Le comportement alimentaire, facteur clé chez l’enfant

Trois nouveaux loci associés à l'obésité

Publié le 19/01/2009
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DE NOTRE CORRESPONDANTE

EN PROGRESSION épidémique dans le monde, l'obésité résulte d’une interaction entre une multitude de facteurs génétiques et environnementaux. En effet à l'exception des rares formes monogéniques d'obésité, les formes les plus courantes sont sans doute causées par la combinaison de gènes de susceptibilité (terrain génétique prédisposant) qui interagissent avec les facteurs de l’environnement reliés à la consommation et à la dépense d’énergie.

L'équipe de Philippe Froguel (CNRS/Institut Pasteur de Lille et Imperial College de Londres)s'attache depuis quinze ans à mieux comprendre les prédispositions génétiques au diabète de type 2 et à l'obésité.

Froguel et son équipe, en collaboration avec des chercheurs français, finlandais, suisses, canadiens et allemands, publient dans la revue « Nature Genetics » les résultats d'une nouvelle étude génomique d'association.

Des enfants et des adultes.

Dans un premier temps, les chercheurs ont analysé les variations de polymorphisme (SNP) distribuées dans le génome de 685 enfants atteints d'obésité familiale précoce (avant 6 ans) et de 695 adultes atteints d'obésité familiale sévère (IMC égal ou supérieur à 40 kg/m2), comparés respectivement à 685 enfants et 731 adultes de poids normal (globalement 1 380 cas et 1 416 témoins, tous d'origine européenne).

Deux signaux majeurs d'association avec l'obésité sévère de l'enfant et de l'adulte ont été confirmés dans les gènes FTO et MC4R précédemment identifiés. En outre, 37 marqueurs SNP montraient une association avec l'obésité et un IMC accru.

Dans une seconde phase de réplication, ces 37 marqueurs SNP ont donc été évalués dans d'autres séries de cas-témoins (2 067 cas obèses/2 411 témoins) et dans plusieurs populations européennes (9 708 individus), soit au total chez 14 186 sujets européens.

Les analyses combinées de phase 1 et 2 englobant les enfants et les adultes ont permis d'identifier 3 variants SNP les plus fortement associés à l'obésité :

- un variant (rs1805081) situé dans le gène NPC1. Ce gène, dont 200 autres mutations causent la maladie de Niemann-Pick de type C1, code pour une protéine intervenant dans le transport endosomal du cholestérol (dans le SNC, le foie, et les macrophages) ; il pourrait jouer un rôle dans le contrôle de l'appétit puisque des souris porteuses d'une mutation perte de fonction de NPC1 souffrent d'amaigrissement tardif et consomment peu d'aliments ;

- un variant (rs1424233) à proximité du gène MAF (codant pour le facteur de transcription MAF-c). Ce gène contrôle la production des hormones insuline et glucagon, ainsi que des peptides glucagon-like. Ces hormones et peptides sont connus pour jouer des rôles clés dans le métabolisme du glucose et des glucides ; et le glucagon et les peptides glucagon-like apparaissent avoir un puissant effet sur la sensation de satiété ;

- un variant (rs10508503) à proximité du gène PTER (gène lié à la phosphotriestérase), dont la fonction reste inconnue.

Un quatrième gène (PRL) est associé à l'obésité et à la prise de poids plus spécifiquement chez l'adulte. PRL produit la prolactine, une hormone bien connue pour son effet déclencheur de la lactation chez la femme. La prolactine joue aussi un rôle dans le contrôle de la prise alimentaire.

Les 3 variants majorent de 50 % le risque chez l'enfant.

Le variant situé près du gène PTER majore de 34 % le risque d'obésité chez les enfants, et accroît de 20 % le risque d'obésité sévère chez les adultes. Le variant situé dans le gène NPC1 augmente de 9,6 % le risque d'obésité de l'enfant et de 13,6 % le risque d'obésité sévère de l'adulte. Enfin, le variant situé près du gène MAF augmente de 5,7 % le risque d'obésité de l'enfant, et de 16,1 % le risque d'obésité sévère de l'adulte.

Les 3 variants combinés augmentent de 50 % le risque d'obésité précoce chez l'enfant, et le risque d'obésité sévère chez l'adulte.

Complétant l'analyse pangénomique de la variation de l'IMC dans la population générale, cette approche révèle que l'étude des formes familiales d'obésité sévère est particulièrement utile pour comprendre les causes génétiques de l'obésité. Ils démontrent le rôle fondamental du comportement alimentaire dans la régulation et l'évolution de la corpulence humaine et dans la survenue des obésités sévères de l'enfant.

« Nature Genetics », 18 janvier 2009, Meyre et coll.

Dr VERONIQUE NGUYEN

Source : lequotidiendumedecin.fr