La prévention cardiovasculaire (CV) secondaire (coronaropathies et artériopathie périphérique) est un sujet d’intérêt majeur, et ce encore plus chez les sujets porteurs d’un diabète de type 2 (DT2). D’où l’idée d’étudier le rôle d’une association antiagrégant (aspirine) et anticoagulant (rivaroxaban) versus aspirine seule dans l’essai Compass, que les patients aient un diabète ou non. Les résultats de cette analyse préspécifiée ont été présentés lors du congrès « virtuel » de l’ACC 2020, tenu durant le début de l’épidémie de Covid-19 (1) et publié en ligne dans Circulation (2).
Il s’agit d’un essai multicentrique mené chez des patients avec antécédents de maladie coronarienne et/ou d’artériopathie périphérique, qui a comparé l’association rivaroxaban (2,5 mg, 2 fois par jour) et aspirine (100 mg par jour) à l’association placebo et aspirine, chez des patients diabétiques (n = 6 922) et non diabétiques (n = 11 356). Le critère d’évaluation principal est le composite CV habituel, le Mace : décès d’origine CV, infarctus du myocarde (IDM) ou accidents vasculaires cérébraux (AVC) non létaux. Des critères secondaires (dont la mortalité toutes causes) ont été enregistrés, ainsi qu’un critère d’évaluation principal de la sécurité : la survenue de saignements majeurs.
Une réduction trois fois plus importante de la mortalité
Résultat, le risque de survenue du critère primaire a été diminué de manière similaire par l’adjonction de rivaroxaban, tant chez les sujets diabétiques que non-diabétiques (− 20 % environ). Cependant, étant donné leur risque de base plus important, les patients diabétiques présentaient des réductions de risque absolu sous rivaroxaban plus important, que ce soit pour le critère d’évaluation principal à trois ans (2,3 vs 1,4 %) ou la mortalité toutes causes (1,9 vs. 0,6 %). Or les risques de saignement étaient similaires chez les patients diabétiques vs non diabétiques. Le bénéfice net prédéfini pour le rivaroxaban est ainsi apparu particulièrement favorable chez les diabétiques (2,7 % vs 1,0 % d’évènements en moins).
Au total, dans les situations d’athérosclérose stable, l’association aspirine-rivaroxaban a permis un degré relatif similaire de réduction des évènements coronariens, cérébrovasculaires et périphériques chez les patients avec ou sans diabète. Mais compte tenu du risque de base plus élevé des diabétiques, les avantages absolus semblent plus importants, y compris une réduction trois fois plus importante de la mortalité toutes causes confondues.
Ces constatations devraient ouvrir un nouveau champ de comportement thérapeutique et de recommandations pour la prise en charge de la prévention CV, surtout des patients avec DT2, qui conservent des taux très élevés d’évènements CV, de décès CV et décès toutes causes, que ce soit chez les hommes ou les femmes. L’absence de surrisque hémorragique de l’association thérapeutique donne une portée « sécurité » supplémentaire à cette étude.
Professeur émérite, Université Grenoble-Alpes
(1) Bhatt DL, et al. Compass Diabetes: Role of Combination Antiplatelet and Anticoagulation Therapy in Diabetes and Cardiovascular Disease. Abstract 20-LB-20544-ACC. Presented at the 2020 American College of Cardiology/World Congress of Cardiology Virtual Experience on March 28, 2020
(2) Bhatt DL, Eikelboom JW, Connolly SJ, Steg PG et col; Compass Steering Committee and Investigators. The Role of Combination Antiplatelet and Anticoagulation Therapy in Diabetes and Cardiovascular Disease: Insights from the Compass Trial. Circulation. 2020 Mar 28. doi: 10.1161/CIRCULATIONAHA.120.046448
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