Plus d'un milliard d'humains touchés par l'obésité, un fardeau exponentiel

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Publié le 01/03/2024

Crédit photo : ROMAIN DOUCELIN/SIPA

L'obésité touche désormais plus d'un milliard de personnes dans le monde, enfants et adolescents compris, selon une estimation publiée en amont de la journée mondiale de lutte contre l'obésité du 4 mars, qui montre une accélération du fléau dans des pays à revenus faibles ou intermédiaires.

Entre 1990 et 2022, le taux d'obésité dans la population a quadruplé parmi les enfants et les adolescents et doublé chez les adultes, indique cette vaste étude publiée dans la revue médicale britannique The Lancet et effectuée avec la collaboration de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Cette épidémie a progressé « plus rapidement qu'anticipé », a noté le Pr Francesco Branca, directeur du département Nutrition pour la santé et le développement de l'OMS, lors d'une conférence de presse. Le franchissement du seuil du milliard de personnes concernées était initialement envisagé vers 2030, selon Majid Ezzati de l'Imperial College de Londres, l'un des principaux auteurs de l'étude.

En se basant sur les données d'environ 220 millions de personnes dans plus de 190 pays, ces travaux suggèrent que quasiment 880 millions d'adultes vivaient en situation d'obésité en 2022 (504 millions de femmes et 374 millions d'hommes). En 1990, ils étaient 195 millions. Depuis 1990, le taux d'obésité a quasiment triplé chez les hommes (de 4,8 % en 1990 à 14 % en 2022) et plus que doublé chez les femmes (de 8,8 % à 18,5 %), avec des disparités selon les pays.

Plus inquiétant encore, cette maladie touchait en 2022 près de 160 millions d'enfants et d'adolescents (94 millions de garçons et 65 millions de filles). Quelque 30 ans plus tôt, ils étaient 31 millions.

Problème mondial, au-delà des pays riches

L'obésité, maladie chronique complexe et multifactorielle, s'accompagne d'une augmentation de la mortalité due aux maladies cardiovasculaires, au diabète et à certains cancers. La pandémie de Covid-19, où le surpoids était un facteur de risque, en a été une illustration.

Autre enseignement : certains pays à revenus faibles ou intermédiaires, notamment en Polynésie et Micronésie, aux Caraïbes, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, affichent désormais des taux d'obésité supérieurs à ceux de beaucoup de pays industrialisés qui semblent atteindre un plateau, notamment en Europe. « Dans le passé, nous avions tendance à considérer l'obésité comme un problème de pays riches, désormais c'est un problème mondial », remarque Francesco Branca. Il y voit notamment l'effet d'une « transformation rapide, et pas en mieux, des systèmes d'alimentation dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires ». À l’inverse, l'obésité montre « des signes d'infléchissement dans certains pays d'Europe du Sud, surtout pour les femmes, l'Espagne et la France en étant des exemples notables », selon Majid Ezzati.

Baisse de l’insuffisance pondérale depuis 1990

L’insuffisance pondérale (également appelée sous-poids) a diminué depuis 1990 et désormais, « dans la plupart des pays, un plus grand nombre de personnes sont touchées par l’obésité que par l’insuffisance pondérale », pointe l'étude. Le sous-poids reste cependant un problème majeur dans certaines régions du monde, comme l'Asie du sud ou l'Afrique subsaharienne. Il est lié à une mortalité accrue chez les femmes et les très jeunes enfants avant et après l'accouchement, ou à un risque de décès supérieur de maladies infectieuses. Par ailleurs, nombre de pays à faible et moyen revenu pâtissent d’une alimentation de mauvaise qualité.

« Cette nouvelle étude souligne l'importance de la prévention et de la prise en charge de l'obésité dès le début de la vie et jusqu'à l'âge adulte, grâce à l'alimentation, à l'activité physique et à des soins adéquats aux besoins », souligne dans un communiqué Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l'OMS. Il appelle à « la coopération du secteur privé, qui doit être responsable de l'impact de ses produits sur la santé ».

Pour l'OMS, les actions bénéfiques sont insuffisamment appliquées : taxer les boissons sucrées, subventionner les aliments bons pour la santé, limiter le marketing d'aliments malsains auprès des enfants, encourager l'activité physique… Quant aux analogues du GLP-1 qui révolutionnent la prise en charge de l'obésité, « ces médicaments sont un outil important, mais pas une solution », met en garde Francesco Branca, rappelant que le recul manque encore sur leurs effets indésirables et à long terme.

C.G. avec AFP

Source : lequotidiendumedecin.fr