DE NOTRE CORRESPONDANTE
LE CANAL ARTÉRIEL (CA), un vaisseau sanguin indispensable chez le fœtus situé entre l’artère pulmonaire et la crosse de l’aorte, doit se fermer spontanément après la naissance, dans les 24 à 48 heures. S’il ne se ferme pas, sa persistance après la naissance peut conduire à l’hypertension pulmonaire et à l’insuffisance cardiaque, et constitue une cause majeure de mortalité et de morbidité, en particulier chez les nouveau-nés prématurés.
« La persistance du canal artériel est une anomalie cardio-vasculaire très fréquente chez les nouveau-nés (1/500), explique au " Quotidien " le Dr Steffen Massberg de l’université de Munich (Allemagne) qui a dirigé ce travail. Elle représente de fait la grande majorité des malformations cardiaques congénitales chez les nouveau-nés prématurés. Si la constriction de la paroi du canal artériel a toujours été reconnue comme jouant un rôle important, les mécanismes exacts conduisant à la fermeture proprement dite du CA après la naissance sont restés incertains. Notre étude montre que les plaquettes sanguines circulantes sont également requises pour permettre une fermeture complète et durable du CA, après l’étape initiale de constriction. »
Chez la souris, les chercheurs ont constaté que les plaquettes sont recrutées dans la lumière du canal artériel, dans les minutes suivant la naissance, et favorisent la formation d’un caillot tandis que le vaisseau sanguin se contracte. Lorsque les souris sont déficitaires en fonction plaquettaire (par défaut d’adhésion, d’agrégation ou de biosynthèse), leur CA ne se ferme pas et les souriceaux développent, de façon similaire aux humains, un shunt gauche-droit avec augmentation de perfusion pulmonaire, remodelage vasculaire pulmonaire, et hypertrophie ventriculaire droite.
Les chercheurs proposent donc le modèle suivant : durant la constriction, les cellules endothéliales tapissant le CA se détachent et déclenchent le recrutement des plaquettes ; un bouchon plaquettaire se forme, entraînant une obstruction thrombotique du CA rétréci et facilitant le remodelage de la lumière.
Ce phénomène semble survenir également chez les humains, puisqu’une étude rétrospective montre que chez les nouveau-nés prématurés, un faible taux des plaquettes est associé à un risque multiplié par 13 de persistance du CA.
Toutefois, des études prospectives portant sur un plus grand nombre de prématurés seront nécessaires pour confirmer le rôle causal des plaquettes dans la fermeture du CA chez les humains.
« Cette découverte est importante parce qu’elle améliore considérablement notre compréhension actuelle des mécanismes conduisant à la persistance du CA, souligne le Dr Massberg. A l’appui d’un lien causal, nous montrons que de faibles taux de plaquettes, chez les nouveau-nés prématurés d’une cohorte clinique, prédisent en fait un risque accru de persistance du CA. Lorsque nos résultats auront été confirmés dans des études cliniques plus larges, cela pourrait aboutir à un changement des stratégies thérapeutiques actuelles visant à prévenir la persistance du CA, en particulier chez les nouveau-nés prématurés ayant de faibles taux de plaquettes. »
Transfusions de plaquettes ?
« Nous espérons maintenant que de nombreux groupes de cliniciens chercheront à répliquer nos résultats dans des populations plus grandes de nouveau-nés. Cela sera essentiel pour résoudre l’importante question de savoir si la transfusion des plaquettes, chez les nouveau-nés prématurés présentant de faibles taux plaquettaires, pourrait offrir une nouvelle approche pour favoriser la fermeture durable du CA (en plus des stratégies pharmacologiques pro-constrictives établies). »
« Un résultat très intrigant, ajoute-t-il, est que les plaquettes non seulement déclenchent l’occlusion thombotique du CA, mais ouvrent aussi la voie à la prolifération luminale ultérieure, qui, à son tour, est essentielle pour la fermeture durable du CA. De façon intéressante, nous avons constaté que cela met en jeu une prolifération (dépendant des plaquettes) et peut-être aussi le recrutement d’une population de cellules, qui partage de nombreuses caractéristiques phénotypiques avec certains sous-groupes de cellules progénitrices. Par conséquent, à l’avenir, nous nous pencherons sur ces cellules progénitrices vasculaires. »
Nature Medicine 6 décembre 2009, Etchtler et coll. DOI: 10.1038/nm.2060
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