L’ÉTUDE NORD-AMÉRICAINE NLST a démontré l’avantage du scanner « bas débit » par rapport à une radiographie thoracique simple dans le cadre du dépistage du cancer bronchopulmonaire : diminution de la mortalité spécifique (20 %) et de la mortalité toutes causes confondues (6 %) (1). Cette étude randomisée de grande envergure, menée entre 2002 et 2007, comportait 26 000 individus par bras, âgés de 55 à 74 ans, fumeurs ayant consommé au moins 30 paquets/année ou ancien fumeur à condition d’avoir arrêté depuis moins de 15 ans.
« Cette étude est positive sur le plan scientifique, reste à savoir comment adapter le dépistage par scanner bas débit à l’échelon collectif (décision de société) ou individuel (décision du médecin en face de son malade), souligne le Pr Fabrice Barlesi. Le dépistage du cancer du poumon ne peut se faire que sur une base de réflexion mutuelle ».
C’est ainsi qu’un groupe d’experts de l’Intergroupe francophone de cancérologie thoracique (IFCT) et du Groupe d’oncologie de langue française (GOLF) a envisagé les différents items à prendre en compte pour établir une conduite pratique (2). Premier point : l’âge de la population dépistée dans l’étude (de 55 à 74 ans). Les sujets doivent être des fumeurs (au moins 30 paquets/année) ou des anciens fumeurs (arrêt depuis moins de 15 ans) ; sans pathologie active risquant de limiter les possibilités de traitement et sans infection pulmonaire dans les trois mois précédant l’examen, les risques de faux positifs étant alors trop élevés. Les individus bénéficiant du dépistage doivent être conscients que son impact sur la mortalité n’a d’intérêt que s’il est répété chaque année. Enfin, ils doivent absolument entrer dans un programme de sevrage tabagique. « L’information délivrée est essentielle, insiste F Barlesi. Il faut prévenir les personnes qui répondent aux modalités de l’étude NLST qu’une anomalie, majoritairement bénigne va être retrouvée au scanner dans 20 à 40 % des cas ». La question sera de savoir si cette anomalie radiologique justifiera la poursuite d’investigations incluant des procédures invasives, la chirurgie, avec dans un tiers des cas un diagnostic de bénignité. Il faut aussi souligner le risque de découvrir une pathologie qui ne se serait jamais manifestée (surdiagnostic).
« Le sujet candidat au dépistage, poursuit le Pr Barlesi, doit savoir qu’il n’y a pour l’instant qu’une seule étude au monde qui a démontré l’intérêt du scanner dans le dépistage du cancer bronchopulmonaire ».
C’est pourquoi le groupe d’experts s’est prononcé pour des propositions de réalisation d’un dépistage à l’échelon individuel en France, selon deux modalités : soit à la demande d’un fumeur qui répond aux critères d’inclusion de l’étude NLST, soit à la demande d’un médecin informé de ces critères et qui aura fait part au candidat au dépistage des bénéfices et des risques encourus ainsi que l’intérêt du sevrage tabagique.
D’après un entretien avec le Pr Fabrice Barlesi, chef du service d’oncologie multidisciplinaire et innovations thérapeutiques, assistance publique hôpitaux de Marseille.
(1) Aberle DR, Adams AM, Berg CD, et coll. Reduced lung-cancer mortality with low-dose computed tomographic screening. N Engl J Med 2011 ;365:395-409.
(2) Couraud S et coll. From randomized trials to the clinic: Is it time to implement individual lung cancer screening in clinical practice? A multidisciplinary statement from French experts on behalf of the French Intergrup (IFCT) and the Groupe d’Oncologie de Langue Française (GOLF). Ann Oncol 2013 24(3):586-97.
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