Les inhibiteurs du SGLT2 : une nouvelle classe thérapeutique dans le traitement du diabète
Plus de 3 millions de patients sont traités par un médicament contre le diabète selon les données du dernier BEH (1). En 2013, des nouvelles entités moléculaires pour le traitement du diabète ont été autorisées aux États-Unis, en Australie et en Europe, et notamment les inhibiteurs du transporteur sodium-glucose de type 2 rénal (i-SGLT2) de la classe des gliflozines.
Le rôle clé du rein dans la réabsorption du glucose
La quantité de glucose filtrée chaque jour par le rein est d’environ 160 grammes (2). Le rein joue un rôle important dans le métabolisme du glucose en le réabsorbant au niveau du tubule proximal :
– 90 % de la réabsorption du glucose au niveau des premier et deuxième segments, grâce aucotransporteur sodium-glucose de type 2 (SGLT2) ;
– 10 % au niveau du troisième segment, grâce au cotransporteur SGLT1.
Le SGLT2 joue un rôle clé dans le transport actif du glucose en régulant la réabsorption rénale de glucose. Chez un sujet normal, la totalité du glucose filtré est réabsorbée, expliquant l’absence de sucre dans les urines.
Comme l’explique le Pr Lyse Bordier*, diabétologue à l’hôpital Bégin (Saint-Mandé), « le seuil deréabsorption du glucose au niveau du rein est augmenté chez le diabétique, ce qui concourt à augmenter la glycémie. L’explication est liée au fait que l’expression du transporteur SGLT2 est accentuée chez le diabétique, et d’autant plus importante que les concentrations de glucose dans le sang sont élevées ».
Le mode d’action original des i-SGLT2
Le développement des i-SGLT2 est né de ce mécanisme physiologique rénal, avec un mode d’action original fondé sur la réduction de la réabsorption rénale du glucose et l’augmentation de la glycosurie, ce qui entraîne une baisse de la glycémie. Un mécanisme d’action d’autant plus intéressant qu’il est indépendant de l’insuline et de l’ancienneté du diabète.
Les i-SGLT2 favorisent aussi une perte pondérale de 2 à 3 kg (perte calorique urinaire) et une réduction de la pression artérielle (diurèse osmotique).
La glycosurie entraîne, dans près de 10 % des cas, la survenue d’infections génitales mycosiques, notamment chez les femmes.
En pratique, souligne le Pr Bogdan Catargi**, diabétologue au CHU de Bordeaux, « l’intérêt des i-SGLT2est de pouvoir être utilisés en monothérapie ou en combinaison avec la metformine ou d’autresantidiabétiques oraux, voire l’insuline chez le diabétique de type 2. Les études menées avec lacanagliflozine ont montré qu’elle permettait d’abaisser l’HbA1Cd’environ 1 % en monothérapie, et de 0,8 à 1 % en association avec la metformine en fonction de l’HbA1Cde départ (3, 4)».
Le rôle du médecin généraliste
Les médicaments de la classe des i-SGLT2 sont soumis à prescription initiale annuelle, réservée aux spécialistes en endocrinologie, diabète et maladies métaboliques ou en médecine interne, avec renouvellement restreint.
Pour le Pr Emmanuel Cosson***, diabétologue au CHU de Bondy, « il est important que les médecins traitants soient bien informés des bénéfices et effets secondaires de cette nouvelle classe thérapeutique, de façon à ne pas en avoir une mauvaise perception lors de l’initiation du traitement par le spécialiste. Un bon accompagnement par le diabétologue permettra aussi d’éviter la crainte éventuelle pour le médecin traitant de ne plus revoir son patient ».
Seuls les spécialistes seront donc habilités à initier ce traitement durant la première année, puis les médecins généralistes pourront intervenir pour renouveler la prescription ou l’intensifier.
La prescription de cette nouvelle classe thérapeutique, remarque le Dr Michaël Némorin****, médecin généraliste enseignant en Seine-Saint-Denis, sera l’occasion de resserrer les liens entre diabétologue et médecin traitant, sachant qu’il sera amené à adresser au moins une fois par an en consultationdiabétologique les patients diabétiques sous inhibiteurs du SGLT2. »
Dr Martine ANDRÉ
avec la collaboration des :
* Pr Lyse Bordier, service d’endocrinologie et métabolismes, HIA Bégin, Saint-Mandé
** Pr Bogdan Catargi, diabétologue, service d’endocrinologie-diabétologie-maladies métaboliques et nutrition, hôpital Saint-André, CHUBordeaux
*** Pr Emmanuel Cosson, diabétologue, service d’endocrinologie-diabétologie-nutrition, CHU Jean-Verdier, Bondy
**** Dr Michaël Némorin, MG enseignant, président du Réseau diabète 93 DIANEFRA
(1) InVS. Journée mondiale du diabète, 14 novembre 2014. BEH spécial 2014 ; 30-31 : 492.
(2) Scheen AJ et al., Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 1621-4.
(3) Lavalle-González FJ et al., Diabetologia 2013 ; 56 : 2582-92.
(4) Wilding JP et al., Int J Clin Pract 2013 ; 67 : 1267-82.
Directeur de la publication : Dr Gérard KOUCHNER
Rédacteur en chef : Dr Sophie TEBOUL
Rédaction : Dr Martine ANDRE
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