De notre correspondante
« Notre étude démontre qu’un trouble cardiaque monogénique peut être étudié de façon fiable avec la technologie des cellules souches pluripotentes induites, les IPS. Ceci est extrêmement important puisqu’il est difficile d’obtenir des cardiomyocytes de patients. Par conséquent, une maladie monogénique cardio-vasculaire peut être étudiée dans le propre contexte génétique du patient, et avec une source illimitée de cardiomyocytes, de cellules musculaires lisses et de cellules endothéliales humaines dérivées des cellules IPS », explique au « Quotidien » le Dr Karl-Ludwig Laugwitz (Université Technique de Munich, Allemagne).
Jusqu’à présent, les efforts pour comprendre la physiopathologie cardiaque humaine ont reposé principalement sur les modèles animaux, donc imparfaits, en raison aux différences entre espèces. Il était jugé préférable de conduire ces études sur des cellules humaines.
La génération de cellules souches pluripotentes induites, à partir de la reprogrammation de cellules somatiques de patients (démontrée pour la première fois en 2007), offre la possibilité de produire de grandes quantités de cellules souches propres à chaque patient qui peuvent ensuite être différenciées en cellules spécialisées.
Utilisée pour produire des cardiomyocytes fonctionnels.
Cette technologie des cellules IPS a déjà été utilisée pour produire des cardiomyocytes fonctionnels.
Moretti, Laugwitz et coll. viennent de l’appliquer pour la première fois à la production de cardiomyocytes porteurs d’une maladie. Il s’agit ici du syndrome du QT long de type 1 (SQTL1).
Caractérisé par un allongement de l’espace QT à l’ECG, ce syndrome est une cardiopathie héréditaire redoutable. Elle est, en effet, associée à un risque élevé de torsades de pointe (tachycardie ventriculaire polymorphe), de syncope et de mort subite. Ce syndrome est génétiquement et phénotypiquement hétérogène.
Le SQTL1, la forme la plus fréquente (45 % des cas), est causé par des mutations du gène KCNQ1, qui code pour le canal potassique de repolarisation à l’origine du courant IKs.
À partir de biopsies cutanées réalisées chez un garçon de 8 ans et chez son père, qui étaient tous deux atteints du SQTL1 (mutation R190Q du gène KCNQ1), les chercheurs ont reprogrammé des fibroblastes en cellules IPS (en insérant, par vecteur rétroviral, les gènes OCT3/4, SOX2, KLF4, et c-MYC). Puis, ils ont amené celles-ci à se différencier en cardiomyocytes.
Ces cardiomyocytes montrent, à l’enregistrement des potentiels d’action dans la cellule, des phénotypes ventriculaires, auriculaires ou bien nodaux. Les cellules ventriculaires ainsi dérivées des patients, comparées à celles dérivées de la même façon de sujets témoins, montrent tous les aspects de la maladie.
Ils présentent une repolarisation plus lente, avec une durée prolongée du potentiel d’action, et une réduction de 75 % de la densité du courant IKs. Ils montrent aussi une prédisposition accrue à la tachycardie induite par la stimulation adrénergique (connue pour être un facteur déclenchant d’arythmie chez les patients atteints du SQTL1), qui est atténuée par les bêtabloquants (le traitement de base actuel).
Une analyse plus approfondie de ce modèle cellulaire offre un nouvel éclairage sur le mécanisme du SQTL1. Tandis que le niveau d’expression du gène KCNQ1 est normal dans les cardiomyocytes dérivés des patients, sa distribution intracellulaire est anormale. Ainsi, la mutation R190Q semble altérer le transport du canal vers la membrane cellulaire. Elle pourrait agir de manière dominante négative lorsqu’elle est incorporée dans l’une des 4 sous-unités du canal tétramérique.
Développement de médicaments candidats.
« Nos résultats suggèrent d’autres approches pour le développement de médicaments candidats, telles que des composés visant à favoriser la délivrance de la protéine mutante ou bien des activateurs de l’IKs », notent les chercheurs.
« Nos prochaines étapes seront d’évaluer des médicaments stimulant l’Iks, afin de libérer du réticulum endoplasmique les tétramères du canal anormal, ce que nous ferons en collaboration avec une équipe de l’université Johns Hopkins à Baltimore », confie au « Quotidien » le Dr Laugwitz. « Cette équipe possède une bibliothèque de petites molécules capables de stimuler l’Iks. Nous pouvons donc évaluer maintenant ces molécules dans les myocytes provenant des patients atteints des syndromes du QT long de type 1 et 2. Nous espérons que ceci nous permettra dans le futur de procurer de meilleures options thérapeutiques ».
New England Journal of Medicine, 6 octobre 2010, Moretti et coll., p 1397 et 1471.
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