochoc fut décisif. En posant mes enfants à l’école, l’un d’eux me dit « à jeudi soir papa ! ». J’ai alors compris que je devais changer de vie. L’aspect financier n’a pas joué, car je gagnais bien ma vie quand j’étais installé en France.
Quelles ont été les principales démarches à effectuer ?
Dr F. B. : Elles ont été lourdes et ont pris deux ans. Cela a commencé par la nécessité de récupérer toutes les notes de mes études médicales de la première année jusqu’à l’internat, de rédiger une lettre de motivation, de collecter trois lettres de recommandation de collègues médecins, un certificat de l’Ordre des médecins attestant de l’absence de sanction, etc. Une fois le dossier accepté par l’administration canadienne, c’était à moi de trouver mon poste au Québec. J’ai fait ces démarches par mail, puis le directeur de l’hôpital de Sorel-Tracy, intéressé par ma candidature m’a téléphoné. Il a aussi discuté avec ma femme pour parler de notre projet, s’assurer que toute la famille était partante. Une semaine plus tard, nous sommes partis au Québec avec nos enfants, tous les frais dont les vols en avion ont été payés par l’hôpital. J’ai alors rencontré les médecins avec qui j’allais travailler et le directeur de l’hôpital au cours d’un déjeuner informel. De son côté, le directeur de l’hôpital devait prouver à l’administration sanitaire du Québec que le poste qui m’était proposé, n’intéressait aucun médecin canadien, le pays jouant la préférence nationale.
De retour en France, nous avons décidé de vendre nos biens, après avoir simplement reçu un accord par mail, mais sans contrat ferme en poche. Et surtout sans avoir effectué en amont mon stage de 3 mois au Canada qui, s’il n’est pas validé, empêche de s’installer au Québec.
En quoi consiste ce stage à effectuer avant de pouvoir s’installer ?
Dr F. B. : Il doit être effectué dans un endroit autre où il est prévu que le médecin s’installe. Il est déterminant pour la suite. A ce moment-là, j’apprends qu’environ 30 % des médecins généralistes échouent. Personnellement, je l’ai effectué à environ 500 km au nord-est de Montréal (au Lac-Saint-Jean), dans un hôpital où l’on me demandait d’assurer les urgences, les hospitalisations et l’exercice en cabinet. Cela faisait 20 ans que je ne faisais plus vraiment d’urgence, ni d’hospitalisation. J’ai donc pas mal bûché dans des bouquins, en retravaillant sur le livre de médecine interne québécoise. J’avoue que les premiers jours de stage ont été très stressants. Heureusement, ma famille était avec moi et m’a soutenu. J’ai eu aussi un très bon accueil des soignants et du directeur de l’hôpital. Il est important d’avoir une bonne capacité d’adaptation, de bien échanger avec le personnel soignant, et d’avoir l’envie d’apprendre. Il faut également se familiariser avec les médicaments prescrits au Québec.
De façon concrète, aujourd’hui comment se passe votre pratique ?
Dr F. B. : Je fais de la médecine générale avec beaucoup de gérontologie comprenant pas mal de visites à domicile pour des personnes en perte d’autonomie. La manière de pratiquer est parfois différente de ce que l’on connaît en France, avec en particulier plus d’échanges entre les différents professionnels de santé : pharmaciens, infirmiers, etc. On est plus dans un travail d’équipe avec moins de hiérarchie. On échange beaucoup par téléphone, et le soir je rentre chez moi plus tôt que lorsque j’étais à Paris.
Quand je travaille pour l’hôpital, je suis payé à l’acte. Quand j’effectue des visites à domicile pour un dispensaire qui couvre toute une région, je suis payé en mixte associant acte et temps passé.
Une chose est certaine, je me plais beaucoup au Québec, et pour l’heure je n’ai pas l’intention de revenir en France.
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