Un progrès pour le patient, le cardiologue… et la prothèse

La télésurveillance des stimulateurs

Publié le 13/05/2009
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LE SUIVI d’un patient appareillé avec un stimulateur cardiaque suppose actuellement une consultation médicale tous les six mois, sauf événement intercurrent particulier, conformément aux recommandations de la Société française de cardiologie. Cette consultation dure environ 20 à 30 minutes. En effet, outre les signes fonctionnels et l’examen clinique, l’examen comporte un électrocardiogramme, l’interrogation de la prothèse et la vérification des seuils de détection et de stimulation, d’impédances de sondes et de niveau de charge de la pile. Enfin, la carte de porteur de stimulateur est mise à jour, un compte rendu est adressé aux médecins correspondants et la prochaine visite est planifiée. Ce suivi standard permet donc de prendre en compte les paramètres cliniques du patient, ainsi que des examens complémentaires éventuels.

Une transmission des anomalies dans les cinq minutes.

Certains stimulateurs peuvent toutefois faire l’objet d’une surveillance à distance, dans le cadre de la télécardiologie. Deux modalités sont alors possibles, la télésurveillance pouvant s’effectuer en fonction des événements et/ou des symptômes ou en continu.

La surveillance intermittente est proposée par la société Medtronic qui fait appel à son réseau CareLink, et par la société St. Jude Medical avec son système Housecall. La surveillance en continu, proposée par la société Biotronik, nécessite un stimulateur comportant une antenne intégrée. Celle-ci permet la transmission des informations par ondes radio à un boîtier extérieur équipé d’un téléphone GSM, le « Cardiomessenger ». Celui-ci doit être posé sur la table de nuit ou porté à la ceinture. Les messages sont alors envoyés par SMS au centre de surveillance dans la minute près de sept fois sur dix et dans les 5 minutes dans 99 % des cas.

Les investigateurs de l’étude OEDIPE (OnE Day pacemaker Implantation Program with homE-monitoring), publiée très récemment, s’étaient donné pour objectif de s’assurer que la surveillance d’un stimulateur double chambre par télécardiologie pendant le premier mois qui suit une primo-implantation ou un changement de stimulateur double chambre est possible sans augmentation du risque (1). Cette étude prospective randomisée multicentrique a été réalisée dans 39 centres privés ou publics et a porté sur un total de 406 patients, l’analyse ayant été réalisée en intention de traiter. Ils ont été aléatoirement assignés à une sortie précoce, 24 heures après primo-implantation et 6 heures après changement, avec surveillance par télécardiologie, ou à une durée d'hospitalisation habituelle et une surveillance conventionnelle. L'objectif principal de ce travail était la fréquence des événements indésirables sérieux à 4 semaines. Les autres critères ont été l'efficacité de la détection des dysfonctions de stimulateur, la durée de l’hospitalisation et les coûts médico-économiques.

Des changements de pratique à envisager ?

Concernant le critère principal, le nombre d'événements indésirables sérieux a été identique dans les deux groupes, avec une tendance, n’atteignant pas le seuil de significativité statistique, en faveur de la télésurveillance (17 % contre 26 % dans le groupe témoin  ; p = 0,21). Concernant la durée d’hospitalisation, elle a été plus brève de 34 % dans le groupe télécardiologie, avec une durée moyenne de 3,2 ± 3,2 jours contre 4,8 ± 3,7 jours dans le groupe affecté à la surveillance conventionnelle (p < 0,0001). La détection des anomalies a été plus précoce en cas de télésurveillance, avec une anticipation moyenne de 20 jours. La réduction des coûts médico-économiques est sensible dans un tel contexte, d’autant plus importante que le patient est loin du centre de surveillance. La télécardiologie a encore évidemment des limites. Elle ne règle pas toutes les difficultés, en particulier en l’absence de transmission des données, par exemple si le patient n’est pas à domicile et ne porte pas son Cardiomessenger. Par ailleurs, la responsabilité médico-légale des intervenants n’est encore pas clairement définie. Sur le plan financier, en Allemagne, le remboursement pour un suivi à distance est équivalent au remboursement d’un suivi en face à face. Au Portugal, le remboursement est prévu pour les consultations en face-à-face, mais les téléconsultations ne sont pas exclues, sans limite annuelle. Aux Pays-bas, un forfait de 272 euros est prévu pour la première année. Ainsi, la télésurveillance est possible, elle abrège la durée de séjour pour implantation et permet de détecter plus rapidement les événements indésirables, graves ou non.

D’après la communication du Pr Jacques Clémenty (Centre hospitalier régional universitaire Haut-Lévèque, Pessac), lors du 25 e Salon Cardiologie Consensus & Pratique, Paris, 1-3 avril 2009.

(1) Halimi F, et coll. Optimized post-operative surveillance of permanent pacemakers by home monitoring: the OEDIPE trial. Europace 2008;10(12):1392-9.

 Dr GÉRARD BOZET

Source : lequotidiendumedecin.fr