La pratique du sport est associée à une modification, réversible, du microbiome. Il est donc tentant d’espérer d’en tirer parti pour améliorer les performances des sportifs de haut niveau et même pourquoi pas contrer l’obésité. « Ce sera peut-être le cas à l’avenir avec des prescriptions personnalisées de probiotiques et/ou des transplantations fécales mais, pour l’instant, on en est bien loin. Les données sont trop disparates pour tirer des conclusions. L’interaction alimentation/microbiome/sport vient singulièrement compliquer la lecture des données et rend quasi impossible d’établir des liens de causalité. Sans compter que chaque individu, sportif ou pas, a son microbiome propre, ce qui se rajoute encore à l’équation », résume le Dr Jean François Claerbout, gastroentérologue à Lille. C’est néanmoins un domaine passionnant qui ouvre des pistes prometteuses.
Des résultats difficiles à interpréter
C’est en 2008 que paraît une première publication consacrée au microbiome du sportif (1). Dans cette étude japonaise, les auteurs montrent que la pratique sportive semble associée à une plus grande diversité du microbiome. Tout comme pour le muscle, le processus est réversible à l’arrêt du sport.
Une flopée d’études suivront. Dans deux travaux irlandais (2,3), les auteurs ont comparé la composition du microbiome d’individus sédentaires à celle d’athlètes de haut niveau des deux sexes, pratiquant divers sports. Une fois l’effet de l’alimentation sur le microbiome intestinal éliminé, ils ont trouvé que des variations persistaient. L’analyse des selles et/ou urines des athlètes permettait même de déterminer ceux pratiquant un même type de sport (contraction musculaire et prise d’oxygène similaires). Le sport ou l’activité physique peuvent donc manifestement induire des changements de profil du microbiome intestinal. Et c’est peut-être en partie l’origine des bénéfices de l’exercice physique sur la santé dans nombre de maladies.
Néanmoins, et malgré la multiplication des travaux, rien de bien détonnant ne sort. Trois méta-analyses réalisées en 2019 le montrent bien : les conditions d’étude, d’alimentation et d’activité physique sont trop disparates et non reproductibles (4,5,6). Sans compter, au sein de chaque étude, l’importante variation interindividuelle !
Un effet dépendant de l’lMC
Quelques études s’avèrent toutefois fort intéressantes. L’une d’elles a mis en évidence une corrélation entre l’évolution du VO2 max et la composition du microbiome. Avec l’entraînement, VO2 max et ratio Firmicutes/Bactéroïdes augmentent en parallèle (7).
Un autre travail a dévoilé que l’impact de l’exercice sur le microbiome variait en fonction de l’IMC (8). Cette étude longitudinale portant sur une trentaine de sujets sédentaires, obèses ou minces, montre qu’après 6 semaines de « mise au sport » (30 à 60 min d’exercice 3x/semaine), associée à un contrôle diététique strict, plusieurs types de bactéries ont été affectées différemment. Comme si l’exercice ne bénéficiait pas de la même manière aux uns et aux autres. Et, après une période de wash out sédentaire, tous sont revenus à leur état antérieur. Ce qui confirme l’effet transitoire et réversible du sport sur le microbiome.
Entretien avec le Dr Jean François Claerbout (Lille) (1) M Matsumoto et al. Biosci Biotechnol Biochem. 2008;72:572-6 (2) SF Clarke et al. Gut. 2014;63:1913-20 (3) O’Donovan et al. J Sci Med Sport. 2020;23:63-8 (4) Mailing et al. Exerc. Sport Sci Rev. 2019; 47:75-85 (5) R Codella et al. Dig Liv Dis. 2018;50:331-41 (6) SF Leite Geovana et al. Nutrition. 2019;60:152-60 (7) RP Durk et al. Int J Sport Nutr Exerc Metab. 2018 (8) JM Allen Jet al. Med Sci Sports Exerc 2018; 50:747-57
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