DE 100 à 120 compressions par minutes. Voici la recommandation internationale pour le massage cardiaque. Alors pour tenir ce rythme rapide certains auteurs ont suggéré aux personnels de santé de chanter mentalement un air connu et de se caler sur son tempo. L’idée semble séduisante. Les Américains ont fixé leur choix sur le célébrissime tube des Bee Gees « Staying alive », tandis que les Britanniques ont suggéré une comptine « Nellie the elephant » plus endiablée que le disco.
De ces propositions est née la mise en place d’une étude au cours d’une conférence du collège australien des ambulanciers, à Auckland, en Nouvelle-Zélande. Son objectif était d’évaluer ce qui permettait de parvenir et de maintenir au mieux un bon rythme de massage cardiaque, ainsi qu’une profondeur adéquate de dépression du sternum (de 50 à 60 mm, au niveau du xiphoïde) : pas de musique, un air de country « Achy Breaky Heart » (ABH), interprété par Billy Ray Cyrus (121 battements par minute), ou une musique plus techno « Disco science » (DS), interprétée par Mirwais (105 battements par minute). Toutes mélodies très faciles a entendre sur le site You Tube.
« Disco science ».
Si le mannequin test avait été un humain, sans conteste « Disco science » lui aurait été bien plus bénéfique que les deux autres options testées, constatent Malcolm Woollard et coll. Malheureusement, quelle que soit la méthode utilisée, musique ou non, près d’un secouriste potentiel sur deux ne déprimait pas suffisamment le sternum.
L’enquête a été menée de façon randomisée parmi des volontaires assistant à la conférence. Ils étaient 74, dont la moitié d’hommes, âgés en moyenne de 37 ans. Les participants se répartissaient en 61 % de paramédicaux, 20 % d’étudiants et 19 % d’autres professionnels de santé. Un peu plus de la moitié d’entre eux, 54 %, avaient bénéficiés de stages de réanimation cardiopulmonaire dans l’année précédente. Ils devaient réaliser trois séries de massage cardiaque d’une minute, séparées par une minute de repos. Chacune des trois séries était pratiquée sans musique, avec l’une puis l’autre mélodie (écoutées au casque), sur un mannequin.
Les différences de rythme de compression sont significatives entre le silence et ABH (105 compressions contre 120) et entre DS et ABH (104 contre 120). Il n’existe pas d’écart entre le silence et DS.
Ensuite a été analysée la différence entre les proportions de volontaires massant à 100-120. Elle est significative entre le silence (48/74) et DS (61/74) et entre DS et ABH (47/74), mais non significative entre silence et ABH. « Disco science » offre donc le meilleur taux de bon rythme de massage.
Restait à évaluer l’autre composante importante du massage cardiaque : la dépression thoracique. La différence de profondeur est significative entre le silence (48 mm) et DS (54 mm, p = 0,042), et entre DS et ABH (p = 0,879). Elle n’est l’est pas entre silence et ABH (54 mm, p = 0,065). Surtout, il apparaît que le nombre de participants provoquant des dépressions de 50 à 60 mm n’était pas significativement différent dans les trois groupes : silence, 31/74 (42 %) ; ABH, 32/74 (43 %) ; DS, 29/74 (39 %), soit un p› 0,5.
Beaucoup positionnaient mal leurs mains.
Globalement un tiers de ces personnels de santé comprimait insuffisamment le sternum du mannequin. De plus, ont constaté les auteurs de visu, de 50 à 66 % des participants positionnaient mal leurs mains et ce quelle que soit l’accompagnement. Enfin, environ 25 % relâchaient insuffisamment la pression à l’écoute de l’une des deux musiques.
Par son côté empirique et opportuniste, ce travail montre quelques faiblesses que relèvent les auteurs eux-mêmes. Il est vraisemblable que se sont portés volontaires ceux qui se pensaient compétents. Il s’agit également de participants à un congrès, donc a priori des individus plus motivés. Enfin, en raison de la brièveté de l’enquête, il n’est pas possible de savoir si les volontaires ont pu mémoriser les mélodies et leur rythme pour les mettre en pratique ultérieurement.
Dès lors la conclusion du travail apparaît plutôt décevante, puisqu’elle tient compte de la double composante, rythme et compression, du massage cardiaque. Dans ces conditions, les auteurs déclarent ne pas être convaincus par un bénéfice quelconque de la réanimation en musique. Malgré tout l’intérêt qu’elle peut susciter, cette voie de recherches n’apporte rien de plus qu’un simple métronome ou des informations audibles sur l’état du patient.
Emergency Medicine Journal doi : 10.1136/emermed-2011-200187.
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