Il existe bien une association entre traitement hormonal de la ménopause (THM) et cancer de l’ovaire. C’est ce que suggère une étude publiée en ligne ce vendredi dans « The Lancet ». Les chercheurs britanniques du Groupe d’études épidémiologiques sur le cancer de l’ovaire ont analysé les données de 52 études incluant 21 488 femmes.
L’analyse a porté surtout sur les données de suivi des femmes incluses dans les 17 études prospectives (35 rétrospectives) - plus de la moitié des cas de cancer du col - soit 12 110 femmes. Parmi ces dernières, 55 % (6 601) avaient reçu un THM pendant au moins 6 ans. Le risque de développer un cancer de l’ovaire est plus élevé de 43 % chez les femmes traitées, même pendant moins de 5 ans, que chez celles qui n’ont jamais été traitées. Le risque persiste pendant toute la durée du traitement et diminue progressivement à l’arrêt du THM et subsiste d’autant plus longtemps que la durée du traitement a été long.
Seuls deux types de cancer sont concernés
Même si les études prises en compte ne sont que des études observationnelles, des arguments existent en faveur d’un lien de causalité entre la prise de THM et la survenue de cancer, estiment les auteurs. Le fait que seuls deux types de cancer sont augmentés : les tumeurs épithéliales séreuses et les tumeurs endométrioïdes.
Les auteurs font remarquer qu’un tel phénomène est observé pour la contraception orale qui protège des cancers séreux, des endométrioïdes et des cancers à cellules claires mais pas des tumeurs épithéliales mucineuses. Si le lien causal est confirmé, la conséquence serait : « Pour les femmes qui prennent un THM pendant 5 ans à partir de l’âge de 50 ans, cela signifie un cancer supplémentaire pour 1 000 utilisatrices et un décès par cancer de l’ovaire pour 1 700 utilisatrices », estime le Pr Richard Peto de l’Université d’Oxford. Avec les autres auteurs de l’étude, il souhaite donc une révision des recommandations. Celles-ci, qu’elles soient de l’OMS ou américaines ou bien européennes, ne tiennent compte du risque de cancer de l’ovaire ou si elles le font comme au Royaume-Uni, c’est pour souligner un surrisque en cas d’utilisation prolongée.
SMR maintenu en mai 2014
En France, la Commission de la transparence de la Haute Autorité de santé (HAS) a réévalué les THM en mai 2014 (publié en juillet 2014). La HAS indiquait que les risques du THM (évalués à partir d’études dont certaines comme EPIC font partie de l’analyse du « Lancet ») étaient confirmés. « Les principaux risques identifiés des THM sont bien sûr le cancer du sein (le surrisque augmente avec la durée du traitement), le cancer de l’endomètre (l’augmentation du risque est liée au traitement estrogénique, c’est pourquoi un progestatif y est toujours associé chez les femmes non hystérectomisées), le cancer de l’ovaire, le risque thromboembolique veineux et d’accident vasculaire cérébral (surtout durant la première année de traitement) », soulignait la HAS.
Compte tenu de ces risques, la HAS insistait sur la nécessité d’une prescription aux doses les plus ajustées et le plus court possible, réévaluée au moins chaque année. Le SMR important de ces traitements était maintenu. La HAS rappelait qu’il n’y avait pas d’autre médicament remboursable indiqué dans le traitement des signes de déficit en œstrogènes (troubles du climatère). Dans la prévention de l’ostéoporose post-ménopausique, le THM est indiqué chez les femmes ayant un risque accru de fracture ostéoporotique et présentant une intolérance ou une contre-indication aux autres traitements indiqués dans la prévention de l’ostéoporose.
Changement de pratique
Dans un commentaire attaché à l’étude, Nicolas Wentzensen et Britton Trabert du NIH relèvent que le cancer de l’ovaire est beaucoup plus rare que le cancer du sein et les maladies cardiovasculaires et que les risques mis en évidence par l’étude devraient avoir un « impact limité » sur le risque global du traitement hormonal de la ménopause.
Ils soulignent également que le diagnostic des cancers pris en compte dans les études prospectives a été établi en 2001 soit quelque temps avant l’étude de la WHI (Woman’s Health Initiative) de 2002 qui avait conduit à un changement des pratiques et modalités de prescription. Dans son rapport d’évaluation, la HAS indique qu’en France, le recours au THM a régulièrement chuté depuis 2006 passant de 9 millions de boîtes vendues à 5 millions en 2013.
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